Crise : L’avenir du Ps en question

Les remous au sein du Parti socialiste sont cycliques. Presque depuis toujours, la formation des «Verts» est minée par une crise intestine favorisant, par moments, des départs. Mais à chaque fois, la formation de Léopold Sédar Senghor se tord, mais ne rompt jamais. Jusqu'ici. Mais réussira-t-elle à maintenir le cap avec l'emprisonnement de Bamba Fall et Khalifa Sall, deux maires de la capitale sénégalaise, deux caciques du Ps ? Seneweb a posé le débat.

Depuis le dépoussiérage de l'affaire Barthélémy Dias et l'arrestation du maire de la Médina, Bamba Fall et plusieurs proches l'édile de Dakar, Khalifa Sall, suite à une plainte d'Ousmane Tanor Dieng, certains observateurs ont prédit la fin du Parti socialiste. Et lorsque l'emprisonnement de Khalifa Sall vient s'ajouter à cette crise au sein de la formation des «Vertes», l'on pense que la chute du mastodonte est inéluctable. Le Ps ne se relèvera pas, comme il l'avait fait par le passé, pense-t-on. Car les responsables du Parti socialistes sont allés trop loin, en étant les instigateurs de l'emprisonnement de quelques-uns de leurs éminents membres.

Par le passé, la formation de Léopold Sédar Senghor a toujours pu puiser dans ses réserves pour faire face à l'orage. Notamment, après le départ avec fracas de Djibo Kâ en 1996, la démission de Moustapha Niasse en 1998, de Mbaye Jacques Diop en 2000 et de Robert Sagna en 2007, pour ne citer que ceux-là.

«L’avenir du Ps est très sombre»

Le Ps, pense-t-on, est fini. Sa déchéance est enclenchée. Sa mort programmée. Il ne se relèvera pas de cette dernière crise jugée trop profonde. Plus profonde que les précédentes. Aujourd'hui, au sein du Ps, l'adversité vire même à la haine.

Le politologue Ibou Sané pense que le problème fondamental du Ps est que «Khalifa Sall est emporté par une jeunesse extrêmement pressée qui pense que leur parti peut revenir de sitôt au pouvoir, alors que ce parti a dirigé plus de 40 ans ce pays». Selon le politologue, «ces jeunes, qui ont choisi Khalifa Sall, ont forcé la main au secrétaire général, Ousmane Tanor Dieng. S’ils venaient à perdre ces élections, ils vont davantage s’enfoncer au point que le Parti socialiste risque de disparaître. Or, ils oublient que le Ps est tenu par des personnes âgées aussi bien du côté des femmes que du côté des hommes. Des personnes qui auraient pu transhumer au Pds à l’époque et/ou à l’Apr, mais elles sont restées pour préparer l’avenir avec les coalitions. Malheureusement, les jeunes n’ont pas compris».

Le politologue conclut en soutenant que «le Ps ne peut travailler qu'avec les coalitions. Il ne peut pas, pour l’instant, partir seul car les Sénégalais n’ont pas encore digéré certaines erreurs parce que les gens ont souffert avec le Parti socialiste».

«Tanor et Cie ont déraillé»

Moussa Taye, conseiller politique du maire de la ville de Dakar, Khalifa Sall, socialiste de première heure, pense, lui, que Ousmane Tanor Dieng et Cie ont déraillé. «Malheureusement, aujourd’hui certains socialistes ont perdu leur âme. Ils ont choisi le camp de l'immobilisme, du suivisme phénoménal. Ils n’ont plus d’ambitions car ils ont choisi de suivre un libéral qui n’a pas la même idéologie que nous socialistes», soutient Moussa Taye.

Il pense, toutefois, que quelles que soient les difficultés, le Ps demeure une institution. «Un jour, Ousmane Tanor Dieng, secrétaire général du Parti, et ses partisans retrouveront leurs esprits afin que nous puissions sauvegarder les valeurs socialistes que nous défendons tous. Je ne suis pas de ceux qui pensent que le parti va mourir. Il y a une crise qui est là, qui est réelle. Il faut le reconnaître. Mais notre capacité de dépassement va nous permettre de surmonter la crise et de nous retrouver. Je pense que le parti survivra à cette crise car il a traversé beaucoup d’histoires, mais le parti a toujours su résister», soutient-il.

Wilane : «Une société sans crise n’existe pas»

Le maire de Kaffrine et porte-parole du Ps, Abdoulaye Wilane, ne dit pas autre chose. «Il peut exister, dans un parti, des divergences, des conflits. Une société sans crise, sans difficultés, n’existe pas. Ce qu’il faut, c’est avoir des mécanismes, des voies et des moyens pour résoudre les problèmes», fait-il savoir.

Selon lui, le problème qui se pose est que «des individus du parti (Khalifa Sall et compagnie, Ndlr) n’ont pas voulu faire preuve de loyauté en démocratie parce qu’ils ont voulu passer outre les résolutions du parti, les décisions du parti. Ils sont en train de se positionner».

Wilane pense que «l’incarcération de Khalifa et compagnie n’a rien à voir avec l’avenir du parti». «Ceux qui sont en prison ne sont pas plus méritants que les morts. C’est Senghor qui a créé son parti avec ses compagnons. Il est mort et certains de ses compagnons sont partis. La vie est faite de dissidences et de rencontres. Quelqu’un qui est à l’article de la mort, on ne peut pas l’empêcher de mourir», laisse-t-il entendre. Le Ps, fait-il comprendre, n’appartient ni à Ousmane Tanor Dieng, ni à Khalifa Sall, ni à quelqu’un d’autre. C’est une institution. Senghor est parti, Abdou Diouf a quitté et un jour Tanor quittera le parti. Le Ps, dit-il, est dur comme un roc, solide comme un baobab. Personne ne parviendra à le déraciner. Et ceux qui l'ont quitté ne sont pas mieux lotis que ceux qui y sont restés.

Chamsidine SANÉ – Seneweb.com