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Suicide avorté : des rescapés racontent

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Suicide avorté : des rescapés racontent
Dans L’Observateur, quatre personnes rejouent le film de leur tentative ratée de se donner la mort. Moussa Sow a témoigné à visage découvert. P. Ndiaye et F. Dia ont préféré dissimuler leurs prénoms tandis que la deuxième femme du groupe a choisi l’anonymat total. Le journal a changé ses prénom et nom.

«Quand l’infirmier m’a annoncé que…»                          

Moussa Sow a fait la prison pour vol de bétail. Lorsqu’il a recouvré la liberté, ce polygame, deux épouses, et père de trois enfants mène une vie rangée dans son village de Keur Momar Sarr (région de Louga). Jusqu’au jour où une deuxième affaire de vol faillit l’envoyer non derrière les barreaux, mais de vie à trépas. «Je m'apprêtais à aller en transhumance en compagnie de ma première femme, quand mon petit-frère m'annonce que mes demi-frères font courir dans le village la rumeur selon laquelle je serais impliquée dans le braquage du domicile d'un riche commerçant», rembobine-t-il dans L’Observateur, qui a consacré une page et demie aux suicides manqués. «Au début, poursuit-il, je ne le prenais pas pris au sérieux. Mais à la suite de mon frère, une de mes nièces se présente devant moi en pleurs. Elle me lance à la figure que je suis une honte pour la famille.»

Piqué dans son orgueil, Moussa Sow décide de se suicider. C’était en 2020. Il se retire discrètement dans la forêt du village de Mbaye Aw. Au moyen d’une corde reliée à une branche d’un arbre, il fixe son cou et s’abandonne dans le vide. La corde cède. Il chute lourdement et perd connaissance. Réveil à l’hôpital. «Quand l'infirmier m'a annoncé que j'avais échappé à la mort, j'ai flanché, souffle-t-il au bout du fil lors de l’entretien avec L’Observateur. Pendant près d'une heure, je suis resté prostré dans mon lit d'hospitalisation, fixant le plafond et fuyant les regards angoissés de ma famille. J'avais honte.»

Il jure : «Si c'était à refaire, je ne commettrais plus jamais une telle bêtise. J'ai pardonné à mes accusateurs, mais je n'oublierai jamais cette affaire qui a failli me coûter la vie.»

«Ndiaye tèn»

L’Observateur rapporte qu’une étude publiée récemment indique que 9,4% des Sénégalais sont exposés au suicide. Trois causées sont invoquées : les troubles psychiques, la dépression ou l’honneur bafoué. P. Ndiaye et Mama Guèye (nom d’emprunt) ont essayé de se donner la mort pour la troisième raison.

Le premier est domicilié à Kelle Guèye. Ce chauffeur de taxi aurait manqué de fêter ses 60 ans. En 2018, il s’est jeté dans un puits après une violente altercation avec sa mère. Il avait pris la défense de son épouse et la pilule avait du mal à passer pour beaucoup au sein de la famille. «Je lui ai suggéré de considérer ma femme comme sa propre fille, confie-t-il. Mais elle m'a traité de tous les noms et s'est mise à insulter sa belle-fille. N’en pouvant plus, j'ai quitté la maison pour aller auprès de mes amis qui prenaient le thé à la place du village.»

Les ennuis ne faisaient que commencer. P. Ndiaye : «Ma sœur me retrouve sur place et déclare devant tout le monde que j’avais frappé ma mère pour les beaux yeux de ma femme. Tous les regards se sont alors braqués sur moi. Bien que convaincu d’avoir fait ce qui est juste, je m’en voulais un peu car ma mère avait piqué une crise à cause de cette dispute. En plus, mes amis semblaient accorder du crédit à la déclaration de ma sœur : ils me regardaient de travers. Voilà ce qui m’a poussé à me jeter dans le puits du village.»

Le taximan embraye : «Miraculeusement, je suis tombé sur mes jambes. À part la forte chaleur et l'odeur nauséabonde dans le puits, je n’ai rien ressenti. Je n'avais pas la moindre égratignure. J'ai rassuré mes amis qui étaient venus à mon secours. Plus tard, quand ma mère a repris ses esprits, elle a fait savoir à tout le monde que je n'avais jamais levé la main sur elle. Mais depuis cette mésaventure, j'évite de me mettre en colère. Mes amis me taquinent en m'appelant ‘Ndiaye tèn (puits)’. J’ai désormais une phobie des puits.»

«J’ai avalé deux plaquettes de paracétamol»

Mama Guèye, elle, avait dilapidé les économies de son mari, un ancien immigré qui avait décidé de quitter l’Italie pour rentrer au bercail et se lancer dans l’entrepreneuriat. L’ardoise était de 11 millions de francs CFA. Les faits remontent à 2018. Avec ses enfants, la quadra vivait chez sa belle-famille à Grand Mbour. Elle avait déjà utilisé 5 millions de francs CFA des fonds pour équiper sa boutique. Et lorsque l’un des amis de son époux l’a désignée comme belle-sœur de sa future épouse, elle dilapide le reste pour les besoins des festivités du mariage.  

«Je comptais rembourser l'argent avant qu'il ne s'en aperçoive», justifie-t-elle dans les colonnes de L’Observateur. Mais son mari lui fait une surprise : il débarque au cours de la cérémonie. Et dès le lendemain, lui réclame ses économies sans se douter de rien, d’après le journal. «Vivant sous le même toit que ma belle-famille, notamment ma belle-mère avec qui je ne m'entendais pas, j'ai aussitôt pris peur. J'ai essayé de trouver une solution. C'est ainsi que j'ai simulé une agression. Malheureusement, j'ai été démasquée par le grand-frère de mon mari.»

Coincée, Mama Guèye décide alors de se donner la mort. «J'ai avalé d'un seul coup deux plaquettes de paracétamol. J’ai été sauvée par ma belle-mère», rapporte L’Observateur, sans donner plus de détails. «Finalement, mon époux s'est retrouvé au marché central de Mbour et s'activait dans la vente de bracelets pour enfant, regrette-t-elle. Son activité fera long feu. L'année suivante, il meurt dans un accident de la circulation. Ma tentative de suicide a ruiné ma vie, celle de mon mari et mon ménage. Je me sens responsable de sa mort. J’ai été obligée de quitter le domicile familial, couverte de honte et de remords. Souvent, les images de mon mari se bousculent dans ma tête. Ma belle-mère aurait dû me laisser mourir.»

«Je suis traumatisée»

F. Dia est une autre miraculée. Sa tentative de suicide a également échoué. Celle-ci a laissé des traces. En essayant de se donner la mort en se jetant dans un puits, cette Kébéméroise a perdu l’usage de sa jambe gauche. «Pour rien au monde, je ne retenterai l'expérience. Je suis encore traumatisée», expire-t-elle.

À l’origine de son drame, un projet de mariage forcé avec un riche commerçant, «assez âgé». «Certes, il pouvait me combler de cadeaux, mais je ne l'aimais pas, assume F. Dia. Même si aujourd'hui je peine à joindre les deux bouts, je vis avec l'amour de ma vie. Nous avons deux enfants.»

Seule ombre au tableau : «L'homme avec qui je sortais avant ma tentative de suicide, m'a abandonnée quand il a appris que j’étais devenue une personne à mobilité réduite. Sa famille ne voulait pas qu'il m'épouse. Et pourtant j'étais prête à rompre avec les miens pour lui.» Un de perdu, un de retrouvé.


6 Commentaires

  1. Auteur

    Djibson

    En Octobre, 2023 (17:12 PM)
    Article intéressant.  Plus de 9% de la population exposés au suicide ? Ça fait quand même beaucoup.  Peut-être que ça dépend de ce que l'Observateur veut dire par "exposés". 
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  2. Auteur

    Suicidaire

    En Octobre, 2023 (17:14 PM)
    J ai envi de me suicider quelle est la méthode la plus rapide 
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    Auteur

    En Octobre, 2023 (17:16 PM)
    Espérons que pour Sonko ça va marcher 
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    Auteur

    Farba

    En Octobre, 2023 (17:48 PM)
    Suicide,courage ou lâcheté?Un sujet de Philo avec M.Dia,Van Vo.
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    Auteur

    Farba

    En Octobre, 2023 (17:48 PM)
    Suicide,courage ou lâcheté?Un sujet de Philo avec M.Dia,Van Vo.
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    Auteur

    En Octobre, 2023 (18:35 PM)
    jaime l'article. read it with emotions
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