TROIS QUESTIONS À MADEMBA SOCK, SECRÉTAIRE GÉNÉRAL SUTELEC : « Je suis un bon payeur et je paie toujours mes factures »

Mademba Sock, secrétaire général du syndicat unique des travailleurs de l’électricité a effectué une tournée dans la région de Kédougou dans le cadre de la campagne pour les élections de représentativité. En marge de cette visite, le SG de l’Unsas n’a pas porté de gants pour décrier le plan « Takkal » du ministre d’Etat, ministre de l’énergie Karim Wade. Il a, à cet effet préconisé des solutions pour une véritable sortie de crise énergétique au Sénégal.

Matin : Le Sénégal traverse une profonde crise énergétique avec des délestages récurrents sur l’ensemble du territoire Sénégalais. Pensez vous que le Plan « Takkal » lancé par le ministre d’Etat, ministre de l’énergie Karim Wade peut être une panacée ?

Mademba Sock : Je suis très clair sur la question et je pense que le mécanisme et le dispositif qui ont été mis en place ne sont pas partagés. Quand on dit Takkal, ça veut rien dire en Wolof sinon que brûles toi. On ne dit pas « démaye Takkal » « lampe bi », on dit « tallaal » « lampe bi ». Je dis que le concept en lui-même est négatif, ça c’est le premier problème de la forme.

Le deuxième problème de fonds c’est que quand on a un document qui résulte du travail d’un cabinet qui a procédé à des interviews, on partage ce document. Or ce document n’est pas partagé et il comporte des zones discutables. En tant qu’expert dans ce domaine, on a quand même notre mot à dire.

Malheureusement, on vit avec le fait divers parce qu’on a un petit garçon excité qui veut jouer dans la cour des grands. Or, il faut qu’on admette que dans ce Sénégal, c’est la pluralité des regards par rapport à des questions qui peuvent nous permettre d’aller en avant. Mais il est inadmissible que chacun vienne avec son prêt-à-porter et veuille l’imposer aux gens. Ce n’est pas bancable.

Quand vous dîtes que vous allez procéder à la location, nous avons dit qu’il ne faut pas que la location soit surdimensionnée et je pense aussi bien la Banque Mondiale que le comité constatent que c’est surdimensionné. Vous ne pouvez pas louer 50 mégawats le 1er Avril pour 16 mois et 100 mégawats le 1er Octobre pour 12 mois en un moment où vous allez avoir du gaz qui va arriver.

C’est à dire quand vous placez vos groupes sous le réseau, vous placez les groupes qui vous coûtent le moins cher et qu’aucune industrie électrique dans le monde que je connais n’a été bâtie autour du fuel, du diesel oil qui est un produit noble. L’industrie Electrique se bâtit toujours autour de la vapeur et de l’hydraulique. Malheureusement, ce sont ces questions qui sont là et qui ne sont pas partagées.

Et ces questions à mon avis, on aurait dû les partager. La question qui se pose, c’est  celle  du combustible mais on déleste avec 50 mégawats alors qu’on a 152 mégawats, l’autre fois on a délesté 74 mégawats et on avait 98 mégawats. On nous dit que c’est le fait du manque du combustible.

Si vous avez trois taxis qui ne bougent pas parce que vous n’avez pas de carburant et vous allez acheter  5 autres taxis. Je me pose la question de savoir si les taxis vont rouler si c’est vous qui deviez les approvisionner en combustible. Voilà le sens du combat qui n’est pas un combat personnel mais simplement un combat pour la vérité avec un grand « V ». Il faut que chacun se conforme avec la vérité parce que c’est notre pays qui est en jeu.

En tant qu’expert dans le domaine, quelles solutions préconisez-vous pour une sortie de crise énergétique au Sénégal?

D’abord, il faut à brève échéance régler le problème de l’approvisionnement en combustible. Il y a un fonds spécial de soutien à l’énergie et je pense qu’il faut être un ministre particulier pour bénéficier quand même de cette faveur. Il y a la possibilité d’utiliser le budget consolidé d’investissement, les taxes qui étaient dédiés au Cosec dont les taxes maritimes, les taxes sur les produits noirs mais également les taxes universelles sur les télécoms.

Mais c’est tant mieux pour le secteur  tentez si bien que ça puisse régler le problème. Achetons du combustible, signons des contrats de maintenance avec les unités de production, mettons la Senelec dans des situations où elle sera soulagée des taxes, arrêtons le fonds spécial d’importation des produits pétroliers dans lequel la Senelec contribue à concurrence de 25.000 F par tonne.

Quand vous prenez des éléments disponibles de 2009 sur les 332.000 tonnes consommées par la Senelec, il y a 10 milliards que la Senelec paie  pour soutenir la SAR. C’est un problème. Je veux dire, voilà le type de solutions qui peuvent régler le problème. Mais la solution, la meilleure, c’est d’abord celle de l’écoute, de la concertation, de la différence et je pense qu’il faut qu’on comprenne nos analyses.

J’ai l’habitude de dire à mes amis syndicalistes que si les mains et les pieds du tisserand ne se contredisent pas, il n’y a pas de tissu, or on ne veut pas avoir de tissu parce qu’on ne veut pas que les mains et les pieds du tisserand se contredisent. Et c’est ça notre combat.

Aujourd’hui, vous avez des projets, vous avez des attributions, des bases, des bases, on va l’acheter la base  et elle sera là mais quand la base va arriver et une fois qu’on va faire de cette centrale pérenne fruit de la coque, ce sont des questionnements qui sont là et peut être il faut des personnes averties pour pouvoir partager à mon avis cette question. Malheureusement, on ne partage pas parce qu’on pense qu’on a tous les droits.

Le ministre d’Etat, ministre de l’énergie vous accuse à tort ou à raison de ne payer que 10% de vos factures d’électricité. Etes-vous de cet avis ?

 Mais non, c’est de l’enfantillage moi je ne suis pas un mauvais payeur, je pense que c’est d’ailleurs impropre quand il a dit que je paie 10% de mes factures. En bon Français, cela veut dire, on me facture 5000F , je paie 500F ce n’est pas vrai. Dans tout le secteur de l’électricité il y a le tarif préférentiel et moi je bénéficie de ce tarif qui est d’ailleurs inférieur au tarif dont bénéficie les membres du conseil d’administration. Tarif préférentiel, parce je suis un élément du secteur.

Et ce sont des conquêtes, des acquis syndicaux. Nous avons fait de telle sorte que l’Etat et la Senelec aient une tarification inférieure à la tarification normale de M. Tout. Je suis un bon payeur et je paie toujours mes factures d’électricité mais je bénéficie de tarif préférentiel.

Car en matière de privilège, il y a des hommes qui sont mal placés pour donner des leçons parce qu’eux, bénéficient des privilèges de la République et de façon permanente et quotidienne  .Quand on voyage en jet privé aux frais du contribuable, quand on loue 3 paliers à l’immeuble Tamaro, et j’en passe on est un sur privilégié. Je ne suis pas un privilégié du secteur.