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[Reportage] Rahat : La plus grande ville bédouine au monde, entre traditions, education et proximité de Gaza

Auteur: Ndeye Astou Konaté, envoyée spéciale

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[Reportage] Rahat : La plus grande ville bédouine au monde, entre traditions, education et proximité de Gaza

Perdue dans l’immensité du désert du Néguev, entre dunes ocre et chaleur sèche, Rahat s’impose comme la plus grande ville bédouine au monde. À quelques kilomètres de Beer Sheva, cette ville en pleine expansion avance à la croisée des traditions ancestrales et d’une modernisation accélérée. Ici, les rues portent des numéros plutôt que des noms, et chaque maison raconte une histoire de résilience, de famille et de foi.

C’est dans ce décor que s’est déroulée notre immersion, rythmée notamment par des rencontres avec des femmes musulmanes engagées dans l’apprentissage du Coran et dans une démarche d’émancipation personnelle.

Une culture de l’hospitalité qui résiste au temps

La société bédouine reste profondément marquée par l’hospitalité, la solidarité et le respect des anciens. Accueillir un visiteur, lui offrir un thé, un repas ou une parole bienveillante relève presque du devoir moral. Malgré les mutations urbaines rapides, cette identité demeure intacte.

Rahat, en Israël, se trouve à seulement 40 km de Gaza, une proximité qui rappelle chaque jour aux habitants la fragilité de leur quotidien. Les tensions régionales y laissent parfois des traces, mais la ville continue d’avancer, forte de ses valeurs et convaincue du rôle central de l’éducation.

L’ecole du Cheikh Jamal : un modèle d'émancipation féminine

Au cœur de cette dynamique, une figure se démarque : le cheikh Jamal, imam respecté et éducateur inspirant. Depuis une dizaine d’années, il mène un projet audacieux : créer une école dédiée à l’apprentissage du Coran, mais aussi au développement personnel des femmes de Rahat. Aujourd’hui, son établissement est devenu une référence dans tout le sud du pays.

Chaque jour, près de 400 femmes y viennent non seulement apprendre le Coran, mais aussi acquérir des compétences essentielles : lecture et écriture, médiation sociale, prise de parole, résolution de conflits au sein de la communauté.

Certaines de ces femmes arrivaient sans savoir écrire leur nom. Désormais, elles lisent, comprennent et transmettent. L’une des histoires les plus marquantes est celle d’une femme de 80 ans, jamais scolarisée, qui a mémorisé l’intégralité du Coran après cinq années d’apprentissage — un accomplissement exceptionnel dans la tradition islamique.

Le cheikh Jamal n’a bénéficié d’aucune aide publique. L’école fonctionne grâce à ses propres moyens et à des donateurs mobilisés par l’impact de son travail. Cette initiative lui a valu un prix d’excellence en éducation, une distinction rare dans la région. Fort de ce succès, il espère désormais reproduire le modèle dans d’autres localités. Des discussions ont même été engagées avec des institutions des Émirats arabes unis.

Le rôle central de la mosquée et de l'Éducation

Selon l’imam superviseur du sud, la région compte 560 mosquées, dont 30 à Rahat. Cette densité témoigne du rôle central de la religion dans la société bédouine. Entre 5 et 7 % des fidèles de la ville sont originaires d’Afrique, formant une communauté active et bien intégrée.

Une partie des imams sont employés par l’État. Leur mission dépasse la gestion des mosquées : ils interviennent dans les écoles pour sensibiliser à la tolérance, la coexistence et au vivre-ensemble. Rien que durant la Semaine mondiale de la tolérance, ils sont intervenus dans 15 à 20 établissements.

Au cours d’un voyage en Turquie, un imam de Rahat a découvert une grande mosquée dont l’architecture l’a profondément marqué. Séduit, il en a rapporté les plans et lancé la construction d’une version locale, financée entièrement par des donateurs pour un montant d’un million de dollars. Aujourd’hui, elle compte parmi les plus grandes mosquées de la ville.

Le centre éducatif du cheikh Jamal, lui, fonctionne 24 heures sur 24, un modèle quasiment unique dans la région : le matin et l'après-midi sont dédiés aux sessions pour les femmes, le soir aux cours pour les hommes, et les vendredis et samedis à l'enseignement des enfants (environ 400 chaque week-end).

L’école mobilise 65 enseignants. Malgré des salaires modestes, plusieurs d’entre eux versent chaque mois des dons dans la caisse de l’établissement — par conviction religieuse et par attachement au projet. Cette solidarité interne contribue largement à sa réussite. Déjà, 121 femmes formées dans le centre travaillent désormais dans des mosquées ou institutions religieuses du pays.

Au-delà du religieux, Rahat investit massivement dans l’éducation moderne. De nombreux jeunes poursuivent aujourd’hui des études universitaires dans les domaines des sciences, de l’ingénierie ou de la santé. Pour les habitants, c’est là que réside la transformation profonde de la ville : le passage d’une société strictement traditionnelle à une communauté instruite, organisée et tournée vers l’avenir.

À Rahat, la culture bédouine n’est pas un vestige du passé : elle est vivante, fière, et transmise chaque jour. Mais la ville avance aussi résolument vers le futur, portée par des éducateurs comme le cheikh Jamal, par une jeunesse avide de savoir et par des initiatives communautaires qui redessinent silencieusement son paysage social.

Dans le désert, Rahat rappelle une vérité puissante : le savoir est la plus précieuse des oasis.

Auteur: Ndeye Astou Konaté, envoyée spéciale
Publié le: Dimanche 07 Décembre 2025

Commentaires (2)

  • image
    Djibson il y a 7 heures

    Les Arabes, tu vas chez eux tu t'habilles comme eux, ils viennent chez toi, ils veulent garder leur manière de s'habiller. Ils sont forts dé.

  • image
    Annita il y a 7 heures

    Tu veux trouver une femme pour une nuit? Viens sur - Hot21.fun

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