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Petite enfance : Magor Dia alerte sur un système défaillant et réclame le rattachement de l’ANPECTP à la Présidence ou à la Primature.

Auteur: Sokhna Faty Isseu SAMB

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Petite enfance : Magor Dia alerte sur un système défaillant et réclame le rattachement de l’ANPECTP à la Présidence ou à la Primature.

La mort tragique d’un bébé de huit mois ce lundi 08 Décembre à Thiès, survenue quelques années après la perte de son propre fils en 2020, a transformé l’engagement professionnel de Magor Dia, sociologue, spécialiste de la petite enfance, en une véritable mission personnelle.

Dans un entretien accordé à Seneweb, il dénonce un système de garde d’enfants "à bout de souffle" et appelle à une refonte immédiate des politiques publiques.

La perte de son fils en 2020 a été le catalyseur de son combat.

"La mort de mon garçon a transformé mon engagement professionnel en mission personnelle. Elle a fait tomber toute neutralité et m’a donné l’urgence, l’autorité morale et la détermination pour exiger des normes réelles et une responsabilité publique," affirme Magor Dia.

Depuis ce drame, il consacre son temps au plaidoyer législatif, à la formation du personnel et à l’accompagnement des familles touchées, parlant désormais "au nom des enfants et des parents qui n’ont plus de voix".

La mort du bébé dans une crèche à Thiès n’est pour lui que la preuve amère qu’on n’a "pas suffisamment appris de 2020".

Il estime que reprendre la plume est devenu le moyen le plus efficace pour "mettre la pression politique et casser l’indifférence collective".

Magor Dia pointe du doigt trois failles majeures qui mettent la vie des enfants en danger.

L’absence de normes et de contrôles effectifs.

"Beaucoup de crèches fonctionnent sans encadrement obligatoire, sans inspections régulières ni prise en charge sanitaire adéquate", déplore-t-il.

Le manque de professionnalisation du personnel.

"Il y a une absence de parcours de formation certifié, de faibles qualifications, des salaires très bas, et aucune reconnaissance professionnelle pour garantir des pratiques sécuritaires", dénonce-t-il.

La responsabilité institutionnelle éclatée.

"Les responsabilités sont dispersées entre ministères, agences, directions, collectivités et acteurs privés, créant des zones d’impunité et empêchant une réponse rapide en cas d’incident", souligne-t-il.

Le rattachement à l’Éducation nationale

Pour Magor Dia, le rattachement exclusif de la petite enfance au ministère de l’Éducation nationale est une erreur fondamentale.

La petite enfance (0–3 ans), rappelle-t-il, ne relève pas seulement de l’éducation mais aussi de la santé pédiatrique, de la protection sociale, de la nutrition et de l’éveil.

"La confier exclusivement à l’Éducation nationale la réduit à des enjeux scolaires et ignore la dimension sanitaire, nutritionnelle et sociale fondamentale," explique-t-il.

Il préconise un pilotage intersectoriel dédié pour des politiques intégrées.

Le "décret oublié"

Magor Dia insiste sur l’importance cruciale d’un "décret oublié", texte d’application qui devait traduire la loi en règles concrètes.

Ce décret, selon lui, est vital car il devrait contenir les critères d’agrément, les ratios encadrement/enfants, les qualifications minimales du personnel, les protocoles sanitaires (gestion des urgences, hygiène alimentaire, médicaments), ainsi que les contrôles périodiques et sanctions.

"Sans lui, la loi reste une déclaration d’intention. Il définit ce qu’est une crèche sûre et permet aux autorités d’interdire, fermer ou sanctionner des structures dangereuses ou clandestines", attire-t-il l'attention.

L'absence de ce décret , pour lui, se traduit par des agréments non uniformes, un secteur informel, l’absence d’inspections systématiques, un personnel non qualifié et surtout, aucune sanction opérationnelle contre les établissements en infraction.

Des mesures immédiates

Pour éviter de nouveaux drames, le spécialiste appelle à :

- lancer des inspections d’urgence dans toutes les crèches et la publication des résultats.

- L’imposition temporaire de mesures minimales pour toute structure ouverte (fiches sanitaires, ratios maximum, personnel formé aux premiers secours).

- La création d’une cellule nationale de gestion des incidents petite enfance (signalement, enquête, communication) et d’un numéro vert pour les parents.

Afin de garantir que la petite enfance devienne une priorité nationale, il propose le rattachement de l’Agence nationale de la Petite Enfance et des crèches (ANPECTP) à la Présidence ou à la Primature.

Professionnaliser sans attendre

Dans un secteur fragilisé par des pratiques irrégulières et des ressources limitées, Magor Dia appelle à accélérer la mise en œuvre des décrets et des budgets, avec un pouvoir de décision et d’intervention plus rapide sur les structures défaillantes.

Il propose une solution pragmatique pour professionnaliser le personnel.

- Déploiement de formations courtes, certifiantes et modulaires (micro-certifications) accessibles localement.

- Instauration d’un cahier des charges graduel avec des exigences minimales immédiates et des plans de montée en compétences sur 12–24 mois.

- Utilisation d’incitations non monétaires : reconnaissance professionnelle, passeports de formation, accès à des mutuelles et plans de carrière clairs.

Message aux mères

Magor Dia conclut par un message fort aux personnes qui attaquent les mères ayant recours aux crèches.

Il rappelle que les structures d’accueil de qualité sont essentielles à l’épanouissement des tout-petits, notamment entre 0 et 3 ans, période où près de 90 % du développement du cerveau s’effectue.

"Plein de mamans font ce choix non par commodité, mais parce qu’elles veulent le meilleur pour leur enfant, tout en jonglant avec des réalités professionnelles, financières ou personnelles"

Il insiste.

"Ce ne sont pas les mères qui sont en cause. Ce sont les systèmes qui font défaut."

Pour lui, le véritable enjeu est de fournir des structures fiables, encadrées et accessibles, car "investir dans des crèches de qualité, c’est investir dans le développement, la réussite future et le bien-être de nos enfants."

Auteur: Sokhna Faty Isseu SAMB
Publié le: Vendredi 12 Décembre 2025

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