Cameroun : les derniers jours d’un règne immobile ? (Par Oumou Wane)
Le peuple retient son souffle. Le silence du pouvoir résonne plus fort que les cris de la rue.
Yaoundé s’endort dans l’attente. Les élections ont eu lieu, mais le pays reste suspendu entre deux vérités : celle issue des urnes, que la population prétend connaître, et celle émanant des institutions, que l'État persiste à différer. Au Cameroun, le 12 octobre 2025 pourrait bien entrer dans l’Histoire comme la date où un peuple, las d’être spectateur, a décidé de s’écrire lui-même.
Car cette fois, le scénario échappe au protocole.
Issa Tchiroma Bakary, ancien ministre du régime devenu son plus redoutable contradicteur, s’est proclamé vainqueur du scrutin. Pas par bravade, mais preuves à l’appui : des procès-verbaux affichés, photographiés, compilés, vérifiés. « Le peuple a choisi et ce choix doit être respecté », a-t-il déclaré, d’une voix calme mais sûre. Dans un pays où les victoires de l’opposition s’arrêtent souvent aux portes du Conseil constitutionnel, le geste a la force d’un séisme.
Face à lui, le vieux lion n’a pas rugi. À 92 ans, Paul Biya, l’homme qui règne depuis 43 ans, garde le mutisme d’un sphinx. Le président ne parle plus, il délègue ses silences. Son ministre de l’Administration territoriale, Paul Atanga Nji, veille à maintenir la fiction du calme, rappelant que seul le Conseil constitutionnel est habilité à « proclamer ». Mais ce mot, au Cameroun, a perdu de sa solennité. Il ne renvoie plus à la vérité, mais à sa mise en scène.
Pourtant, dans les rues de Garoua, de Douala, de Bafoussam, une autre dramaturgie s’écrit. On parle de transition, de refondation, de justice. Des voix longtemps tues se réveillent. Les jeunes, qu’on disait résignés, publient les résultats de leurs bureaux de vote sur les réseaux sociaux. Les enseignants, les fonctionnaires, même certains militaires, murmurent que « le pays doit respirer ».
La peur change de camp. Ce qui se joue désormais, ce n’est pas seulement la fin possible d’un mandat, mais celle d’une ère. Celle d’un pouvoir qui a confondu stabilité et stagnation, paix et apathie.
La communauté internationale, prudente, regarde. Paris ne dit rien, Washington s’inquiète, l’Union africaine consulte. Chacun sait que le Cameroun n’est pas un État anodin : c’est le verrou du golfe de Guinée, le point d’équilibre entre l’Afrique centrale et l’Ouest. Si le verrou saute, c’est toute une région qui tremble.
Mais au fond, la question n’est plus géopolitique. Elle est morale.
Combien de temps un peuple peut-il encore supporter d’attendre qu’on lui rende sa propre voix ?
Tchiroma appelle au calme. Biya se tait. Le Conseil constitutionnel compte. Le pays, lui, se compte aussi : dans ses rues, ses prières, ses colères rentrées. Le 26 octobre, la proclamation des résultats mettra peut-être fin à l’attente. Ou bien, elle l’éternisera.
En attendant, le Cameroun vit dans ce temps suspendu où tout peut basculer. Dans ce moment où les peuples cessent de courber l’échine et se redressent pour exister.
Le vent du changement souffle. Reste à savoir si le vieux baobab entendra le vent, ou s’il faudra qu’il tombe pour que le pays respire enfin.
Oumou Wane
Présidente Citizen Media Group/Africa7
Commentaires (7)
Ana Oumou Wone la chantre du neddeoisme ? Elle a complètement disparu SOS Oumou
Sûrement un cretin de pasteef vous êtes une malédictions pour ce pays
Hé bayilene diambur ! 😅😅
Toujoura content de lire ton article ma chere Oumou Wane. Quelle Belle Plume!
Bel article
Claire poétique narrative
Comme j'en ai pas lu depuis longtemps.
Merci Madame
Quoi qu'on dise,elle a une belle plume!
belle plume ? cette alcoolique, fumeuse de lops à ses heures perdues, se fait rare depuis que Macky a béou (fui).
Plus jamais un président Halpulo, baakh oul si keur, bakhoul si aleu
Très belle plume doublée d'une analyse pertinente.
Chapezu
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