Calendar icon
Saturday 04 October, 2025
Weather icon
á Dakar
Close icon
Se connecter

Déguerpissements : la brutalité du court terme face à l’intelligence du long terme (Par Cheikh Omar Sall)

Auteur: Cheikh Omar SALL

image

Déguerpissements : la brutalité du court terme face à l’intelligence du long terme (Par Cheikh Omar Sall)

Chaque nouvelle opération de déguerpissement est annoncée avec tambours et trompettes, comme une victoire éclatante de l’ordre public. En réalité, ce n’est qu’un théâtre tragique : des étals détruits, des familles plongées dans l’angoisse, des cris de détresse qui se perdent dans la poussière des bulldozers. Et après ? Rien ne change. Le problème se déplace, les marchands reviennent ailleurs, et la ville continue de suffoquer sous les mêmes désordres.

Car la vérité est simple : déguerpir sans plan, c’est échouer par avance.

Le coup de poing contre la raison

Un État fort ne se mesure pas à sa capacité à déployer des forces de l’ordre, mais à sa faculté d’anticiper, de planifier et d’accompagner. Les déguerpissements, dans leur forme actuelle, ne sont pas une politique : ce sont des réflexes. Ils traduisent l’impuissance à penser la ville autrement, l’incapacité à construire un futur inclusif pour ceux qui vivent du commerce de rue.

On arrache aux petits marchands leur gagne-pain sans leur offrir d’alternative. On les traite comme des intrus alors qu’ils sont des acteurs essentiels de l’économie urbaine. On croit régler un problème, mais on ne fait que nourrir la frustration, la colère et la défiance.

L’intelligence du dialogue et de la pédagogie

Il existe une autre voie, plus exigeante mais infiniment plus efficace : le dialogue et la pédagogie.

Avant toute opération, il faut parler aux concernés, leur expliquer pourquoi l’occupation anarchique de l’espace public freine la mobilité, menace la sécurité et abîme l’image de nos villes. Ce travail d’explication est une marque de respect, mais aussi un préalable indispensable à toute transformation durable.

Les campagnes de communication, qu’elles passent par les radios, les réseaux sociaux ou les associations de commerçants, doivent préparer le terrain. Car on ne change pas les habitudes par la force, mais par la conviction.

Offrir des alternatives dignes

Exiger sans proposer, c’est condamner. Il faut offrir des alternatives crédibles : des marchés modernes, organisés, accessibles, intégrés dans la planification urbaine.

Le Maroc nous montre la voie avec ses souks réaménagés, qui conservent l’âme du commerce traditionnel tout en lui donnant un cadre fonctionnel. Paris, dès le XIXe siècle, a su inventer les passages couverts et les galeries marchandes, transformant la rue en un espace de circulation harmonieuse entre commerce et urbanisme.

Pourquoi ne pas s’inspirer de ces modèles pour bâtir, à Dakar, à Thiès ou à Kaolack, des espaces commerciaux modernes et formels, qui libèrent l’espace public tout en offrant aux marchands un cadre digne et rentable ?

Pour une vision qui dépasse l’urgence

Il ne s’agit pas seulement d’aménager des marchés. Il s’agit de poser une vision :

• Planifier la ville en intégrant les acteurs du commerce informel.

• Accompagner la transition des marchands par des mécanismes sociaux et économiques adaptés.

• Transformer l’espace public en un lieu de circulation, de rencontre et de dynamisation économique.

Une telle approche demande du courage politique et de la constance. Mais elle seule peut briser le cycle des déguerpissements stériles.

La force de l’intelligence

Les bulldozers peuvent raser des étals, mais ils ne bâtissent pas une ville. Seule une vision réfléchie, inclusive et durable peut le faire. Chaque déguerpissement sans programme est une preuve de faiblesse politique déguisée en démonstration de force.

L’heure est venue de remplacer la brutalité du court terme par l’intelligence du long terme. De bâtir des « souks » modernes, des galeries marchandes sénégalaises , des espaces où l’ordre public et l’économie populaire cohabitent au lieu de s’affronter.

Ce n’est qu’à ce prix que nos villes respireront et que nos citoyens, tous nos citoyens, auront la certitude que la République les respecte.

Cheikh Omar SALL

Auteur: Cheikh Omar SALL
Publié le: Samedi 04 Octobre 2025

Commentaires (7)

  • image
    Joj il y a 3 heures

    Tout ca c’est parce qu’on se dirige vers les jo 2026. Apres les jo, l’anarchie va reprendre sur dakar

  • image
    L'après démolitions il y a 2 heures

    Maintenant Solutions Sociales Urgentes !

  • image
    Ghy il y a 3 heures

    Merci cheikh oumar pour ta proposition. Je pense que l'Etat a également fait une proposition, peut-être pas la meilleure mais une proposition quand même. C'est mieux que l'inertie. On essaie s'il y a erreur on corrige et on avance.
    Toutefois, il faut avoir le courage d'enlever ce qui n'est pas bon. Malheureusement, on est truffé de fumistes qui disent "daniou done dane sen doolé"; si chacun se donnait cette liberté personne n'avancerait.
    Que celui qui avait une cantine legale soit recasé dans les mêmes standards sinon meilleures, gni si nékou lone bou niou sonnal

  • image
    Un Passant il y a 3 heures

    Long terme jusqu'à quand??

  • image
    Rirebataas il y a 2 heures

    Mr. Vous savez bien nos villes ont été mal loties depuis les independances. Tout était occupé dans l'anarchie sans une vision futuriste. Attribution des terrains sous l'angle de la corruption.

  • image
    Vincent il y a 2 heures

    Les sall sont vraiment sale

  • image
    pauvre il y a 22 minutes

    Pour un sujet d'une telle importance , tu n'as pas trouvé mieux que d'insulter des personnes dont le dernier est plus important que pour toute ta lignée

  • image
    Anonyme il y a 2 heures

    Un raisonnement totalement biaisé et les propositions comme alternatives tout aussi inappropriée On ne doit pas empêcher et faire déguerpir une occupation illégale pour une autorisation à se recaser ailleurs. Ce n'est pas à l'État de chercher une alternative à cela. Mais aux intéressés eux-mêmes de chercher une issue à une situation illégale en conformité avec les lois .Il ne faut pas ignorer et sous estimer la capacité de l'homme à trouver chacun sa voie propre. Être libre, c'est être responsable. On a tendance à surévaluer et charger l'État à la fois comme régulateur et aussi œuvre de bienfaisance. Ce qui est illégal, il faut juste y mettre fion; Aux intéressés de se réinventer

  • image
    Un marcheur bousculé il y a 29 minutes

    Ils ont le courage de le faire. Ceux qui donnent aujourd'hui des leçons de morale sont les premiers à se plaindre de l'occupation anarchique.
    Nos villes sont sales, occupées illégalement et les piétons n'ont plus où poser le pied.
    Néanmoins je suis d'accord avec vous sur un point, il faut faire déguerpir les occupants illégaux des trottoirs et installer une surveillance régulière aux mêmes endroits.

Participer à la Discussion