Utilisation abusive des antibiotiques : 40 % des prescriptions médicales concernées au Sénégal
La résistance aux antimicrobiens (RAM) prend des proportions alarmantes au Sénégal, où près de 40 % des prescriptions médicales contiennent des antibiotiques, alerte l’infectiologue Dr Sadikh Badiane. Face à cette menace silencieuse mais dévastatrice, la Direction de la Qualité, de la Sécurité et de l’Hygiène hospitalière a organisé hier une journée de sensibilisation et de plaidoyer, mobilisant les acteurs de la santé humaine, animale et environnementale autour de l’approche One Health.
La RAM survient lorsqu’une bactérie évolue et devient résistante aux antibiotiques utilisés pour la traiter. Selon Dr Badiane, le comportement des populations constitue un facteur aggravant : prescriptions abusives, automédication, vente illicite et usage vétérinaire incontrôlé. « Au Sénégal, beaucoup de patients arrivent déjà à l’hôpital avec une résistance installée. À cela s’ajoute l’utilisation abusive des antibiotiques dans l’élevage », souligne-t-il.
Le contexte africain, caractérisé par un accès facile aux médicaments et la prolifération de faux produits, accentue encore le phénomène. Pour Mame Awa Ndoye, directrice de la Qualité, de la Sécurité et de l’Hygiène hospitalière, les conséquences sont lourdes : augmentation des infections difficiles à traiter, hausse des décès évitables et aggravation de la pression sur un système de santé déjà fragilisé. « Cette situation résulte de l’utilisation inappropriée et abusive des antibiotiques, de l’automédication et de la vente libre, mais aussi de leur usage non contrôlé dans la médecine vétérinaire et l’agriculture. Face à cette menace, notre mobilisation collective est plus que jamais nécessaire dans une approche One Health », insiste-t-elle.
Le secrétaire général du ministère de la Santé, Serigne Mbaye, rappelle que, selon l’OMS, la résistance antimicrobienne cause près de 5 millions de décès chaque année, dont 1,27 million directement liés à des infections résistantes. « Au Sénégal, comme ailleurs, nous constatons une augmentation inquiétante des cas d’infections résistantes, compromettant l’efficacité des traitements, allongeant la durée d’hospitalisation et augmentant la mortalité et les coûts liés aux soins », avertit-il.
Il appelle à une synergie d’actions : « La lutte contre la RAM n’est pas seulement l’affaire du ministère de la Santé. Elle exige l’engagement des professionnels de santé, du secteur vétérinaire, des pharmaciens, des laboratoires, des collectivités, mais aussi de chaque citoyen qui doit adopter un comportement responsable dans l’usage des médicaments. »
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