Calendar icon
Friday 07 November, 2025
Weather icon
á Dakar
Close icon
Se connecter

5 milliards versés au Trésor togolais : Abdoulaye Sylla ECOTRA et Sakiyoulahi Sow, l’achat de la banque SIAB qui vire à un procès

Auteur: Doudou DIOP

image

5 milliards versés au Trésor togolais : Abdoulaye Sylla ECOTRA et Sakiyoulahi Sow, l’achat de la banque SIAB qui vire à un procès

Le banquier d’affaires, Sakiyoulahi Sow, a été jugé ce 6 novembre devant le tribunal correctionnel de Dakar pour escroquerie portant sur 5 millions au préjudice du directeur général de la société ECOTRA SA, Abdoulaye Sylla. Le prévenu a comparu libre avec une valise remplie de documents pour contester les faits. La partie civile, qui n’a pas pris part au procès, a été représentée par son pool d’avocat.

Sur les faits

Selon l’ordonnance de non-lieu partiel et de renvoi en police correctionnelle rendue le 12 avril 2024 par la juge Mamadou Seck, chargé à l’époque du 2e cabinet près le tribunal de grande instance de Dakar hors classe de Dakar, Sakiyoulahi Sow est inculpé pour les délits d'abus de confiance et d'escroquerie.

Le 19 octobre 2022, Abdoulaye Sylla, directeur général d'ECOTRA SA, avait saisi le parquet de Dakar d'une plainte contre Sakiyoulahi Sow pour escroquerie et abus de confiance portant sur la somme de 5 000 000 000 F CFA. Dans sa plainte, il expliquait qu'à la suite d'une entrevue pour l'acquisition de la Société interafricaine de banque (SIAB), Sakiyoulahi Sow l'avait invité à venir participer au rachat des actions de l'établissement. Et à sa demande, il avait viré une somme de cinq milliards dans les livres du Trésor togolais, à la date du 17 juillet 2017. Mais ayant appris la résiliation du protocole d'accord par le gouvernement du Togo, il s'était rapproché du liquidateur de la SIAB en vue d'obtenir le remboursement des sommes virées.

À sa grande surprise, celui-ci l'avait opposé une fin de non-recevoir en lui faisant remarquer que les fonds appartiendraient à Sakiyoulahi Sow sous le couvert de sa société Siraj Financial Holding.

Poursuivant, il déclare être surpris d'apprendre que M. Sow avait créé cette société dont il lui avait dissimilé l'existence et qu'il s'était servi des sommes versées pour acheter 95 % des actions que détenait la Lybian Foreign Bank dans le capital de la SIAB.

Interpellé, Sakiyoulahi Sow a confirmé les déclarations du patron de l’ECOTRA sur l'existence du rachat des actions de la SIAB Togo. Toutefois, il a contesté les montants. Selon lui, sur les 5 milliards versés, 4,5 milliards représentaient le paiement de ses honoraires et que la participation d'ECOTRA s'élevait seulement à 500 000 000 F CFA.

Sakiyoulahi Sow de soutenir avoir aidé, en 2015, Abdoulaye Sylla à obtenir des financements dans le cadre du projet de développement du pôle urbain de Diamniadio et qu'en contrepartie, ce dernier devait lui payer des honoraires.

Interrogé sur les documents attestant l'existence de la supposée convention d'honoraire, M. Sow a dit n'avoir aucune preuve à part une lettre d'intention qu'il avait adressée en juin 2017 au DG d'ECOTRA.

Et sur les circonstances du rachat des actions de la SIAB, M. Sow a soutenu que compte tenu de la compétition avec d'éventuels acquéreurs, ils avaient versé à l'État togolais la somme de 6 952 490 000 F CFA afin d'écarter certains investisseurs libyens et sur ce montant, il s'était chargé lui-même de verser 1 952 490 000 F CFA. Il a souligné qu'une fois le virement effectué, il s'était déplacé à Lomé le 8 mars 2018 pour négocier et signer la convention avec le gouvernement togolais.

De plus, Abdoulaye Sylla était informé dans les moindres détails du projet et pour confirmer ses déclarations, il avait versé au débat les messages et mails qu'il échangeait avec ce dernier.

Par la suite, A. Sylla l'a informé de sa volonté de quitter le projet et a réclamé à cet effet le remboursement de ses fonds.

C’est dans ce contexte qu'il avait exigé à ce dernier le paiement de ses honoraires d'où le virement des 5 000 000 000 F CFA.

Confrontés, Sakiyoulahi Sow et Abdoulaye Sylla ont chacun maintenu leurs déclarations. Toutefois, Sylla a affirmé que contrairement aux affirmations de M. Sow, les 5 000 000 000 F CFA n'étaient pas destinés au paiement des honoraires, mais à l'achat des actions de la SIAB. À l'instruction, Abdoulaye Sylla a réitéré ses déclarations tenues à l'enquête préliminaire tout en faisant remarquer que Sakiyoulahi Sow, après son arrestation, avait sollicité une médiation pénale et qu'à cet effet, il reconnaissait la propriété exclusive d'ECOTRA SA sur les cinq milliards virés dans le compte du Trésor public togolais et prenait l'engagement de faire les diligences nécessaires pour permettre à ECOTRA SA de recouvrer cette somme. Malheureusement, il n'avait pas respecté son engagement.

Malick Ndiaye, directeur général de la Banque Agricole(ex-CNCAS), entendu en qualité de témoin, a déclaré avoir exécuté un ordre de virement de 5 000 000 000 F CFA à la demande d'ECOTRA en faveur de l'agence comptable du Trésor togolais.

Inculpé des faits d'abus de confiance et d'escroquerie, Sakiyoulahi Sow a contesté les faits. Lors de son interrogatoire au fond, il a maintenu ses déclarations tenues à l'enquête tout en versant au dossier un document intitulé « Mémoire sur le contentieux avec ECOTRA représenté par Monsieur Abdoulaye Sylla ».

Dans ce mémoire, il précise qu’Abdoulaye Sylla était bel et bien au courant de l'existence de la société Siraj Financial Holding et qu'il avait envoyé à celui-ci tous les documents relatifs à la société et que même ce dernier avait effectué le virement de 5 milliards avec les références de la société. Il a souligné aussi être victime dans cette affaire, puisqu'il avait investi 1,9 milliard F CFA au nom de Siraj Financial Holding, payé des consultants et avocats sur fonds propres.

Sur le non-lieu partiel

D’après le juge d’instruction, il résulte de l'article 383 du Code pénal que quiconque ayant reçu des propriétaires, possesseurs ou détenteurs, des biens, au titre des contrats de louage, dépôt, mandat, prêt à usage, travail salarié ou non nantissement, omet de respecter son engagement de les rendre ou représenter ou d'en faire l'emploi ou l'usage convenu, se rend coupable d'abus de confiance.

Le magistrat de préciser que l'abus de confiance suppose, pour sa réalisation, une remise préalable qui s'effectue sur la base d'un des contrats visés à l'article 383 et la dissipation du bien en dépit d'une mise en demeure.

En l’espèce, il ne ressort pas du dossier qu'Abdoulaye Sylla a remis de l'argent à Sakiyoulahi Sow, que ce dernier n'a jamais reçu les sommes d'argent évoqués. Cependant, il est vrai que c'était sur sa demande que M. Sylla a effectué un virement de 5 milliards dans les livres du Trésor togolais.

Par ailleurs, le magistrat a relevé que ce virement n'avait pas pour effet de créer une relation contractuelle entre Sylla et Sow, mais devait seulement permettre à ECOTRA de racheter les actions de la SIAB. Qu'en plus, il n'est pas discuté que l'annulation de l'opération de rachat ne dépend pas de la volonté de Sakiyoulahi Sow, puisqu'Abdoulaye Sylla a reconnu lui-même que c'est le gouvernent togolais qui a résilié le protocole d'accord de rachat.

D’ailleurs, lorsque M. Sylla a constaté la résiliation, il s'est adressé directement au liquidateur de la SIAB pour réclamer le remboursement de son argent.

Toutefois, il importe de relever qu'en l'espèce, la remise n'est pas volontaire, elle a été provoquée. Parce que Sakiyoulahi Sow a fait croire à M. Sylla que s'il versait les 5 milliards demandés, il allait devenir actionnaire de la SIAB. Alors qu'en réalité, c'est lui-même qui devait bénéficier de ce virement à travers sa société Siraj Financial Holding.

Ainsi, en l'absence d'une remise préalable effectuée sur la base d'un contrat entre Abdoulaye Sylla et Sakiyoulahi Sow, de la preuve d'un détournement et d'une obligation précise pesant sur le second nommé, les faits de l'espèce ne sauraient être constitutifs du chef d'abus de confiance. Qu'il échet en conséquence dire n'y avoir lieu à suivre davantage contre Sakiyoulahi Sow pour les faits d'abus de confiance.

Sur le renvoi

Évoquant les dispositions de l'article 379 du Code pénal, le juge Seck estime qu’il est constant comme résultant de la procédure, que Sakiyoulahi Sow a invité Abdoulaye Sylla à venir participer à l'opération de rachat des actions de la banque togolaise dénommée Société interafricaine de banque (SIAB). Qu'il lui a demandé d'effectuer un virement sur le compte du Trésor public togolais en lui faisant croire qu'une fois que le virement sera effectif, il pourrait bénéficier des actions de SIAB. Alors qu'en réalité, c'est sa société dénommée Siraj Financial Holding qui devait bénéficier de l'opération de rachat. Abdoulaye Sylla a versé les fonds en faveur du gouvernent togolais. Le motif du virement n'a jamais été une question de paiement d'honoraires.

Toutefois, l'argument de Sakiyoulahi Sow consistant à dire que les 5 milliards F CFA étaient destinés au paiement de ses honoraires ne peut résister aux éléments objectifs du dossier, puisqu’il a admis avoir invité M. Sylla à venir participer à l'opération de rachat des actions.

Le juge d’ajouter qu'il ne ressort nulle part du dossier un document qui atteste de l'existence d'une convention d'honoraires entre lui et la partie civile. D’ailleurs, même M. Sow est dans l'impossibilité d'en apporter la preuve à part une lettre d'intention qui, en réalité, est insuffisante pour prouver l'existence d'une relation contractuelle. Pour le magistrat, Sakiyoulahi ne peut en aucune manière se ranger derrière cette convention d'honoraires pour masquer sa mauvaise foi. Car il sait pertinemment que c'est le rachat des actions qui a motivé le virement et pas le contraire.

De plus, il ressort du protocole d'accord de médiation en date du 22 décembre 2022, signé entre les avocats des parties, que Sakiyoulahi Sow a reconnu le droit de propriété exclusif d’Abdoulaye Sylla sur les 5 milliards F CFA versés au Trésor public togolais.

Pour le juge d’instruction, l'attitude de Sakiyoulahi Sow consistant à inviter Abdoulaye Sylla à venir participer au rachat des actions, en lui demandant de virer de l'argent sur le compte du Trésor public togolais tout en lui faisant croire qu'il sera actionnaire et en lui présentant des documents y afférents, est constitutif de manœuvres frauduleuses qui, incontestablement, ont déterminé la remise.

Suffisant pour que je juge déclare que Sakiyoulahi Sow a réuni à son encontre tous les éléments constitutifs de l'escroquerie.

Sakiyoulahi conteste le protocole d’accord et parle de note d’honoraires

À la barre, Sakiyoulahi Sow s’est présenté comme un banquier d’affaires. Il a contesté le délit d’escroquerie, brandissant des piles de documents. Il soutient qu'Abdoulaye Sylla ECOTRA lui devait des honoraires à hauteur de 4,5 milliards F CFA. Il a soutenu avoir accompagné ECOTRA sur le projet de Diameniadio où Abdoulaye Sylla a reçu 21 milliards F CFA. Sakiyoulahi Sow a aussi souligné qu’il a fait déposer une caution de 143 millions F CFA. Le prévenu a foulé aux pieds le protocole que ses conseils avaient signé avec ceux de la partie civile.

Maitres Seny Dione, Demba Cire Bathily, Baboucar Cissé et Clédor Ly, pour le compte d’Abdoulaye Sylla, estiment que le prévenu est coupable des faits. Pour Me Bathily, le prévenu est un employé de banque qui fait du trafic d’influence. Ils ont réclamé la somme de 10 milliards F CFA à titre dommages et intérêts.

Pour ses réquisitions, le procureur de la République s’est rapporté à la sagesse du tribunal.

La défense, assurée par Maitres Ndoumbé Wane, Sayba Danfakha, Omar Tandian, Moussa Sarr et Mbaye Dieng, a sollicité la relaxe pure et simple.

Délibéré le 4 décembre 2025.

Auteur: Doudou DIOP
Publié le: Jeudi 06 Novembre 2025

Commentaires (5)

  • image
    Lucide! il y a 6 heures

    Mr. Sow bayil seu khel bi nguey foweh. Un pays où l’on dorr marteau toute la journée. Allez travailler.

  • image
    Mom il y a 6 heures

    Je n'ai pas eu la patience de tout lire

  • image
    Focus il y a 6 heures

    Trop long.
    Les 5 milliards de FCFA ne sont pas des commissions. L'objet du virement était bel et bien l'achat des actions de la SIAB.
    Sakiyoulahi Sow a escroqué Abdoulaye SYLLA.
    Le premier doit restituer au second 5 milliards de FCFA plus les dommages et intérêts.

  • image
    Trop long il y a 6 heures

    En résumé Mr Sow a berné Mr Sylla.

  • image
    Aissatou il y a 5 heures

    Ce Mr sow est un est arnaqueur intouchable.Il a trop de dossier en justice.affaire locafriqud,affaird dora gaye.C'est comme un Mohamed Niang.Non seulement il n'est pas serieux mais il est capable de tout pour ses propres intérets

Participer à la Discussion