Effets néfastes de la pression fiscale : Pourquoi il faut enlever la taxe sur le mobile money...
Au Sénégal, la pression fiscale a grimpé ces dernières années, passant de 19 % à 23 % du PIB. Si cette progression traduit l’ambition du gouvernement d’accroître les ressources internes, elle révèle aussi une réalité plus dure : celle d’un alourdissement de la charge fiscale sur les ménages et les petites entreprises, au détriment de l’inclusion financière et de la vitalité économique. Parmi les mesures les plus controversées, la taxe sur la monnaie électronique illustre les limites de cette stratégie de mobilisation des recettes, du moins selon la docteure Marième Niana Thiam, enseignante-chercheuse à l'université et senior coordonnateur programme à IBP Sénégal.
Dans le cadre d’une formation sur les techniques de lecture et d’analyse budgétaire avec les journalistes, elle a expliqué que cette taxe est introduite sous prétexte de renforcer les recettes de l’État. Elle ajoute que « la taxe de 0,5 % sur les transactions de mobile money touche directement les citoyens les plus modestes. Or, ce sont précisément eux qui utilisent ces services pour transférer de petites sommes à leurs proches, payer des factures ou soutenir des activités économiques informelles ».
Autrement dit, « l’impôt pèse plus sur les couches populaires que sur les grandes entreprises, alors qu’il devait initialement financer des programmes de développement. Ce déséquilibre alimente un sentiment d’injustice fiscale et fragilise la confiance entre citoyens et institutions », souligne la Dre Thiam.
Depuis une décennie, le Sénégal s’est imposé comme un modèle d’innovation financière en Afrique de l’Ouest, grâce à l’essor fulgurant des services de paiement mobile comme Orange Money, Wave ou Free Money. Ces plateformes ont permis à des millions de Sénégalais d’accéder à des services financiers sans passer par les banques traditionnelles.
« Mais la taxation des transactions électroniques risque de casser cette dynamique. En augmentant le coût des transferts, elle décourage leur utilisation, pousse certains utilisateurs à revenir au cash et freine ainsi la dématérialisation des paiements, pourtant essentielle à la modernisation de l’économie », dit-elle.
Supprimer la taxe, restaurer la confiance
Les effets néfastes ne s’arrêtent pas là. À l’en croire, une baisse de l’activité sur la mobile money pourrait se traduire par une réduction du chiffre d’affaires des opérateurs de services financiers, donc des pertes d’emplois dans le secteur numérique, une diminution des recettes fiscales indirectes, puisque ces entreprises s’acquittent déjà d’impôts sur leurs revenus et, plus largement, une baisse de la productivité économique dans les zones rurales et périurbaines, où la mobile money constitue souvent le seul moyen d’échange fiable.
Ainsi, « une taxe conçue pour rapporter quelques milliards pourrait, à terme, coûter bien plus à l’économie nationale qu’elle ne rapporte à court terme. « L’augmentation de la pression fiscale ne serait pas problématique, si elle reposait sur un élargissement de l’assiette fiscale, c’est-à-dire sur l’intégration de nouveaux acteurs économiques, notamment du secteur informel. Mais dans le cas actuel, l’État choisit de faire contribuer plus ceux qui payent déjà, plutôt que d’aller chercher ceux qui échappent à l’impôt. Ce modèle crée un cercle vicieux : les contribuables se sentent pénalisés, la consommation ralentit et la croissance s’affaiblit. Ce qui, in fine, réduit la base fiscale elle-même ».
Il faut noter qu’enlever la taxe sur la monnaie électronique ne signifie pas renoncer à la mobilisation des ressources internes. C'est, au contraire, choisir une fiscalité plus juste, plus intelligente et plus inclusive. Le gouvernement pourrait compenser cette suppression en renforçant la lutte contre la fraude fiscale et la sous-déclaration dans les grandes entreprises, en modernisant la collecte de l’impôt local grâce au numérique et en stimulant la formalisation progressive du secteur informel. La fiscalité n’est pas seulement une affaire de recettes, c’est aussi une question de justice sociale et de cohésion nationale.
Commentaires (14)
On est exigeant envers le gouvernement; on veut la baisse des denrées, du prix de l'électricité, du carburant;
on demande de l'emploi et une augmentation des salaires; des soins et un enseignement de qualité;
Mais personne ne veut payer l'impôt
On croit certainement que le gouvernement fait du "LOUXOUSS XALISS"
On ne peut pas faire d'omelette sans casser des œufs.
Oui, la pression fiscale s'est accentuée (à cause des gestions catastrophiques des régimes précédents), mais cet effort s'inscrit dans une stratégie plus large : affranchir notre économie de la tutelle du FMI et préserver notre souveraineté économique.
Certaines mesures auraient pu être plus douloureuses : les denrées essentielles (riz, sucre, huile, etc.), le carburant et l’électricité ont été préservés, contrairement aux demandes du FMI qui exigeait la fin des subventions.
La vraie question est donc la suivante :
👉 Faut-il obéir au FMI, ou assumer des efforts CONSTANTS pour garantir notre indépendance et nos choix économiques ou provoquer une flambée des prix ?
C'est BIEN! C'est ma conception du Développement.
Il a fallu que Wave soit sur le marché pour que ces frais soient fortement revus à la baisse.
Ici il s agit de cotisations pour son pays pas le capitaliste étranger
Autrement dit, faudrait-il vraiment favoriser une flambée des prix ? Le FMI est connu pour ses méthodes drastiques, qui n’ont jamais permis à un pays de se développer durablement.
Le Sénégal mène pourtant des réformes structurelles majeures : mobilisation accrue des recettes internes, meilleure gouvernance des entreprises publiques, gestion rigoureuse des finances et digitalisation progressive pour plus de transparence.
Le secteur secondaire en plein essor, mise en place d’une stratégie d’industrialisation souveraine progressive, etc.
Un tel modèle de bonne gouvernance devrait être encouragé par le FMI, afin de servir d’exemple aux nations minées par la corruption et la mauvaise gestion. Mais il faut reconnaître que le lobby derrière le FMI est d’une puissance redoutable, souvent déterminé à défendre ses propres intérêts.
Rappelons que des pays comme la Malaisie, lors de la crise asiatique de 1997, ou encore l’Équateur, ont refusé d’appliquer les programmes du FMI, et s’en sont pourtant relativement bien sortis.
Il est donc légitime de s’interroger : cette pression constante, orchestrée par certains lobbys occidentaux, ne vise-t-elle pas à maintenir le contrôle sur les ressources des pays en développement ?
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