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Le Sénégal peut-il se passer du FMI ?

Auteur: Lena THIOUNE

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Le Sénégal peut-il se passer du FMI ?

Alors que le Premier ministre Ousmane Sonko affirme vouloir renforcer l’autonomie financière du pays, le Sénégal poursuit simultanément ses négociations avec le Fonds monétaire international. Lors d’une récente mission du FMI à Dakar, l’exécution budgétaire et la transparence des finances publiques ont été au cœur des discussions. Le discours d’Ousmane Sonko, affirmant que « le Sénégal n’a pas besoin du FMI », traduit une volonté de souveraineté économique. L’économiste Mor Gassama précise que « le gouvernement peut se passer du FMI pour fonctionner au quotidien, mais disposer de ce partenaire permet de bénéficier de taux d’intérêt plus bas et d’une crédibilité renforcée auprès des autres bailleurs ».

Pour lui, le FMI n’est pas le moteur économique du pays, mais un accompagnateur technique et financier. « Ce qui développe le Sénégal, c’est le Sénégal lui-même. Le FMI est là pour accompagner, pas pour conduire » dit-il avant d’ajouter que « les décaissements du FMI ne sont pas indispensables pour que le Sénégal continue à fonctionner ». Il rappelle que l’État a déjà mobilisé plus de 10 200 milliards de francs CFA sans attendre les fonds du FMI. « Ce financement reste cependant une bouffée d’oxygène et surtout un label qui rassure les investisseurs », précise-t-il.

Depuis l’arrivée des nouvelles autorités, le Sénégal a renégocié son programme avec le FMI pour l’aligner sur ses priorités nationales, notamment le plan Sénégal 2050. Des audits ont été lancés pour clarifier la situation de la dette cachée et rétablir la confiance avec les partenaires techniques et financiers. « Il y a désormais un changement de paradigme », observe Mor Gassama. « Le FMI n’est plus un dictateur, mais un partenaire respecté, et son expertise peut contribuer à la bonne gestion des finances publiques. »

Entre souveraineté proclamée et dépendance stratégique, le pays cherche un équilibre délicat pour assurer sa stabilité économique tout en préservant sa crédibilité auprès des investisseurs internationaux. Cette posture rappelle celle du président ghanéen Nana Akufo-Addo qui, en 2017, avait affirmé vouloir rompre avec l’institution de Breton Woods. Mais face à l’aggravation de la dette et à une inflation galopante, Accra a dû retourner vers l’institution en 2022 pour un plan de sauvetage de 3 milliards de dollars. Mor Gassama met en garde et affirme que cette « expérience du Ghana montre que l’autonomie proclamée est difficile à tenir si elle n’est pas soutenue par des réformes structurelles solides ».

 

Vers une souveraineté à long terme ?

À court terme, le Sénégal reste dépendant du label et de l’expertise du FMI. Mais à moyen terme, l’enseignant chercheur souligne que « la meilleure mobilisation des recettes fiscales, la diversification de l’économie et une discipline budgétaire renforcée pourraient permettre au pays de réduire sa dépendance aux financements extérieurs ».

Le plan de redressement adopté par le gouvernement de Sonko mise sur une mobilisation accrue des ressources internes : 90 % du financement des dépenses publiques doit désormais provenir des recettes nationales. L’objectif est de ramener le déficit public à 3 % du PIB et de réduire progressivement le poids de la dette. Mais le chemin vers une autonomie réelle reste semé d’embûches. « Pour atteindre une souveraineté économique durable, il faudra diversifier l’économie, élargir l’assiette fiscale et renforcer la discipline budgétaire », explique Gassama.

En attendant, le FMI reste un partenaire stratégique. « Le pays peut fonctionner sans le Fonds, mais il est préférable de l’avoir à ses côtés », résume l’économiste.

Auteur: Lena THIOUNE

Commentaires (1)

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    khalatt il y a 7 heures

    Bel et mesuré article.

    Il faut cependant faire attention car en matière de dette le stock peut peser sur les flux futurs.
    Dire "mobilisé plus de 10 200 milliards de francs CFA", cela veut dire qu'on a déjà beaucoup puisé sur le "possible" (plus de 120% de dette/ PIB) et à partir d'un certain moment, le défaut et d'autres problèmes surgissent.

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