Des promoteurs russes veulent implanter à Joal une usine de transformation des produits de la pêche. Pour les acteurs du secteur, cette unité risque de leur ôter le pain de la bouche, et ils entendent s’y opposer avec force.
Après les navires russes qui pêchent de manière illégale dans les eaux sénégalaises et qui ont fini de mettre à genoux le secteur de la pêche, c’est au tour des usines de transformation des produits halieutiques russes de leur emboîter le pas. Mais les acteurs qui s’activent dans la transformation des produits halieutiques ne comptent pas céder un pouce de terrain et n’entendent pas accepter l’implantation de ces usines dans leur commune. C’est pourquoi, suite à une autorisation d’installation d’une usine russe de transformation de farine de poisson et de congélation de produits de mer, ils ont organisé hier une marche de protestation à Joal. A en croire les manifestants, cette usine va générer 170 emplois et a une capacité de production de 46 tonnes de farine de poisson par jour, soit 460 tonnes de poisson frais. Ce qui est considéré par ces acteurs comme de nature à faire disparaître la transformation artisanale des produits de la mer à Joal.
Marianne Tening Ndiaye, présidente des femmes transformatrices du Gie interprofessionnel de la pêche de la commune de Joal Fadiouth, a déclaré : «Cela est inacceptable si l’on sait que la production journalière de Joal n’atteint plus 200 tonnes depuis 2010. Cette usine va utiliser tout le poisson débarqué à Joal plus le débarquement des autres quais de pêche. Mieux, cette usine qui va s’implanter ici promet de payer le casier de poisson au-delà de 3 000 francs Cfa, alors que depuis 5 ans le casier de poisson varie entre 5 000 et 7 000 francs Cfa. Mais ce qui nous étonne le plus, c’est que malgré le coût élevé du casier de poisson, qui coûte le double de son pouvoir d’achat, cette usine compte s’implanter.»
Aujourd’hui, ces acteurs ont peur de l’implantation de cette usine qui va accaparer tout le poisson de Joal et environs. «Ce serait la fin de la transformation artisanale du poisson à Joal et sur la Petite Côte, la fin du mareyage. Cette usine ne doit s’implanter dans aucune collectivité locale du Sénégal», a martelé Mme Ndiaye.
Ces transformateurs craignent que cette usine ne mette au chômage les 4 000 personnes qui évoluent dans ce secteur : «Ici à Joal, plusieurs personnes vivent de cette transformation. Des Guinéens, des Burkinabè, des Ivoiriens, des charretiers, des usines de glace, et même des taxis ‘’clandos’’, pour ne citer que ceux-là. Mieux, pendant que cette usine utilise le poisson que nous consommons, les Russes le destinent aux animaux», indique Ibrahima Sall, membre du Comité d’organisation de cette manifestation. Il a poursuivi : «Cela est une insulte. Est-ce que 170 emplois valent cette crise ? Est-ce que 170 emplois seulement peuvent être échangés contre la misère de 4 000 foyers ? Est-ce que 170 emplois seulement doivent priver les populations de Joal, de Thiès et de Touba, du fameux poisson ?», s’est interrogé M. Sall.
Ces acteurs interpellent le président de la République qui, lors de son discours de Kayar, avait promis de lutter de manière ferme contre les bateaux et usines russes qui veulent piller la ressource.
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