Le Sénégal fait face à des difficultés financières, avec une dette estimée entre 76 et plus de 80 % du PIB en fonction des estimations. Le déficit budgétaire se situe entre 7,6 et plus de 10 %, selon qu’on se fie aux chiffres de Macky Sall ou ceux du Premier ministre Ousmane Sonko.
Mais au-delà de la guerre des chiffres, il y a une constance : la passe actuelle est difficile pour le Sénégal sur le plan financier, avec une marge budgétaire presque nulle.
Pour dépasser cette situation et redresser les finances publiques, l’économiste international Magaye Gaye propose de se tourner vers les multinationales qui font des chiffres d’affaires et bénéfices insolents. Magaye propose de les mettre à contribution dans le cadre d’un effort national exceptionnel. Il suggère ainsi ‘’une taxe supplémentaire de 1 % sur le chiffre d'affaires’’ et le ‘’relèvement temporaire de l'impôt sur les bénéfices à 35, voire 40 %, contre 30 % actuellement’’. Le tout pour une durée de deux ans.
Les cibles de l’ancien cadre de la Boad sont « les grands groupes installés au Sénégal, évoluant dans des secteurs de rente tels que la banque, les télécommunications, l'industrie pharmaceutique, la minoterie, la cimenterie et l'assurance. Les entreprises détentrices de concessions au port et dans les aéroports, les mines et hydrocarbures ainsi que les sociétés gestionnaires d'autoroutes, de dépôts d'hydrocarbures, les entreprises actives dans la logistique, le tabac, les jeux, etc. ».
À titre illustratif, La Sonatel a réalisé un chiffre d’affaires de 1 620,7 milliards F CFA pour un bénéfice de 331,7 milliards en 2023. En guise de comparaison, le Sénégal projette des recettes internes de l’ordre de 4 390 milliards en 2024. Autrement dit, ce chiffre d’affaires de la Sonatel (sur quatre pays) fait plus du tiers des recettes internes de notre pays.
Magaye Gaye se demande s’il est ‘’admissible, voire tolérable’’ que ces entreprises affichent des chiffres d’affaires hors normes dans un contexte de lutte contre la pauvreté. Pour lui, « ces gros profits annoncés révèlent des dysfonctionnements dans la manière dont l'économie nationale, sous-régionale et mondiale est dirigée par le capitalisme ». Il pense notamment à la matière première, aux consommations intermédiaires qui, à ses yeux, ne sont pas bien rémunérées, sans compter les salaires, les impôts et les taxes pas suffisants au regard des dividendes.
Pour introduire cette surtaxe sur deux ans, Magaye Gaye invite l'État à engager le dialogue avec les entreprises concernées. Il pense que c’est d’autant plus possible que Poutine l’a fait en Russie en 2022 et qu’en France, il est prévu de demander à ces géants un effort de 8 milliards d’euros en 2025 contre 4 milliards en 2026.
« À moyen terme, il sera nécessaire de mener des réflexions opportunes en vue d'introduire une discrimination fiscale. L'objectif est d'établir au moins trois taux d'imposition, à savoir pour les grandes entreprises, les petites et moyennes entreprises, et pour le secteur informel ».
L’économiste pense que ces mesures ne devraient pas déboucher sur une délocalisation et ne seraient pas non plus un frein à l’investissement, d’autant plus que la mesure exceptionnelle dure deux ans. Il s’y ajoute que le Sénégal a l’avantage de la stabilité dans le contexte sous-régional, sans compter le début d’exploitation du pétrole et du gaz.
Cependant, estime-t-il, le mieux est de débattre de la contribution de ces grandes entreprises dans le cadre régional de l’Uemoa.
Autres niches supplémentaires, l’audit des subventions, notamment sur les importations, l’audit de la Senelec et un plaidoyer communautaire en faveur de la restructuration de la dette du Sénégal.
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