La dette cachée et conséquences : Abdoulaye Fall, Professeur de macroéconomie à l'Université de New York livre son analyse
Le Sénégal traverse une situation délicate, avec une dette qui culmine à 132% du Pib. Samedi, le premier ministre Ousmane Sonko avait même révélé, lors de son meeting, que dans leurs discussions avec le Fonds monétaire international (Fmi), il leur est proposé une restructuration de la dette colossale du pays. Une situation qui interpelle beaucoup de spécialistes.
Professeur de macroéconomie et de finances publiques à l'Université de New York, Abdoulaye Ndiaye s’est penché sur la question. Dans sa tribune parcourue par Seneweb, il explique que «la révélation de dettes cachées après des transitions politiques, est courante». Mais, pour le cas Sénégalais, c’est l’ampleur qui interpelle. «Ce qui est atypique ici, c’est l’ampleur et le fait que cela ait gonflé sous programme FMI, ce qui interroge la crédibilité du dispositif de suivi», souligne-t-il.
Pour étayer ses propos, l’enseignant révèle que sur 140 pays émergents et en développement, de 1973 à 2023, les dettes cachées révélées représentent en moyenne 1% du PIB (160M$). Donc, celle du Sénégal se distingue par son ordre de grandeur, avec 11 Milliards de dollars. Et cette situation n’est, évidemment, pas sans conséquences. Elle pourrait même mettre du temps à être résolue, signale le Professeur Ndiaye.
Des années difficiles à venir
«Même avec un nouveau programme FMI, il est probable que l’économie traverse 5 à 10 années difficiles, hors revenus hydrocarbures. Raison simple : corriger un déséquilibre dette/PIB > 50% exige des excédents commerciaux durables. À 3% (via compression de l’investissement), c’est déjà ardu ; même à 5%, 50/5 = 10 ans. Le recouvrement des montants que la Cour des comptes indique comme ayant été "transférés" à des "services non personnalisés de l’État" entre autres, fait partie des options à envisager», indique-t-il.
La restructuration de la dette
Par ailleurs, l’enseignant n’a pas caché ses inquiétudes. Ce, notamment sur la manière d’aborder la restructuration de cette dette. «Mon inquiétude est qu’en privilégiant d’abord l’austérité sans restructuration, on finit (après échec) par commettre la grave erreur de commencer une restructuration par la dette domestique. Comme au Ghana, la tentation peut être forte (réduire le risque de frictions avec les créanciers externes), et la pression régionale Uemoa (ainsi que du Fmi) irait dans ce sens. C’est dangereux car cela touche directement les banques locales et régionales et peut créer un risque systémique», signale-t-il.
En évoquant l’impact sous régional de cette situation sénégalaise, M. Ndiaye souligne que les tensions de liquidité bancaires dans la zone sont liées à la dette cachée du Sénégal. Et pour en circonscrire les conséquences, il a formulé des suggestions à la banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Bceao).
Recommandations
«Si j’étais la Bceao, j’avancerais sur deux fronts. La première, c’est de cartographier l’exposition financière régionale au risque sénégalais, lancer un stress test coordonné des banques et des assureurs sur la dette domestique du Sénégal, pour détecter tôt les points de fragilité, évaluer le coût d’un éventuel plan de soutien», conseille-t-il.
L’autre front à engager, explique le Professeur Abdoulaye Ndiaye, c’est de préserver les réserves pour éviter la contagion. En effet, il recommande de «faire des réserves internationales un objectif central», puis d’étudier dès maintenant une transition encadrée d’un régime de change fixe vers un régime plus flexible (ce qui aiderait l’ajustement budgétaire en diluant la dépense en monnaie locale).
Il recommande aussi d’envisager des mesures temporaires de gestion des flux de capitaux pour limiter les sorties. L’objectif n’est pas de défendre le taux de change fixe vis-à-vis de l’euro à tout prix dit-il, «mais de préserver la stabilité du système financier et contenir la contagion sans brûler les réserves».
Commentaires (26)
La chance de ces pays, cest qu'ils sont europeens, dependent de la BCE. Ca sauve. Et nous, allons-nous seulement nous en sortir ? En cas de nouvelles vagues de selloff sur notre dette en dollars, d’ici deux semaines à un mois, nous plongerons simplement dans une crise de liquidité, voire un défaut souverain. Et là, ce ne sera plus ni Sonko ni Diomaye qui decide, mais les vautours.
L’urgence est là, palpable. Et pourtant, notre pays s’enlise dans des querelles dérisoires, Sonko qui insulte les juges alors que le probleme c'est peut-etre nos lois et puis, ces sempiternelles Mimi Touré Niak Diom/Abdourahmane Diouf, Monsieur Intrigues contre Aïda Mbodj Yayou Niak Diam, qui tous auraient dû etre tenue loin des affaires de l'Etat. Ils viennent dans une "famille" et y sement la discorde et le chaos. On joue avec le feu, et ce feu n’attendra pas que la politique retrouve son sérieux.
Au passage dites moi où sont les " 600 milliards de dollars des Turcs" que Sonko nous avait promis ! Cela devrait suffire pour régler tout les problèmes ! Du coup moi le gars j'ai l'impression qu'il prend tout les Sénégalais comme des cons !
Il paraît qu'un homme qui joue au plus malin, chaque jour qu'il se réveille il se demande d'abord où sont les cons et les naïfs!
Sans ses déclarations lors du meeting du 8, nous n’aurions sans doute pas connu le sell-off de lundi dernier.
Mais si le pays en est arrivé là, la responsabilité première incombe à Macky Sall, et à lui seul. Sans surfacturation, on n'aurait pas eu besoin de tant depenser. Il mérite la prison.
s il faut s en prendre a quelqu un c est avant tout aux coupables, surtout ceux d entre eux qui en ont détourné une partie.
après c est un sujet sensible certes, mais Sonko n a dit rien que les marchés ne savent ou ne prevoient pas deja
1-dettes cachées à qui ? au FMI et certainement pas aux sénégalais qui n'ont jamais cherché à comprendre combien on doit et à qui on doit
2- Pourquoi n'avoir pas tout déclaré surtout les engagements par signature et la dette des 23 sociétés publiques et parapubliques ( cachées) au représentant des bailleurs le FMI ? parce que cela allait augmenter les taux d'intérêt à payer
3- "cachées " ne signifie pas volé ou détourné
4-Pourquoi PROS l'a dit alors ? Parce qu'il fait de la politique et c'est légitime pour gagner les législatives c'est comme le compte de 1000 milliards qui n'existe que dans sa tête.
Voilà la vérité passons à autre chose, il se fait tard et les enfants attendent le dîner
Un autre constat que je voulais faire est la croissance de l'economie senegalaise hors exploitation des hydrocarbures est tres faible alors que ce taux avoisinait au moins 6% sans cette exploitation. Il faut quand meme noter le caractere degressif des amortissements des societes qui exploitent le gaz et le petrole qui fait les futurs gains de ces gains ou revenus tires vont augmenter avec le temps. Donc il existe un potentiel enorme pour propulser l'economie du Senegal vers une croissance a deux chiffres.
Ce qu j'ai du mal a comprendre est la strategie du gouvernement pour tacler la dette a la place des denonciations ( soit c'est le FMI, l'ancien gouvernement, la France, des contracts mal negocies....etc que sais-je encore). Pourquoi ce gouvernement a formule une demande d'un nouveau programe? Pourquoi ce gouvernement a prefere emprunter a des taux beaucoup plus eleves? Pourquoi il tarde a implimanter un PRES? Tout cela a une cout (time is money!).
Mets-toi à la place des créanciers : tu veux prêter de l’argent, mais tu ignores le vrai montant de la dette de celui à qui tu prêtes. C’est ça, la dette cachée. Un emprunteur qui cache sa vraie situation financière prend le prêteur au dépourvu et l'expose à un risque qu’il ne peut pas évaluer, alors qu'il engage l'argent de sa banque ou meme de son pays.Il en resulte en plus un manque a gagner car le taux d'interet n'aurait pas dû etre le meme.
Par contre le veritable risque est d'ordre geopolitique avec comme corrollaire l'instabilite au niveau des institutions dans la sous region. Prenons comme exemple le Mali qui est confronte aux Djihadiste. C'est un gros client du Senegal. Donc les importations du pays peuvent etre affectees.
Fini pour moi le plaisir de lire ou d'écouter un cours sur la monnaie, la macro ou micro économique, de relire les théories Keynésiennes, neo- classiques capitalistes, les bonnes vieilles critiques pertinentes d'antan sur le FMI, Banque Mondiale qui asphyxiaient les économies et populations du tiers monde etc ... Présentement les plus grands économistes du Pays ce sont les goorgulus qui en résilience économique extraordinaire essaient d'équilibrer leur maigre budget pour vivre ou plutôt survivre. Struggle for life !
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