La fête de l’Achoura ou Tamkharit est ce que l’on peut considérer comme notre carnaval national pendant lequel les rôles sont inversés entre filles et garçons. Cependant, il faut noter qu’au fil des temps, l’engouement qu’il suscitait s’estompe. D’abord on la préparait dès la Tabaski en récupérant les peaux de moutons afin de confectionner des instruments de musique pour accompagner les chants.
Les petits larcins commis pendant cette soirée ne choquaient personne. Le Tong tong où la distribution des parts du bœuf acheté collectivement et immolé à la mosquée était en soi un événement qui a inspiré l’écrivain Birago Diop dans L’os de Mor Lam. Tout cela est en train de disparaitre surtout dans les grandes villes où le communautarisme a pris un grand coup. D’autres rituels de cette fête sont aussi délaissés au profit d’une sobriété qui lui enlève tout son charme.
Avant, après le dîner festif, il fallait passer aux vœux de bonne année. Le père de famille réunissait les siens autour d’un bol et s’en suivaient les présentations de souhaits de tous les siens. Ce fait avait l’avantage de réconcilier les membres d’une famille qui étaient en froid et de procéder à des démonstrations d’affection. Cette manifestation de tendresse était touchante parce que nous vivons dans une société assez pudique lorsqu’il s’agit de prouver par des mots son amour pour l’autre. La fête de l’Achoura était notre noël et les cadeaux étaient des souhaits de bonheur. Ainsi, des conjoints si réservés d’habitude s’épanchaient devant leurs enfants et c’était toujours de grands moments d’émotion. Cette tradition a été rompue et rare aussi sont les foyers où le lendemain de cette fête, on se met du khôl autour des yeux, ces fameux tousngueul venant de la Mecque et gardé précieusement pour cette fête. Ce maquillage devrait servir à mieux voir Fatima, la fille du prophète Mouhamed (PSL) en train de faire sa lessive dans le ciel.
On y croyait naïvement et on scrutait le soleil pour la voir avec sa robe blanche et l’arc en ciel lui servant de ceinture. Mais le grand plus mythe qui est en train de disparaître est bien Abdou Diambar et il faut se demander si ce n’est pas une bonne chose car ce personnage est plus terrorisant qu’autre chose. Toutes les religions ont des mythes de ce genre qui se greffent à elles pour les envelopper de folklore. Par son nom, Abdou Diambar semble être une création typiquement wolof et sa description est redoutable en plus de ses manières expéditives de jeter les uns et les autres au paradis ou en enfer. Cette conception du jugement de Dieu selon Abdou Diambar manque de subtilité bien évidement et si l’on croit à cette mythologie d’Abdou Diambar, on a des idées arrêtées sur Le Créateur.
Il faut se demander si c’est intelligent d’inculquer cette approche des choses à nos enfants en forgeant ainsi en eux une vision manichéen du Seigneur. Heureusement une fois adulte, cette compréhension de la religion se fait plus raffinée et on n’a plus peur de la visite de ce fameux Abdou Diambar qui a terrorisé bien des enfants. Et tant mieux.
Auteur: Fatou Diop Sarr
Publié le: Lundi 03 Novembre 2014
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