A en croire Me Mame Adama Guèye, ‘ces récriminations persistantes des milieux d’affaires qui sont souvent à l’origine des faits de corruption, expliquent en partie le mauvais classement du Sénégal dans le Doing business et dans l’indice de perception de la corruption de Transparency’. Parlant de la corruption dans la magistrature, le bâtonnier de l’Ordre des avocats n’a pas, non plus, mis de gants pour fustiger vertement cet état de fait. ‘On ne le dira jamais assez, la corruption que vous n’avez pas manquée de dénoncer, monsieur le président de la République, et la concussion gangrènent aussi notre système judiciaire’, soutient-il. ‘La corruption n’est acceptable dans aucun secteur. Elle est encore plus intolérable dans celui de la justice pour la raison évidente que celle-ci n’est légitime que si elle est intègre’, note Me Guèye. Avant de saluer le mérite ‘des femmes et des hommes restés fidèles à leur serment et qui incarnent remarquablement cette intégrité essentielle’.
Cependant, le bâtonnier a déploré le fait que des ‘acteurs parasites (…) aient pris le parti de se servir de la justice pour s’enrichir’. A ce propos, il a regretté qu’ils ne soient pas ‘traqués’ et ‘neutralisés’ avec la rigueur requise. ‘Nous n’avons d’autre choix que d’engager résolument et sans faiblesse une lutte sans merci contre les acteurs de ce jeu pervers qui jurent d’avec les exigences du service public en matière d’égalité, d’équité et de neutralité’.
En outre, le bâtonnier de l’Ordre des avocats a déclaré assumer la responsabilité des membres de sa corporation dans la ‘situation actuelle de la justice’. ‘Il faut déplorer l’implication de membres de notre corporation dans le jeu pervers de la corruption ou de la concussion’, reconnaît-il, non sans promettre que l’ordre s’engage à sanctionner avec la rigueur requise les confrères impliqués.
DERAPAGES DANS LA JUSTICE : La part de responsabilité des experts, huissiers…
Selon Me Mame Adama Guèye, la situation actuelle de la justice n’est pas seulement l’œuvre de magistrats ou d’avocats véreux. Loin s’en faut ! A ses yeux, les autres intervenants comme les experts, les huissiers, les greffiers et autres agents d’affaires participent aux dérapages constatés, sans compter ‘les pressions extérieures du pouvoir exécutif, du pouvoir religieux, du pouvoir de l’argent et les contraintes sociales’. ‘Une justice à plusieurs vitesses, selon la capacité d’influence et les moyens financiers des protagonistes, a tendance à prévaloir au risque d’engager la responsabilité de l’Etat’, souligne le bâtonnier. Pour lui, il ne fait aucun doute que, ‘par son mode de fonctionnement actuel, la justice porte en elle-même les germes d’une responsabilité récurrente de l’Etat’.
Par conséquent, d’après Me Mame Adama Guèye, pour faire de la justice un véritable service public, il n’y a d’autre choix que d’engager une refondation du système sur la base des valeurs cardinales d’indépendance et d’intégrité. En plus, il a proposé la réforme du Conseil supérieur de la magistrature (Csm) en l’ouvrant au bâtonnier, à des personnalités de la société civile et aux hommes d’affaires. Dans la foulée, le bâtonnier a préconisé la mise en place d’observatoire de la justice pour mesurer les facteurs de performance et publier un rapport annuel sur le fonctionnement de la justice. Last but not least, il a proposé l’instauration d’une culture de performance dans le système judiciaire avec une attention particulière sur le management des juridictions en encourageant les bonnes pratiques et en sanctionnant les mauvaises.
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