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[ Entretien ] Dr Awa Marie Coll Seck, ancienne ministre de la santé : ‘ Notre pays a besoin d’une rapide reprise en main’

Auteur: Pape NDIAYE

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Connue au Sénégal pour avoir été l’un des ministres de la Santé les plus respectés du pays, Dr Awa Marie Coll Seck bénéficie aussi d’un capital sympathie intéressant à l’étranger.Première femme sénégalaise interne des hôpitaux de Dakar, spécialiste en maladies infectieuses, et première sénégalaise agrégée de médecine, elle est, depuis début 2004, la Directrice exécutive du Partenariat ‘Faire reculer le paludisme’ ou ‘Roll Back Malaria’ (Rbm). Un poste qu’elle va quitter au mois de mars, pour, dit-elle, servir son pays.Dans cette interview exclusive, l’ancienne sociétaire de la Jeanne d'Arc de Dakar revient sur sa vie, son parcours et ses projets qui ont motivé son retour au bercail.Mme Seck donne également son avis sur la situation socio-politique actuelle du pays non sans parler de son engagement aux côtés de Macky Sall.

Wal Fadjri : Pouvez-vous vous présenter aux lecteurs ?

Pr Awa Marie Coll SECK : Je suis infectiologue, fonctionnaire internationale, ancienne ministre de la Santé du Sénégal, membre fondateur du Syndicat unique des travailleurs de la santé et de l'action sociale (Sutsas) et de l'Association pour les femmes dans la lutte contre le Sida (Swaa). Je suis mariée, mère de 4 enfants et grand-mère d'une petite fille.

A ce jour, l’on vous rangeait dans la société civile. Quelle lecture faites-vous de la situation socio-politique du Sénégal ?

Le Sénégal, un pays dont la réputation démocratique va bien au-delà de ses propres frontières, se trouve aujourd’hui à un tournant décisif de son histoire. Après l’indépendance, en 1960, le pays a été dirigé pendant quatre décennies par le Parti socialiste, avant une alternance politique historique d’une coalition de forces ayant porté à la tête du Sénégal le Président Abdoulaye Wade. Ce nouveau souffle du 19 mars 2000 fut une des plus grandes réussites démocratiques en Afrique noire, et un enthousiasme sans précédent avait gagné une grande majorité du peuple sénégalais. Malheureusement, court fut cet enthousiasme et la liste des lamentations s’allonge de jour en jour.

Il y a eu, pourtant, beaucoup de réalisations comme des routes, des ponts …

Des réalisations comme les routes et échangeurs, certains acquis sociaux mais aussi beaucoup d'idées et de projets ont, certes, jalonné les deux mandats du président Wade. Mais, la qualité et le niveau de vie des Sénégalais ne se sont pas améliorés. C’est dommage de constater que les denrées de première nécessité restent inaccessibles aux populations les plus pauvres et sont une préoccupation quotidienne de la majorité des Sénégalais. L’accès aux soins et à l'éducation de qualité demeure un parcours du combattant. A cela s’ajoutent le chômage des jeunes, la destruction de la filière arachidière, l'habitat précaire avec le scandale des inondations, les problèmes d'électricité avec les délestages incessants qui ont perturbé les ménages et plombé notre économie. Et la liste pourrait être encore plus longue ! La recherche de la paix en Casamance a aussi été dévoyée. Les aspects fondamentaux d'éthique et les valeurs se sont détériorés. La corruption et l'impunité sont devenues la règle. Le train de vie de l'Etat et les dépenses de prestige exaspèrent le peuple sénégalais. Où est donc la justice sociale ? Où est la démocratie ? Où est le réel changement que nous attendions ? En outre, une menace plus vicieuse nous guette, à savoir la candidature illégale pour un 3e mandat du Président Abdoulaye Wade avec comme seul dessein inavoué une dévolution dynastique du pouvoir.

Alors, quels doivent être les contours de la résistance ?

Les contours d’une résistance ont déjà commencé à se dessiner avec les Assises nationales organisées sous le leadership d’Amadou Makhtar Mbow - un grand homme que je salue ici -, des mouvements spontanés dans les quartiers, les manifestations du 19 Mars 2011 et du 23 Juin ainsi que des rassemblements de jeunes conscients tel ‘Y en a marre’. 2012 sera l’affaire de tous. Tous les Sénégalais en âge et ayant le droit de voter devront le faire sans exception, je pense surtout aux jeunes car il s’agit de leur avenir mais aussi de notre avenir à tous. Il faut vraiment reprendre notre pays en main !

Quel profil doit avoir, selon vous, celui qui aura la charge d’assurer cette reprise en main ?

Le candidat crédible aux joutes électorales de 2012 devra répondre à certains critères qui assureront aux Sénégalais qu’ils ne s’embarqueront pas dans une nouvelle aventure à l’issue incertaine, où ils seront utilisés puis laissés à leur sort quand un groupe de privilégiés bénéficiera de leur travail et de leurs sacrifices. Notre futur président devra être sérieux, respecté, compétent, intègre et expérimenté. Le sort des populations les plus vulnérables, celles qui souffrent le plus, devra être haut sur son agenda, ainsi que les valeurs éthiques. Ce candidat devra avant tout répondre aux exigences d’éligibilité de la Constitution du Sénégal. Il devra avoir les valeurs fondamentales qui serviront de support moral et éthique dans les pratiques politiques qui régiront nos vies au quotidien. Il doit être un leader moderne, conscient des enjeux du 21e siècle et du rôle que le Sénégal et l’Afrique ont à jouer. Une alternance générationnelle est aujourd’hui nécessaire pour apporter un sang nouveau et un nouvel élan.

Côté parcours, ce candidat à la magistrature suprême devra avoir une expérience dans la gestion des institutions de l’Etat et une connaissance avérée de la géopolitique mondiale. Il devra aussi instaurer une nouvelle approche dans la gestion de la cité basée sur la transparence et la lutte contre la corruption dont il aura fait preuve antérieurement dans son parcours. En ce qui concerne son programme, il devra avoir un discours pertinent basé sur une analyse sans a priori ni indulgence avec la priorité donnée à l’emploi des jeunes, au statut de la femme en instaurant une approche genre, aux secteurs sociaux comme l’éducation, la santé et le monde rural. Enfin ce candidat doit avoir une approche au-dessus de toute tendance idéologique ou partisane. Son programme devrait inclure le Sénégal dans son ensemble sans discrimination ethnique, religieuse, régionale ou sociale. Les orientations de ce programme devront être basées sur la souveraineté, la démocratie et l'équité.

On a lu dans la presse que vous avez décidé de soutenir le candidat Macky Sall. Pourquoi ?

Je soutiens la candidature de Macky Sall, parce que je suis pour une alternance générationnelle et pour un programme dont le socle est les Assises nationales.

Macky Sall n’est, pourtant, pas le seul à répondre à ces critères…

C'est vrai ! Mais, il a une expérience du fonctionnement des institutions de la République en tant qu'ancien ministre, Premier ministre, parlementaire et maire. Il a fait preuve, tout au long de son parcours, de compétence, d'intégrité, de loyauté et de grande dignité devant l'adversité ou les complots. Il incarne pour moi des valeurs auxquelles je tiens : l'équité et l’éthique. Ces dernières sont également fondamentales pour ramener la paix en Casamance.

Votre soutien à Macky Sall n’est-il pas motivé par une ambition de retour au gouvernement ?

Là n'est pas mon objectif. Je voudrais qu'on en finisse avec la politique politicienne. Je me suis engagée aux côtés de Macky Sall pour le Sénégal, et non pas pour recevoir une quelconque récompense. Que l'on mette à la place qu'il faut les hommes et les femmes prêts à servir leur pays avec compétence et abnégation. Le Sénégal regorge de compétences. Je dirais tout simplement que, à 60 ans, je veux être entourée de ma famille, aider mon peuple et rendre grâce à Dieu. Je n'aspire à rien de plus.

Auteur: Pape NDIAYE
Publié le: Lundi 23 Janvier 2012

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