La méga star Abdoulaye Wade a profité de la tribune que lui offraient ses fans à Versailles pour annoncer sa retraite politique - nouvelle applaudie autant par les thuriféraires que les contempteurs. Le dernier Père de la Nation continue cependant de faire bouger les lignes. Il est revenu à ses premières amours, la consultance internationale, domaine où, jeune et ambitieux, il faisait son beurre. Vite fait, Il a bouclé une étude sur la nouvelle problématique de l’espace politique sénégalais. Avec un accent particulier sur la nécessaire reconfiguration des forces politiques dans le contexte d’arrivée au pouvoir de Macky Sall, tête de pont d’une Sainte Alliance de libéraux, socialistes, centristes et autres démocrates. La consultation gracieuse a destinataires Macky Sall, Moustapha Niasse, Ousmane Tanor Dieng, Idrissa Seck et autres Ibrahima Fall, tous membres de la Sainte Alliance qui défit le président Wade en mars dernier. Victime comme Diouf, en 2000, de départs qui emportaient de larges pans de leur parti-locomotive de coalition gagnante.

Le consultant, après analyse de l’imbroglio, conseille la reconfiguration des forces politiques qui se disputent de façon confuse le pouvoir suprême. Pour ce, il recommande fortement les retrouvailles tant libérales que socialistes. Elles donneraient un grand parti libéral avec Macky Sall, Idrissa Seck, Oumar Sarr, Pape Diop, Abdoulaye Baldé et autres Lamine Bâ. Un grand parti socialiste avec Moustapha Niasse, Ousmane Tanor Dieng, Robert Sagna, Souty Touré, Abdourahim Agne, Abdoulaye Makhtar Diop et autres communistes reconvertis au socialisme à hauteur d’homme de Senghor.

Messieurs les leaders de parti n’ont pas réagi à la proposition de Wade. A l’exception notable d’Abdoulaye Makhtar Diop, sûr que les socialistes désunis n’ont aucune chance de revenir au pouvoir. Du côté des libéraux, silence de rigueur, même si Macky Sall  s’est déjà dit disposé à des retrouvailles libérales - sélectives ?

 Cependant, malgré les contraintes, à lever, l’intelligence commande de suivre la voie tracée par l’avisé consultant.  Il est en effet vérifié que l’atomisation des partis politiques est le mal suprême. Un mal contre lequel Diouf et Wade n’ont rien pu faire. Si le président Sall veut réussir la «rupture» et rempiler, il lui faut un grand parti, fort et ouvert. Mais comment rallier Pape Diop, Idrissa Seck, Omar Sarr, Abdoulaye Baldé et autres Abdou Fall qui, tous, veulent être calife à la place du calife ? Comment faire de l’ancien fondé de pouvoir de Wade, born to be president, un second docile ? Voilà des questions auxquelles le président Sall ne trouve pas réponse.

Les amis socialistes du libéral en chef auront également du mal. Qui de Niasse ou Tanor ? La bataille pour le titre fantasmatique, «héritier de Senghor », gagnée dans les urnes par Moustapha Niasse au premier tour de la dernière Présidentielle, tourne à la guerre de Cent Ans. La situation est d’autant plus absurde que les frères ennemis sont sur le départ. Et les guerres de succession sont toujours sanglantes …

Franchement, on voit mal socialistes et libéraux réussir la mise en œuvre de la chose. Peut-être leur manquent le désir et l’intelligence du défi…

 Le consultant est lors obligé de livrer l’étude complète. Le Wade mode d’emploi pour la reconfiguration du paysage politique sénégalais et l’avancée de la démocratie. Il suffit de demander. Morale de l’histoire : ne jamais mélanger les torchons et les serviettes. Les libéraux avec les libéraux. Les socialistes avec les socialistes. Les autres avec les autres. Dans la langue de Kocc Barma, plus expéditive et colorée, le vieux briscard dira sûrement au président Sall, à leur prochaine rencontre : «goor ca goor gni, jiggen ca jiggen ya. Thiapa niama kuss». Toc !

En tout état de cause, Macky Sall  serait bien avisé de recourir aux services gracieux de ce bon vieux Wade que, dans la chaleur d’étuve d’un congrès d’investiture, il comparait à Napoléon et Bismarck, habiles politiques s’il en est …