Le Sénégal est passé d’un taux d’urbanisation de 23 % en 1960 à 45,2 % en 2013, puis à 47,8 % en 2023. Aujourd’hui, près de la moitié de la population vit en zone urbaine, dans un contexte de forte pression démographique. Cette croissance, parfois jugée effrénée, se traduit par une multiplication des constructions sans planification rigoureuse, dans des zones où l’imperméabilisation des sols atteint jusqu’à 90 %.
Une étude du projet PGIIS2, conduite par la Direction de la Prévention et de la Gestion des Inondations, a identifié 29 localités vulnérables aux crues, notamment dans les zones périurbaines de Dakar. À Guédiawaye, 7 % des surfaces sont exposées, contre 16 % à Pikine, amplifiant les risques pour les habitations précaires. Dans certaines communes, les surfaces artificialisées atteignent 90 %, altérant la capacité des sols à absorber les eaux de pluie.
Parallèlement, l’urbanisation non maîtrisée exacerbe les inégalités territoriales. Les quartiers planifiés cohabitent avec des zones d’habitat spontané, qui concentrent près de 40 % des logements à l’échelle nationale. Ces espaces, souvent mal desservis par les services publics, souffrent d’un accès limité à l’assainissement, à l’électricité ou aux transports urbains.
Sur le plan écologique, la disparition progressive des zones humides et la fragmentation des espaces naturels contribuent à la dégradation de la biodiversité et à une hausse des températures locales. La fragilité des infrastructures, combinée à l’irrégularité croissante des précipitations, renforce les vulnérabilités face aux impacts du changement climatique.
En dépit de l’existence de plans directeurs et de schémas d’aménagement, moins de 20 % des communes disposent d’outils actualisés ou opérationnels. Le déficit de coordination entre l’État et les collectivités, conjugué à des ressources humaines et budgétaires limitées, freine l’émergence d’une politique urbaine cohérente.
À l’heure où les villes sénégalaises absorbent chaque année des dizaines de milliers de nouveaux habitants, la question n’est plus de construire davantage, mais de mieux construire. Urbaniser sans planifier revient à compromettre les équilibres futurs. Redonner une place aux espaces verts, densifier sans étouffer, reconnecter les fonctions urbaines : autant d’urgences pour sortir du modèle des bétons à perte de vue.
Commentaires (0)
Participer à la Discussion