Le rendez-vous manqué de trois députés avec Gbagbo

Invités par l’Assemblée nationale ivoirienne pour un voyage très pro-Gbagbo, le président sortant qui refuse de céder sa place à Alassane Ouattara, trois députés UMP ont été dissuadés par l’Elysée de partir.

Mais qu’allaient-ils faire dans cette galère ? Trois députés UMP (Yves Censi, député de l’Aveyron ; Cécile Dumoulin, députée des Yvelines, suppléante de Pierre Bédier ; et Jean-François Mancel, député de l’Oise) avaient prévu de se rendre à Abidjan le week-end dernier, à l’invitation du président de l’Assemblée nationale ivoirienne.

Une intervention de l’Elysée, relayée par Christian Jacob, président du groupe UMP à l’Assemblée, les a dissuadés in extremis de faire le voyage. « J’ai été informé vendredi, à 20 heures, par un coup de fil d’un conseiller de l’Elysée, que trois de nos députés s’envolaient pour la Côte d’Ivoire à 23h30, confirme Jacob. Je m’en suis expliqué avec eux. Il y avait un risque évident d’exploitation de ce voyage là-bas. Eux-mêmes ont pris la décision d’y renoncer. » Alors que Nicolas Sarkozy a appelé à plusieurs reprises Gbagbo à quitter le pouvoir depuis la victoire d’Alassane Ouattara à l’élection présidentielle, en novembre, l’équipée UMP aurait fait désordre.

Cependant, Mancel et Censi maintenaient hier qu’ils étaient dans leur rôle en effectuant ce voyage. « L’une des missions du parlementaire est de contrôler l’action du gouvernement, où que ce soit, affirme le député de l’Oise. Comment le faire sans aller sur place et rencontrer les deux camps en présence ? » « Ce n’est pas le coup du siècle, se défend Censi. La voix de la France est une, mais considérer qu’elle ne passe que par l’exécutif serait quelque chose de nouveau. »

Les billets d’avion (de ligne) étaient payés par l’Assemblée nationale ivoirienne, selon le député de l’Aveyron. Les trois élus, pas même membres de la commission des Affaires étrangères, affirment avoir « des amis sénégalais » pour l’un, « des liens avec l’Afrique » pour les autres. Enrôlés dans l’aventure dans un premier temps, Yves Jégo (député de Seine-et-Marne) et Jean-Michel Fourgous (député des Yvelines) s’étaient désistés bien avant vendredi. « Cela partait d’une bonne intention, mais ça n’avait pas la neutralité d’une mission parlementaire », explique Fourgous.

Présentée sur un site ivoirien, vendredi, comme une « délégation UMP » qui devait rencontrer Gbagbo et ses ministres, la balade du trio courait à la récupération. « Avec ce genre de déplacement, il y a toujours un risque de détournement et de manipulation », admet Censi. « Même moi, je n’y vais pas, alors que je suis invité depuis des semaines par les amis de Gbagbo », sourit Didier Julia, député UMP féru de diplomatie parallèle. « Heureusement qu’ils n’y sont pas allés, conclut Bernard Debré, député UMP de Paris. Parce que le ridicule ne tue pas, c’est vrai, mais il fait tout de même du mal quelquefois »… Audio. Les explications de Jean-François Mansel