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Afrique

Thomas Sankara, "le mythe qui ne lisait pas assez de poésie"

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Mohamed Mbougar Sarr (Sénégal), écrivain. Il a remporté le prix Kourouma avec son premier roman, "Terre Ceinte". A Paris, le 16.04.2015. © Vincent Fournier/JA

J’ai enfin compris pourquoi Sankara ne me touchait qu’à moitié. L’homme est admirable. Il a transformé un pays, redonné de l’espoir à un peuple, rebaptisé sa patrie, combattu l’ennemi, dénoncé l’impérialisme, tenté de voler l’avion d’un pays ami, travaillé à la souveraineté de ses frères.

Et tout cela n’est encore qu’une infime part de sa geste, d’autant plus superbe qu’elle a eu une fin prématurée et tragique. C’est un homme devenu un mythe, un saint, un des nombreux prophètes du siècle passé. Il a même des zones d’ombre. On s’incline bien bas.

Pourtant… Mais avant de continuer, un aveu : imbécile ou naïve habitude, je ne juge les hommes et femmes d’État qu’à leurs lectures, à leur bibliothèque. Là est leur dernière vérité (politique).

L’État et la Révolution, son « livre refuge »

Sankara lit, bien entendu. Qu’y a-t-il dans sa bibliothèque ? Rien, puisqu’il dit, dans un très révélateur entretien publié dans ce journal même [numéro du 12 mars 1986], ne pas en posséder. En réalité, l’homme a un rapport problématique à la confession de ses lectures : « Une bibliothèque, c’est dangereux, ça trahit. » Il ne lit presque jamais de fiction, ça l’emmerde. Les romans africains l’insupportent. Il tance Ki-Zerbo, égratigne Cheikh Hamidou Kane, confirme qu’il écrit lui-même ses discours – ouf !

Mais que lit le grand homme ? Il lâche qu’il n’a pas fini Le Capital, mais qu’il a lu tout Lénine. Entre camarades prophètes… L’État et la Révolution est son « livre refuge ». Il l’emporterait sur une île déserte avec… la Bible et le Coran. S’ensuit un très intéressant développement philosophico-politico-religieux sur Lénine, le Christ et Mohammed, où Sankara fait preuve d’une grande agilité dialectique et d’une certaine acuité dans son analyse historique.

Un manque de souffle poétique

En fait, Sankara, comme tous les vrais révolutionnaires, était un mystique, mais un mystique sans extase. La dimension mystique me plaît : c’est celle de la vision, de la détermination, de la foi en un idéal transcendant. Mais tout cela est trop « aride », comme il le dit avec humour au début de son propos.

Sankara avait – c’était sûrement sa force et, peut-être, sa faiblesse – un tel souci de la transformation du réel qu’il en a peut-être oublié l’espace du rêve – ce qui est une faute pour un idéaliste. L’imaginaire poétique lui faisait défaut, ou alors il s’y refusait ; en tout cas cela se sentait : ses discours, même les plus mémorables, ont manqué non de style, non d’humour, non d’effets rhétoriques, mais de souffle poétique. Si seulement il avait lu plus de romans et de poésie, il aurait vu qu’on tentait aussi d’y changer les hommes.

* Il est l’auteur de Terre ceinte (2015, prix Ahmadou-Kourouma) et de Silence du chœur (2017), tous deux disponibles chez Présence africaine (lire pp. 108-109).



22 Commentaires

  1. Auteur

    Anonyme

    En Octobre, 2017 (22:29 PM)
    Belle plume. Vous êtes une fierté. Merci pour cela.
  2. Auteur

    Sankariste

    En Octobre, 2017 (00:24 AM)
    Eh merde !

    Meme s'il ne lisait pas de poesie,

    il a réalisé des trucs concréts que notre cher poéte de Segnhore n'a pas réussit !



     :emoshoot:  :fbhang: 
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    Auteur

    Anonyme

    En Octobre, 2017 (05:09 AM)
    ET oui ! Il faut une part de poésie dans tout. ça rend tout plus beau

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    Auteur

    Anonyme

    En Octobre, 2017 (07:05 AM)
    paroles paroles paroles



    il y 'a plusieurs types d'hommes les rêveurs idéalistes et les hommes d'action . je préféré un president comme Sankara qui agit de façon déterminer pour l’émancipation réel de l'homme noir et des africains plutôt que quelqu’un qui le chante et ne fais concrètement rien pour y arriver comme Senghor
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    Auteur

    Anonyme

    En Octobre, 2017 (07:09 AM)
    tout cela pour nous dire que vous êtes cultive en nous montrant votre bibliothèque. sankara est plus utile que vous pour nous les africains.
    Auteur

    Ndiaye

    En Octobre, 2017 (07:20 AM)
    La poésie ne remplit pas le ventre. Notre président poète nous a fait perdre 20ans. Au moment où des nations pauvres comme la Chine ou les dragons d'Asie se battaient pour l'industrialisation; il nous cassait les couilles avec de la poésie.
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    Auteur

    Anonyme

    En Octobre, 2017 (07:25 AM)
    vous voulez nous faire croire que vous aimez beau mais cela ne vous empêche pas de critiquer un mort. pourquoi vous ne parlez pas de la bibliothèque de macky sall qui lui est bien vivant.

    vous avez peur monsieur
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    Auteur

    Anonyme

    En Octobre, 2017 (08:27 AM)
    Cessez de vous tromper de combat à moins vous soyez ces idiots irrécupérables! ici on parle bien de poésie Sankara lui n'avait rien contre le français au contraire tous ses discours sont en français tout comme tous ceux des pseudos révolutionnaire qui aiment le français langue avec laquelle ils communiquent partout dans le monde  :thumbs_up: 
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    Auteur

    Anonyme

    En Octobre, 2017 (09:18 AM)
    Vraiment l'auteur de cet article est un vrai vautour. Honte et malheur toi qui ose critiquer lachement notre visionnaire. Tu nous parle de poésie. Ou est senghor, l'assimilé, le complexé comme toi. sale merde. Son excellence SANKARA était objectif panafricain et concret. la poésie c'est l'abstrait, rever, mentir, inventer des mensonges en cours de journée et les faire croire et accepter par les véridiques. Senghor n'a rien foutu au sénégal pendant 20 ans alors son excellence sankara a transformé le burkina faso en moins de 05 ans.

    Bandes d'idiots et sales traitres. La notoriété posthume de SANKARA hante le sommeil des vautours neocolonialites en france, en afrique et ailleurs dans le monde.

    Malheur à vous bandes de sans couilles: :emoshoot:  :fbhang: 
    Auteur

    Anonyme

    En Octobre, 2017 (09:58 AM)
    un cafard !!! thiiimmm mbbooootttt bi gua done
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    Auteur

    Anonyme

    En Octobre, 2017 (10:38 AM)
    dire que Sankara n'a rien fait au Burkina est tout simplement faux;il leur a inculqué une discipline qui nous fait cruellement defaut au Sénégal .
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    Auteur

    A Bas La Charognard-attitude !

    En Octobre, 2017 (10:53 AM)
    Je suis abasourdie ..........

    Depuis quand la poésie est-elle un critère pour analyser la "culture" ou la "profondeur" d'un homme  :jaaxle:  :jaaxle:  :jaaxle:  :jaaxle:  :jaaxle:  :jaaxle:  :jaaxle:  :jaaxle:  ?????????????? Tey la diomi  :interrogation: 

    C'est du n'importe quoi du début à la fin !

    A ceux qui sont familiers du Coran, s'il vous plaît allez relire ce qui est dit sur ces "poètes"   <img src="https://images.seneweb.com/content/seneweb/generic/images/smileys/khelou.gif" alt=":khelou:">   :

    Le Sénégal a eu un président dont on se vantait partout qu'il était "poète", "premier agrégé en grammaire", et patati, et patata. Concrètement qu'est-ce que ca a aapporté au Sénégal ? Nada ! Touss ! Une élite corrumpue, une éducation nationale qui n'a pas encore produit le lot d'individus qui soient capables d'implémenter une stratégie pour sortir ce pays de sa "culture du verbiage"   <img src="https://images.seneweb.com/content/seneweb/generic/images/smileys/khelou.gif" alt=":khelou:">    <img src="https://images.seneweb.com/content/seneweb/generic/images/smileys/khelou.gif" alt=":khelou:">    <img src="https://images.seneweb.com/content/seneweb/generic/images/smileys/khelou.gif" alt=":khelou:">  

    Et celui-là ose s'attaquer à un mort, pour lui "reprocher" de ne pas avoir perdu son temps à lire les divagations de gens qui passent leur temps à dire ce qu'ils ne font pas, à raconter ce qu'ils n'ont jamais vu et à nous saoûler avec leurs états d'âmes ?????? pffffffffffffffffffff

    Je suis dégoûtée par tant de légèreté....... tant de prétention..........
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    Auteur

    Anonyme

    En Octobre, 2017 (12:07 PM)
    Thieuy Senegal! C ki ce guignol encore?
    Auteur

    Anonyme

    En Octobre, 2017 (12:47 PM)
    Il ne faut pas non plus cultiver la pensée unique en refusant toute critique à l'endroit de nos héros. L'auteur de l'article a bien apprécié sa qualité d'homme d'action mais émet des réserves quant à la qualité poétique de ces discours. Les grands révolutions sont aussi des politiques
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    Auteur

    Taxawsiggil

    En Octobre, 2017 (13:25 PM)
    Je pense que l'article est trop fin pour la masse de personne qui le critique bêtement ici. Tout ce que l'auteur a dit de, d'une très belle manière, c'est qu'avec de la poésie, Sankara aurait eu encore plus d'impact sur l'imaginaire des gens. Cela ne veut pas dire qu'il n'en a pas eu ou qu'il en a eu moins que des poètes comme Senghor (qui en passant n'est pas ma tasse de thé !).

    Lisons bien, ne soyons pas bornés, acceptons les critiques qui font avancer.
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    Auteur

    Alioune

    En Octobre, 2017 (14:19 PM)
    Sankara reste une grande figure, et je profite de l’hommage à sa mémoire pour émettre quelques jugements sur le mouvement panafricaniste qui devient de plus en plus une armée espagnol d’idéologues et agitateurs souvent chômeurs, très aériens vis-à-vis de la praxis.



    En effet, L’Afrique est confrontée à des problèmes en tous genres, migrations sauvages (Barsakh, ratonnades algériennes), épidémie d’Ebola, crise malienne, insécurité en Cote d’ivoire, expulsions US, drame du Sud-Soudan et je ne noircis pas le tableau…..



    Les actions notables semblent souvent décalées, ou en déphasage avec les véritables problèmes des Africains et le thème de l’impérialisme semble daté sinon restrictif ; les Africains en pensant par eux et pour eux-mêmes, doivent mieux s’organiser solutionner les problèmes.



    Les plus érudits nous sortent parfois des textes compliqués, livrés sans dictionnaire ; j’ai lu critique de la raison nègre, mais j’ai rien compris, pourtant j’arrive à suivre les 3 critiques de Kant, qui sont pas simples……



    Je ne parle même pas de ceux qui passent du radicalisme noir à l’extrême droite !!!



    Il y a parfois des éclaircies comme Boris Diop sur le Rwanda, mais je pense qu'importe de faire le point sur le Panafricanisme contemporain pour nous adapter aux enjeux du moment.



    Le président Alpha Condé, à la tête de l’UA, est animé de grandes ambitions, et les panafricanistes doivent le prendre au mot et lui demander d’organiser un grand congrès sur le Panafricanisme ; ce qui peut être un bon début.



    Je crois que c’est plus parlant que de brûler un billet de 5000 francs CFA sur la place de Dakar.



    Au registre des icones du Panafricanisme, il faut souligner que Senghor a été également une grande figure de la modernité africaine qui a permis que le Sénégal soit un espace d’expression pour toute l’Afrique.



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    Auteur

    Anonyme

    En Octobre, 2017 (14:46 PM)
    ON DOIT TUER TOUS LES POETES AFRICAINS, COMME ca on avancera
    Auteur

    Anonyme

    En Octobre, 2017 (15:11 PM)
    Un senghor du 21e siècle
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    Auteur

    Anonyme

    En Octobre, 2017 (15:23 PM)
    déét waye, loolou eupeu neu



    Il faut de tout pour faire un monde......, vivable,humain..



    ngnoune déé, sénégal khamou niou koo



    Peace and salvation
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    Auteur

    Anonyme

    En Octobre, 2017 (17:19 PM)
    Le rêve ne vaut rien s'il n'est pas accompagné d'actions. En 2000, Dakar sera comme Paris, un TGV pour Dakar (avec une production électrique insuffisante), une usine à maffé, ou même plus basique encore, des emplois pour tous... Comme on parle aussi de poésie, on peut citer le nobelisé Wole Soyinka en réponse à l'Immortel Senghor, "Le tigre ne clame pas sa tigritude, il bondit sur sa proie et la dévore". Sankara n'avait pas la prétention d'un Senghor et il s'est battu pour l'amélioration des conditions de vie de ses concitoyens jusqu'à y laisser sa vie. D'autres ont préféré les lumières de palais normands et les douceurs des tapis rouges. Pour un révolutionnaire, la poésie c'est non pas la recherche du beau mais le combat contre des forces impérialistes pour sortir le peuple de la misère et de l'humiliation. Un Monument de la Renaissance est une insulte quand les ventres sont vides.
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    Auteur

    Anonyme

    En Octobre, 2017 (01:55 AM)
    Ce mec est un âne avec sa poésie à la con. A quoi sert la poésie à quelqu’un qui a faim.
    Auteur

    Thomas Sans Gants

    En Octobre, 2017 (09:37 AM)
    Nicolini : Vous avez une bibliothèque je suppose ?

    Sankara : Non, absolument pas. Mes livres sont dans des cantines. Une bibliothèque, c’est dangereux, ça trahit. D’ailleurs je n’aime pas dire ce que je lis non plus. Jamais je n’annote un livre ou je ne souligne des passages. Car c’est là que l’on se révèle le plus. Cela peut être un vrai carnet intime.



    Nicolini : Vous n’aimez pas la littérature de détente ?

    Sankara : Non, je ne lis pas pour passer le temps, ni pour découvrir une belle narration.



    Nicolini : Comment choisissez-vous vos livres ?

    Sankara : Il faut dire d’abord que je les achète. Et c’est le titre qui m’accroche, plus que l’auteur. Je ne lis pas pour découvrir l’itinéraire littéraire d’un écrivain. J’aime aller au-devant d’hommes nouveaux, de situations nouvelles.



    Nicolini : Parlons un peu de littérature africaine, d’écrivains burkinabè. Lequel vous a marqué ?

    Sankara : Je n’aime pas les romans africains. Pas plus que les films d’ailleurs. Ceux que j’ai lus m’ont déçu. C’est toujours les mêmes histoires : le jeune Africain parti à Paris, qui a souffert, et qui en rentrant est déphasé par rapport à la tradition.

    Nicolini : C’est l’Aventure ambiguë de Cheikh Hamidou Kane que vous évoquez là !

    Sankara : Oui, et je n’aime pas cette façon de décrire les gens. Dans la littérature africaine, ce ne sont pas des Noirs qui parlent vraiment. On a l’impression d’avoir affaire à des Noirs qui veulent à tout prix parler le français. Ça me gêne. Les auteurs devraient écrire comme on parle actuellement.



    Nicolini : Vous préférez qu’ils parlent en petit-nègre ?

    Sankara : A la limite, je préférerais. De toute façon les écrivains africains que je préfère sont ceux qui traitent de problèmes concrets, même si je ne suis pas d’accord avec leurs positions. Je n’aime pas ceux qui cherchent à faire des effets littéraires.





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