« Si vous désirez la sympathie des masses,
vous devez leur dire les choses les plus stupides
et les plus crues »
Adolph HITLER
Il ne faut quand même pas taper sur Thierno Lô. Ca vole dangereusement bas, en petite compagnie. Cet homme était un lugubre cadre de la CDP qui écumait les festins royaux, un des plus grands chevaliers de l’anti-wadisme, quand il était de mise chez Iba Der. Il ne doit sa promotion qu’à des luttes de faction et une mise à mort programmée de Modou Diagne Fada.
Mais on s’en prend au steward, pendant que le pilote nous conduit directement à la catastrophe, chers amis. Depuis bientôt sept ans, nous nous réveillons tous les jours comme des miraculés, espérant une fin heureuse à cette aventure dangereuse qu’est devenue l’alternance, mais nous risquons de nous retrouver sur les lieux du crash avec un corps social déchiqueté et un appareil étatique en lambeaux. Après lui avoir porté de rudes coups, Wade et ses acolytes viennent d’assassiner sauvagement l’éthique politique. Je ne comprends d’ailleurs pas les journalistes qui s’embarrassent de précautions oratoires avec des « si », pour évoquer cette affaire. Thierno Lô a pris 200 millions au commandant Cissokho qu’il n’a pas versés au destinataire Madiambal Diagne, puisqu’il s’est contenté de « Dieu sait », quand on lui a demandé s’il a bien remis cet argent au directeur du quotidien. Sa signature est claire, limpide, et on n’a pas besoin d’une loupe, pour la voir sur le parapheur de l’aide de camp du président de la République. Dans n’importe quelle République sérieuse, on l’aurait démis de ses fonctions dès le lendemain, et envoyé en prison. Il nous a vraiment pollué l’air, depuis qu’il est là, ce monsieur environnement.
Mais c’est le Wadisme qui serait en procès. C’est lui, le président, qui entretient toute cette meute, prête à guetter la moindre intention du chef pour sauter. Ils chassent d’ailleurs en bande, nos loups affamés. C’est juste qu’un membre de la meute s’est détaché avec un gros morceau saignant, qu’on va lui intimer l’ordre de partager, rien de plus.
On serait passé sur cette faillite morale, si elle n’était pas accompagnée d’une catastrophe économique et sociale. Wade distribue des centaines de milliers d’Euros pendant que les prix flambent, pendant que l’Etat décide de ne plus subventionner le gaz, et laisse nos ménages à la merci des trafiquants. 200 millions, c’est la masse salariale de tous les travailleurs de Ama-Sénégal, obligés à une grève de la faim pour se faire entendre. Tout cela, au seul service de sa survie politique et son allergie viscérale à toute forme de contestation.
Il n’y a pas chez cet homme, le moindre sentiment de culpabilité. Il serait mort de honte, face à toutes ces situations déshonorantes, qui mettent à nu sa gestion désastreuse du pays. La culpabilité lui est étrangère. Il pense que l’éthique, c’est de la fiction. Les hommes sont chez lui comme du bétail. Ils s’achètent tous, c’est juste une question de prix chez lui. Il faut le voir, tout le mois de décembre, marchander l’un après l’autre le soutien de ses marabouts politiciens. Le chef de meute en voyage d’affaires chez les bergers. Je n’ai jamais vu chez un homme politique, une aussi grande aptitude à supporter les situations humiliantes. Il peut vous infliger les pires avanies, vous rayer de son carnet d’adresses, et un jour vous recevoir, vous dire que vous êtes le meilleur homme au monde, et vous reprocher de ne pas lui rendre visite assez souvent. Wade ne lève les voiles que dans le sens du vent.
Nous ne pouvons pas continuer à blâmer ceux qui cèdent à son chantage « économique ». Il ne leur laisse souvent aucun choix. J’expliquais, mardi, comment il a savamment démantelé Itoc et Oryx, les sociétés qui rapportaient ses revenus à Moustapha Niasse, et qui lui permettaient de faire vivre certains cadres de son parti. Fraude douanière, redressement fiscal, tout y est passé. Le Directeur général d’une de ces sociétés a d’ailleurs fui, pour échapper à la Justice sénégalaise, très habile quand il s’agit de poursuivre d’honnêtes entrepreneurs. Il a fait la même chose à Cheikh Tall Dioum, accusé de fraude, envoyé en prison, libéré à la seule condition qu’il cèdât tous ses biens, la brasserie comme le groupe Com 7, à son conseiller spécial délinquant financier Pierre Aïm.
Il a ainsi affamé les cadres de l’Afp, avant de les prendre un à un dans la bergerie. Abdoulaye Babou ne l’a d’ailleurs pas caché, il a déclaré, sans honte, que lors du décès d’un de ses parents, maître Wade lui a envoyé un « Yobbanté ».
Il y a, évidemment, des journalistes qui donnent tous les jours raison à ceux qui pensent que nous sommes une corporation corrompue. Ils sont, tous les jours, prêts à coucher leurs papiers sur un pli de liasses. Nombreux sont d’ailleurs ceux qui ont reçu d’importantes sommes, contre un silence sur le scandale de l’argent taïwanais, dans laquelle Pierre Aïm s’est défroqué publiquement.
Ce n’est pas le cas des responsables du journal Le Quotidien. Je les connais, pour avoir travaillé avec chacun d’eux. Ils ne sont pas capables de corruption. Il faudrait plutôt les remercier d’avoir mis sur la place publique cette affaire gênante, et d’avoir révélé la véritable face de ce troubadour de Thierno Lô. Tous les « amis » qui échappent à ses filets deviennent, dès le lendemain, de la pâture impropre à la consommation. Madiambal Diagne, l’ancien camarade de la CDP, qu’il voulait attirer vers le président Wade devient subitement l’ancien greffier radié de la fonction publique, un sans domicile fixe à qui il a prêté les locaux de son parti. Ainsi va le wadisme, tous ceux qui ne sont pas d’accord avec lui sont insultés et humiliés publiquement.
Dans les annales de la République, c’est la première fois que le chef de l’Etat se met en avant aussi directement, dans une affaire de corruption, puisque c’est de cela qu’il s’agit. Il a bien dit à Thierno Lô, au cours de cette séance de « teesanté » comme il les aime, qu’il lui a donné 200 millions, et qu’il n’a pas une décharge pour prouver que l’argent a bien été remis à Madiambal Diagne.
On a eu droit aux mêmes mensonges de ce cabot, quand il s’est agi d’évoquer les tractations qu’il a menées pour des retrouvailles entre Abdoulaye Wade et Moustapha Niasse. Le président de la République prie les journalistes de ne pas évoquer tout ceci, et le lendemain, se permet de donner un cours magistral sur la corruption aux magistrats. Wade est le premier responsable de cette corruption généralisée, qui a partout braqué des sénégalais contre des Sénégalais. Il croit que la politique permet tout ce que les autres corps de métier ne permettent pas : le vol, la corruption, le mensonge, le crime. Et croyez-moi, il ne va jamais punir Thierno Lô, parce que ce serait avouer qu’il est lui-même un corrupteur. C’est tellement sale, tout ça !
Wade n’aura jamais su, même au terme de 7 années de tâtonnement et « d’apprentissage », se mettre à la hauteur d’un homme d’Etat. Il est trop bas pour monter à cette hauteur, et ses seules compétences sont celles d’un épicier qui racle les fonds de caisse, tête baissée.
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