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Vendredi 01 Juin, 2018 +33
Chronique

[ CHRONIQUE ] La tragédie du roi catastrophe

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[ CHRONIQUE ] La tragédie du roi catastrophe

«Tout le monde peut faire des erreurs et les 
imputer à autrui : c’est faire de la politique»

Georges CLEMENCEAU

Mais que Diable, le Sénégal a-t-il fait, pour être ainsi traité par Abdoulaye Wade ? Je me pose toute sorte de question et aucune réponse ne me vient. Car quel que soit le bout par lequel on le prend, le président de la République a définitivement changé notre façon de penser la politique, en plus d’avoir modifié notre manière d’être. On ne se pose plus de questions sur ses actions et leurs conséquences, on les connaît. Chacun veut savoir ce qui se passe dans la tête du président. On veut découvrir ses intentions non avouées, ses ressorts cachés. Notre avenir, je dis bien, en sera définitivement changé. Nous ne jugerons plus un candidat à la présidentielle sur la base de ses promesses. Nous nous demanderons toujours ce qu’il peut cacher derrière la cabesse et quelles manigances il nous prépare. Quel que soit son degré d’intégrité, nous le croirons capable de mensonges. Nous sommes ainsi devenus, malgré nous, des angoissés existentiels et de grands athées de la politique. Au lieu de faire appel à aux règles classiques de gouvernement, on s’en remet aux paramètres insondables de la psychologie humaine. 
Car personne ne peut plus échapper à cette question obsédante : le président de la République a-t-il toute sa tête ? De nombreux exemples se bousculent sous ma plume. La sortie aventureuse sur la place du Christ dans la chrétienté, Serigne Touba qui passait devant la statue de Faidherbe, cette correspondance étrange sur des albinos enterrés au palais de la République, la conversion à l’islam de l’épouse décédée de Karim Wade faite « dans une chambre »… Au lieu de rassurer ses compatriotes, ce qui est le premier rôle d’un chef d’Etat, Abdoulaye Wade les inquiète. Il y a ceux qui rouspètent parce qu’ils ont encore la force de le faire et ceux qui, jusque dans son propre camp, se taisent parce qu’effrayés par ce mégalomane troublé. Monsieur « une déclaration télévisée par jour » a de moins en moins rendez-vous avec la petite lucarne, mais ses déclarations sont de plus en plus choquantes. Même quand il ne se révèle plus, son entourage sait rapporter ses actes les plus intimes. Son ministre du Culte, devenu son porte-parole attitré, a ainsi révélé que l’apôtre du Sopi avait l’heureuse intention de convertir ses « frères » haïtiens à l’islam, pour les sauver de l’enfer. Mais il y a eu auparavant cette idée étonnante de déporter tous les haïtiens au Sénégal, soutenue quand même par « d’éminents » intellectuels. Il a encore récidivé samedi dernier avec cette déclaration surprenante, « je ne salue pas les ministres qui portent des bagues, parce qu’ils ont tous vu été voir des marabouts ». 
A défaut de faire marcher les handicapés, il a demandé à ses ministres d’en recruter au moins deux dans chaque cabinet. Quand on sait que chaque cabinet ministériel compte deux conseillers, un chef de cabinet et un directeur de cabinet, on ne peut qu’être outré par pareille sottise. Le mystique de Kébémer se peut tout faire. Il saute sur n’importe quelle occasion et tombe souvent… dans le vide.
 
Le chef de l’Etat fait montre d’une forme physique remarquable pour son âge, c’est vrai. Mais nous ne l’avons pas élu pour qu’il nous fasse la preuve de son endurance sur les marches des avions. Nous avons choisi un président pour ce qu’il a dans la tête. Or, soyons d’accord sur cela au moins, quelque chose ne va pas chez cet homme. Il fait preuve d’une incapacité notoire quand vient le moment de contrôler ses nerfs, le moins que l’on doit exiger d’un chef d’Etat. De sorte qu’on ne peut plus accueillir ses sorties rocambolesques avec des haussements d’épaules et des « bin ». Il en va de notre devenir en tant que pays et de notre place dans le monde en tant que Nation. Abdoulaye Wade a toujours fait preuve d’une grande sollicitude à l’égard de la France, son premier pays de citoyenneté, et d’une grande admiration pour l’Amérique. Voilà qu’après s’en être injustement pris au conseiller Afrique de Nicolas Sarkozy, il s’attaque violemment à la représentante des Etats-Unis d’Amérique au Sénégal. Il n’a invité la télévision nationale à cette audience impromptue que pour humilier cette brave dame devant le monde entier. Je la revois encore, désarçonnée par la surprise de l’attaque, cherchant ses mots, la tête suspendue à son cou, les yeux écarquillés. S’en prendre aussi violemment à une femme parce qu’elle refuse de se taire est ignoble.
J’ai souffert pour la pauvre Marcia Bernicat. Mais j’ai surtout souffert pour mon pays. Nous ne pouvons pas, en l’espace d’un mois, ouvrir deux crises diplomatiques avec nos deux plus grands alliés dans le monde, la France et les Etats-Unis. Nicolas Sarkozy ne supporte plus sa présence, Barack Obama ne veut plus entendre parler de lui. Par son propre entêtement, Abdoulaye Wade s’est isolé et a entraîné notre pays dans sa schizophrénie destructrice.
J’ai dit dans ces colonnes et répété qu’à maints égards, nous sommes un petit pays. Mais nous étions grands dans l’estime des autres. La grandeur que notre économie n’a pu nous donner, notre diplomatie a pu la conquérir dans le cœur des autres. Notre présence dans les missions de maintien de la paix était saluée dans le monde entier, notre démocratie et notre sens du dialogue montrés en exemple. A défauts d’être craints, nous étions respectés.
Arriva ce politicien de triste réputation. J’ai parcouru le communiqué publié par l’ambassade des Etats-Unis et je ne vois nulle part une quelconque accusation, seulement le rappel de quelques principes chers aux Etats-Unis d’Amérique. Ce que nous devons attendre d’un peuple ami qui nous fait don de 270 milliards de francs, c’est qu’il nous rappelle les règles de démocratie, de transparence et d’imputabilité que nous devons partager en commun. Hillary Clinton, qui a approuvé le contenu de cette lettre avant sa publication, a visité les villages les plus reculés de ce pays pour en connaître l’âme profonde. Elle sait que derrière le sourire enjoué des foules manipulées, se cache la misère des populations déshéritées. Savoir qu’au même moment, Abdoulaye Wade et son entourage se partagent des dizaines de milliards, que Karim Wade se déplace en Jet privé, que le président de la République offre des valises remplies de devises à des fonctionnaires internationaux en fin de mission est choquant. Elle a déclaré il y a bientôt un an, au moment de signer l’accord sur le Mcc, qu’elle portait le Sénégal dans son cœur et veillerait à ce que notre pays demeure l’exemple de démocratie qu’il a toujours été. Nous ne pouvons pas la soupçonner d’inimité. Mais Abdoulaye Wade se prend pour le Sénégal. Tout reproche qu’on lui fait, c’est au Sénégal qu’on le fait. Remettre une mallette de billets à Alex Segura et le reconnaître honteusement dans un communiqué n’est pas une insulte au Sénégal, c’est le dénoncer qui est une insulte. Combien nous en faudra-t-il encore, pour chasser ce vulgaire bandit du pouvoir ? Tous les jours, la presse fait état de ses pratiques délinquantes qui ruinent la crédibilité de notre pays. Des milliards de La pointe de Sangomar à l’affaire Segura, en passant par les milliards de Taïwan et récemment les milliards de Sudatel, il y a dans chaque « affaire » assez de raisons pour envoyer Abdoulaye Wade et sa bande de voyous en prison. Il croyait tromper le monde entier, en confiant ce méga-ministère à son fils pour s’emparer des milliards du Mca. Dénoncer ces pratiques délinquantes ne suffit pas, mais c’est déjà un motif de consolation. Abdoulaye Wade a déjà assis les bases de sa propre ruine. Il n’en sera pas autrement. J’ai été voir le dernier film de Clint Eastwood sur Nelson Mandela, Invictus. J’en suis revenu avec un sentiment étrange. J’étais fier de Mandela, mais j’ai vite pensé à Wade et à sa sortie de route désastreuse.

SJD

 
PS : Aminata Niane, ministre conseiller du président de la République, a été cooptée au Conseil d’administration de la société privée européenne Atos. Ne sont cooptés dans ce Conseil d’administration que des représentants de sociétés d’investissement ayant un grand apport en capital. Le seul africain siégeant à ses côtés, fils d’un ancien chef d’Etat, y a apporté 900 millions d’Euros. Mme Niane y est présentée comme présidente du Conseil d’administration de l’aéroport Blaise Diagne. C’est-à-dire qu’en plus d’être ministre et directrice de l’Apix, ce qui est une illégalité flagrante, elle dirige le Conseil d’administration de l’aéroport de Dias. Etre ministre et membre d’un Conseil d’administration d’une société privée crée un conflit d’intérêt manifeste. Un autre scandale qui pointe à l’horizon.

 



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