La révolution des peuples

Le monde est entré dans une période mutation, une ère est en train de s’ouvrir pour laisser place à une nouvelle dont les rênes seront tenues par une génération caractérisée par une nouvelle conscience. Cette rupture est le fait, non pas de forces politiques ou sociales organisées mais d’un acte isolé et dispersé d’un citoyen devenu célèbre à titre posthume après son auto-immolation en Tunisie. Au-delà des Chefs d’Etat tombés sous la pression populaire, c’est tout une génération d’hommes politiques que les peuples veulent récuser. 

C’est en effet, le crépuscule de tous les professionnels de la politique qui s’affublent de titres de « Responsables, leaders, guides, Pères », toute une génération de septuagénaires à cheveux blancs ou à cheveux teints, qui se croient investis de pouvoir divin de régenter les Etats, les Institutions et les Collectivités locales ad vitam aeternam. C’est le crépuscule d’une gestion archaïque d’une base ou d’un fief politique constitués de militants qui entretiennent avec leurs leaders des relations de larbinisme et de griotisme. Ce sera donc faire preuve de cécité que de croire que la représentativité populaire d’un « responsable politique se mesure au nombre de cars remplis de militants pour remplir un car rien de plus facile que de distribuer des tissus coûtant 200F le mètre, des tee-shirts, des casquettes et des sifflets, en assurant à ceux qui veulent bien monter un sandwich ou 1500F par personnes.

 Les citoyens y voient parfois, un besoin de folklore et un moyen de récupérer un peu d’argent qui leur appartient. La lecture et l’analyse des dernières manifestations populaires spontanées ou organisées, montrent qu’il est entrain de naître une Société civile juvénile, informelle et politique ; une Société civile qui n’a pas de leader mais qui porte en bandoulière et qui cristallise les revendications légitimes. La force de cette Société civile réside dans le fait que n’ayant pas de leader et d’instances structurées, il est quasiment impossible d’acheter sa conscience tel qu’il est loisible de le faire avec des « responsables politiques » ou un Chef de Parti avides de pouvoir et prêts à vendre leur âme au diable. …/… L’autre force de cette Société civile, c’est la modernité de ses méthodes de communication et de propagandes qui rompent d’avec les méthodes archaïques des meetings et autres manifestations folkloriques. Les TIC et la chanson (Rap en l’occurrence) sont devenues les principaux vecteurs de transmissions de messages. 

La 3ème force de cette Société civile est la fertilité du terrain où elle se développe : la banlieue et les zones déshéritées où se retrouvent jeunes intellectuels, jeunes ouvriers, jeunes paysans, jeunes commerçants et jeunes chômeurs partageant au quotidien leur bonheur et leur malheur et « ayant marre » des discours fades et identiques des « responsables politiques » L’ère qui s’ouvre, marquera donc le début d’une revendication populaire sans « grand timonier » « sans guides éclairés » « sans Père de la Nation » mais avec comme seule « force qui va », une conscience collective citoyenne et combative qui réclamera toujours et toujours la liberté, la justice, la gestion transparente et équitable du bien public. Il n’y a aucun crime à contester l’usage qui a été fait de l’alternance ; il n’y a non plus aucun mal à fêter cette alternance qui est un acquis du peuple né de vingt cinq (25) ans de lutte, d’une opposition contre un pouvoir de quarante (40) ans, qui a fini par accepter les conditions juridiques, démocratiques et électorales d’un changement. 

Cependant, les dirigeants de ce pays qui ont cette alternance en bandoulière ne doivent pas avoir comme défi de se maintenir quarante (40) ans au pouvoir. Ils peuvent s’y maintenir autant que faire se peut mais en inculquant à leur peuple la culture de l’Alternance, c'est-à-dire l’amener à cogiter, à intérioriser et à s’approprier cette réflexion du Général De Gaulle qui disait que les cimetières sont pleins de gens qui se croyaient indispensables ; et cet homme croyait si bien en cet adage que pendant ses congés, il se retirait dans son petit village de Colombés les deux Eglises en demandant à l’administration des postes de sectionner les fils de son téléphone. Mandela est une autre matérialisation personnifiée de cet adage. L’Alternance doit concerner le sommet de l’Etat, les Institutions de la République (Assemblée Nationale, Sénat, Conseil Economique et Social) et les Collectivités locales. Au-delà de l’Etat c’est toutes les structures associatives (Partis politiques, Syndicats, Mouvements…) qui doivent inculquer à leurs membres cet esprit d’alternance si elles ne veulent pas succomber à la sclérose ou développer en leur sein des contradictions internes portant des stigmates de leur propre destruction.

 Que tous les hommes politiques se le tiennent pour dit : c’est le crépuscule des « demi-dieux » et c’est dans le clair-discours de ce crépuscule que s’envolera l’oiseau de Minerve portant sur ses ailes écarlates les peuples assoiffés de justice et déterminés à jeter leurs implacables anathèmes sur les déprédateurs de la société et les fossoyeurs de la Démocratie. La paix sociale et le développement sont tributaires de la mise en œuvre des principes de la démocratie et de la gestion équitable des ressources nationales (Ressources financières, Ressources naturelles, Ressources Humaines) A bon entendeur – salut ! Que Dieu bénisse ce pays, ce peuple et leur accorde sa Grâce et sa Miséricorde