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Le besoin d'innover en entreprise Par Mouhamed M. LOUM

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Le besoin d'innover en entreprise Par Mouhamed M. LOUM

 Est-il pertinent de disserter sur le besoin d’innover dans un pays où les populations ont su prendre leur destin en mains pour faire partir le Président de la République à deux reprises et en l’espace de douze ans ? Derrière le changement d’hommes, se trouve sans doute le besoin inextinguible de changement de leadership, de management, de méthode… et d’organisation fonctionnelle de l’Etat et de ses démembrements.

 

Cette deuxième alternance (si le terme est approprié) est à saisir par le monde du travail pour amorcer une nouvelle approche pratique et réaliste du développement, essentiellement axée sur l’homme en entreprise. L’homme étant la ressource des ressources doit être le pilier de soutènement de tout projet de société viable, de son élaboration à sa mise en application jusqu’à son parachèvement.   L’entreprise étant la voie idéale de développement de la communauté, puisqu’étant le facteur par excellence de création d’emplois et par conséquent, de richesse.

 

Le besoin d’innover en entreprise passera en premier lieu par la sociabilisation des rapports entretenus en milieu professionnel. L’opérateur qui fait un certain temps dans un poste de travail développe naturellement un sentiment d’osmose avec les différents outils et matériels de son poste de travail. Des conducteurs d’engin ont fini par donner leur nom à leur outil de travail tout comme l’inverse est courant, on a souvent  confondu le matériel à son utilisateur ou metteur au point. S’il est possible d’avoir une telle relation fusionnelle entre l’homme et la machine, les relations professionnelles gagneraient à être teintées d’une forte coloration humaine. Qu’il s’agisse de celles entretenues par l’employeur et les travailleurs ou entre travailleurs eux-mêmes. Alors le directeur des ressources humaines ou le chef du personnel n’auront plus besoin d’agir en automate devant gérer de la matière comptable, mais penseront toujours et en premier lieu à traiter le personnel avec correction et considération.  « La gestion des hommes est une question d’égard ».

 

Le besoin d’innover c’est amener l’employeur à habiliter désormais les instances et toutes les instances représentatives des travailleurs à jouer convenablement leur rôle. A ce sujet le Comité d’Hygiène et de Sécurité peut remarquablement suppléer l’employeur sur la prise en charge des questions liées à l’hygiène, la santé, la sécurité et même l’environnement. L’entreprise doit être un endroit vivable, convivial et agréable. Nous passons plus de temps à nos lieux de travail que chez nous. En outre, on n’entre pas en entreprise pour y être persécuté, stressé à longueur d’année ou laissé à la merci des accidents du travail et maladies professionnelles pour en ressortir peu après impotent ou invalide.  Bien au contraire on entre en entreprise pour y évoluer allègrement jusqu’à la retraite et au-delà, sentir le devoir pesant de revenir accompagner la relève en tant que personne ressource.

 

De même si les membres de l’institution des délégués du personnel sont impliqués dans la gestion de l’entreprise et suffisamment informés sur la santé financière de la boîte, il leur échoira de droit non pas la redoutable mission de gérer les conflits (ou d’en être à l’origine), mais mieux, celle d’anticiper, de prévenir et d’asseoir au sein de l’entreprise un climat social serein gage de toute productivité.

 

Le besoin d’innover en entreprise se fera nécessairement sentir dans la prise de mesures disciplinaires. La propension à sanctionner tout venant ou infliger une mesure disproportionnée par rapport à une peccadille édifie d’abord sur l’état d’esprit de celui qui prend les décisions avant de saper l’organisation où se trouve le travailleur mis en cause. Respecter et faire respecter scrupuleusement les normes et dispositions réglementaires en entreprise  se feront après des séances d’imprégnation et d’explication au- delà desquelles on aura la latitude d’appliquer la loi dans toute sa rigueur.

 

L’environnement de l’entreprise ne se limite pas seulement au respect de la faune et de la flore des entours, mais doit prendre en considération les attentes des populations habitant les localités environnantes. De plus en plus les collectivités locales s’insurgent contre l’installation d’entreprises et pour cause. Les dommages et désagréments qu’elles subissent sont sans commune mesure par rapport aux retombées auxquelles elles sont en droit de s’attendre.

 

Même si la loi dit de manière explicite qu’ « à qualification égale la priorité d’embauche revient à la main d’œuvre locale», il suffit d’un minimum de volonté pour faire d’un manœuvre sans compétence aucune un opérateur qualifié. Des expériences tentées ailleurs sur une trentaine de belles de nuit ont été fort concluantes.  Non seulement elles ont été retirées pour de bon de la pègre, mais au bout de trois mois de formation pratique on ne les reconnaissait plus sur le terrain  par rapport aux travailleurs spécialisés.

 

Ces différents aspects peuvent être pris en compte par les promoteurs et porteurs de projet d’étude d’impact environnemental et social pour vaincre toute réticence venant des populations. S’ils sont articulés autour d’une bonne politique de communication qui ne reculera devant aucun détail cru au vu de l’exigence de transparence sur tout le processus de recrutement, l’Inspection du Travail n’aura plus besoin de jouer aux sapeurs-pompiers en gérant des crises cycliques, mais gagnera toujours un précieux capital de temps à investir sur des créneaux beaucoup plus rentables. Et tout le monde évitera désormais les heurts et frictions qui débouchent toujours sur des issues malheureuses.

 

Par ailleurs, la capacitation et la formation continue des travailleurs et singulièrement de leurs représentants feront de chaque travailleur un partenaire de choix, quelque soit sa coloration syndicale. Si nombre d’employeurs continuent à avoir peur des syndicats au point de refuser catégoriquement leur présence en entreprise, c’est parce que les relations ont du mal à s’analyser en terme de partenariat où chaque entité viendra avec un apport à consolider, aussi minime soit-il. A cet effet l’Administration du Travail peut dans sa politique d’accompagnement des entreprises intéresser conséquemment au programme de formations qu’elle propose les délégués du personnel, les membres de la direction, les leaders non élus parmi les travailleurs (en raison de leur influence), les partenaires extérieurs (syndicalistes), et au besoin faire appel à des compétences extérieures.

 

Faut-il le souligner, l’expérience a montré que l’irresponsabilité ne vient pas que des travailleurs. Il résulte de l’analyse des relations conflictuelles en entreprise qu’au-delà du complexe de supériorité tantôt nourri et différemment manifesté, la non maîtrise de la part de l’employeur ou des membres de la direction des textes réglementaires et législatifs occupe une bonne place dans le faisceau des facteurs de perturbation de la vie des entreprises. C’est déjà suffisant pour les intéresser au même titre que les travailleurs, aux séances de formation et surtout d’apaisement social qui se tiennent dans le milieu du travail.

 

Les heureuses occasions qui réunissent employeurs et travailleurs et où on fait volontiers impasse sur les revendications ont toujours un effet positif immédiat sur la vie de l’entreprise. A défaut d’en avoir régulièrement il serait souhaitable de prévoir une fête annuelle au sein de chaque entreprise en laquelle certains seront proposés comme référence eu égard à leur comportement modèle. La promotion du dialogue social passe par une connaissance mutuelle des uns et des autres vers un raffermissement des liens. On peut se côtoyer à vie sans se connaître.

 

Le cercle de partenariat peut infiniment être élargi (médecine, service d’hygiène ou de l’environnement, sapeurs pompiers…), pourvu que le plein épanouissement du travailleur dans une atmosphère sociale qui incite à la compétitivité soit l’objectif de tous. La motivation est un concept auquel il faut donner un contenu. Elle est en relation étroite avec le comportement managérial responsable qui est de mise en entreprise, en interne comme en externe.

 

Qu’adviendrait-il du champ social si les syndicats de tous les secteurs convenaient de signer un pacte de stabilité sociale avec le nouveau pouvoir ? Ce dernier accepterait volontiers de les accompagner durant le quinquennat. Les objectifs fixés ensemble et qui seront graduellement évalués n’auront plus un caractère simplement alimentaire mais tourneront autour d’une meilleure protection du travailleur, de l’élargissement de la couverture sociale, davantage de capacitation… Le Sénégalais qui évoluera dans une atmosphère de travail aussi sécurisée aura enfin la hardiesse d’entreprendre ou du moins n’aura plus à entrevoir la retraite avec beaucoup d’appréhensions.

 

L’accompagnement des pouvoirs publics  se fera sans occulter l’impérieuse nécessité concernant les nouvelles autorités de se tenir à égale distance des différentes structures syndicales. Un traitement juste et équitable évitera le prolongement de la liste de syndicats déjà trop longue (et dont certains n’existent que de nom) mais aura surtout l’heur de mettre les partenaires en confiance. La crédibilité de l’autorité centrale découragera de facto tout éventuel fantaisiste à aller ramasser trois pelés et un tondu  pour en faire une centrale syndicale, la coltiner, pour ensuite chercher des syndicats de base.  Du coup nous participerons tous à décongestionner l’Administration.

 

Entre autres avantages, un tel comportement serait de nature à donner une nouvelle inflexion aux rapports qu’entretiennent les syndicats ou les centrales syndicales. Au lieu de se regarder constamment en chiens de faïence avec l’échéance des élections de représentativité comme point de mire, chaque structure syndicale se fera un point d’honneur d’avoir fait montre de plus de citoyenneté, de plus de patriotisme. La logique concurrentielle ne consistera plus à être critique et corporatiste au point d’être aveugle devant l’intérêt général, mais d’être critique et constructif.  

 

Du reste on rompra spontanément avec certaines attitudes viciant les négociations collectives où la franchise et la transparence seront traduites en langage de vérité. Aucune autorité n’aura plus besoin de signer hic ad nunc un engagement pour faire l’actualité ou sauver provisoirement une situation qui irréversiblement se reposera avec plus d’acuité. Il est bien possible de dire ce qu’on peut faire sans chercher à plaire  et refuser ce qu’on ne saurait faire sans heurter. Cette nouvelle conception des relations de partenariat soustrait de prime abord  les décideurs à la logique infernale et implacable du lobbying.

 

Pourvu que la nouvelle équipe gouvernementale qui se fait fort d’asseoir avec ses alliés une « gouvernance sobre et vertueuse » élargisse le cercle de partenariat aux acteurs et promoteurs du développement de l’entreprise  (syndicalistes, employeurs, travailleurs…) et que ces derniers acceptent de les accompagner dans cette aventure et à y aller avec eux le plus loin possible avec des idées et des réflexions de plus en plus novatrices. Alors la pirogue voguera et tanguera lentement mais sûrement vers les îles de la croissance et de la prospérité.


 


                                                                        Mouhamed M. LOUM


                                                                                IRTSS / THIES



1 Commentaires

  1. Auteur

    Bill

    En Octobre, 2012 (19:38 PM)
    Mor tu as bien cerné la chose...tu ferais un grand prof de gestion de personnel

    Bonne continuation

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