Jeudi 28 Mars, 2024 á Dakar
Vendredi 01 Juin, 2018 +33
Contribution

Niasse : L'esprit et la lettre de la République (Par Aliou Sall)

Single Post
Niasse : L'esprit et la lettre de la République (Par Aliou Sall)
Une grande page d’histoire de notre pays se tourne avec la décision de Moustapha Niasse le Président de l’Assemblée Nationale de se retirer du champ politique. Pour ma génération qui a grandi sous son ombre, cette longévité force l’admiration et constitue véritablement une leçon de viesinon un art de vivre la cité : celui de faire de la politique en s’évertuant autant que possible de ne pas se défaire des éléments constitutifs de la noblesse de cette activité. 

Moustapha Niasse est ce miroir qui renvoie aux générations,actuelle et à venir, leurscarences objectives, leurs errements et malgré tout, leurs espoirs encore tangiblespour transformer en destin abouti lesleurres pernicieux, les gloires éphémèreset les sorties de route inopinées pouvant jalonnerle chemin restant à parcourir.

A l’entame de la rédaction de ce texte,nous nous sommeslogiquement demandé par quel bout prendre cet itinéraire exceptionnel, ce long fleuve pas toujours tranquille vers le Panthéon des grands hommes de notre pays, de l’Afrique et du monde. 

De l’enfant prodige de KeurMadiabel éduqué à bonne école, au serviteur acharné de l’Etat qui conjugue le niveau d’exigence au plus que parfait, en passant par le politique connu et reconnu de par le monde pour sa fibre patriotique ; entre rencontres mémorables, postures épiques, prises de position et de parole intransigeantes sur les principes ;le curseur balance entre le viatique pour les contemporains et les balises pour les générations futures. A n’en pas douter, le parcours de cet homme défie le temps et offre des leçons pour l’éternité.

Pouvait-il en être autrement quand on se prénomme Moustapha, autrement dit l’Elu, le prédestiné. L’onomastique nous enseigne que le nom ou le prénom n’est jamais tout à fait étranger à la personnalité de l’individu. Je cite, concernant Moustapha :
« Il a la tête bien vissée sur ses épaules et les pieds sur terre. Mustapha fait toujours en sorte de planifier et d'organiser sa vie. Ainsi, son parcours est tracé, ses idées sont claires, tout comme ses ambitions dans la vie. Il ne laisse jamais ses émotions le submerger, et reste maître de lui-même, quelles que soient les circonstances. C'est un homme digne de confiance, et ne manque jamais de le prouver. Inébranlable, Mustapha reste toujours lucide, même en cas d'échec, personnel ou professionnel. Son engagement et sa dévotion sont toujours exemplaires. Mustapha se démarque par sa vaillance qui en dit long sur son caractère. Il sait être drôle et volubile ; sa compagnie offre de grands moments de plaisir ».Tout est dit.

En l’occurrence, nous parlons ici d’un homme multidimensionnel, un personnage hors du commun du landerneau politique sénégalais du moment, dont le moins que l’on puisse dire, est qu’il renverse littéralement les codes et fonce tête baissée à l’assautdes valeurs et repères traditionnels, toutes ces bonnes fées en définitive, qui se sont toujours penchées avec grâce et indulgence sur le berceau du Sénégal en devenir. 

L'histoire de notreRépublique stricto sensu,y compris celle des Républiques forgées au fer rouge des alternances fièrement exhibées à la face du monde, faites de recompositions permanentes, de renaissancesspectaculaires et de reniements sans détour, cette histoire-là cependant sait reconnaître les siens, tous ceux et celles-là qui ont contribué à lui donner corps,à veiller soigneusement sur elle contre vents et marées, à l'alimenter enfin de leurs intelligences, dans la forme comme dans le fond. Parmi ces vigies qui vouent à la République un respect quasi religieux, on peut sans risque de se tromper, placer tout en haut de l'échelle Moustapha Niasse,l'actuel Président de l'Assemblée Nationale. 

Il constitue un exemple édifiant de précocité dans la conduite des hommes et de maitrise des dossiers les plus sensibles par sa connaissance aigüe des arcanes de l’Etat et du monde politique.

Au cœur de cette relation fusionnelle, difficile d’imaginerque notre futur retraité parvienne un seul instant à échapper à sa nature profonde, ou encore aux sollicitations de l'Etat et de la République qui savent pouvoir compter chaque fois que de besoin, sur son soldat, défenseur infatigable de leurs positions les plus avancées. 

Ancien capitaine de l’équipe de Football junior du Lycée de Saint-Louis,ancien Président de l'Union nationale des Etudiants du Sénégal,ancien Président du Secrétariat national pour les Jeunes et pour la Formation pratique de l'Union progressiste sénégalaise (UPS), ancien membre du Bureau politique de l'UPS devenue Parti Socialiste, en qualité de Secrétaire national chargé de la Vie politique du Parti, Major de la promotion André Peytavin de l’École nationale d’administration (ENA) du Sénégal,Directeur de cabinet du Président Senghor dont nul n’ignore la rigueur et le sens de l’organisation et de la méthode au point de l’ériger en Bureau dans l’antre de la Présidence de la République.

C’est dire si le jeune énarque a de qui tenir ! Comment imaginer que cette mine de savoir, de savoir-faire et de générosité à l’endroit de la République puisse du jour au lendemain couper les amarres avec à la fois l’appeldu devoirvis-à-vis de l’Etat qui ne connait jamais de répit, et son amour charnel pour la Républiquechevillé au corps ?

Son esprit fécond et toujours en éveil saura-t-il se mettre définitivement au-dessus des contingences républicaines et politiques ?
Rien n’est moins sûr.

Et pourtant qui ne lui souhaite pas de goûter enfin au plaisir d’écouter et d’entendre la doucemusique d’une retraite bien méritée, au milieu d’une famille qui n’a pas souvent eu l’heur de profiter de la présence à ses côtés de ce citoyen du monde ?

Moustapha Niasse a grandi avec le Sénégal indépendant en tant qu’homme tout court d’abord, puis a gravi les échelons comme Haut fonctionnaire de l’Etat, eta puisé enfin des ressources insoupçonnables dans le militantisme politique aux seules fins de se rendre utile à un pays confronté aux urgences entrouvertes par son accession à la souveraineté internationale. Avec abnégation toujours, la force de la conviction souvent puisque c’est son ADN qui le commande, et ce brin de réussite propre aux esprits éclairés qui savent se préparer pour être au bon endroit au bon moment.

Beaucoup d’hommes et de femmes valeureux ont traversé les Républiques qui se sont succédé depuis les indépendances, consacrant à celles-ci la quintessence de leur jeunesse ou de leur âge mûr. Très peu pourtant d’entre ces fils et filles du pays l’auront fait avec un égal bonheur comme Moustapha Niasse qui, dans sa grandeur d’âme,a mis sous le boisseau une ambition justifiée et légitime afin que les institutions n’en pâtissent pas et qu’elles puissent dès lors survivre aussi bien aux hommes et femmes quels que soient leur charisme et leur intelligence politique, d’une part, et aux contingences politiques quelles que puissent êtreleur forme et leur acuité d’autre part. Et si la politique apu altérer le bons-sens et l’esprit de discernement d’un bon nombre d’acteurs dans leur parcours politique, elle n'a jamais pu prendre à défaut l'homme d'Etat Moustapha Niasse.« Le politicien pense à la prochaine élection, l’homme d’Etat à la prochaine génération » disait avec beaucoup d’à-propos James Freeman Clarke à l’instar d’autres penseurs. 

Il ne croyait pas si bien dire. 

Voilà Niasse dans sa réalité crue. Il pensait à bon droit faire tout juste de la politique, s’investir pour la Cité. Comme le bon monsieur Jourdainperdu entre prose et poésie, peut-être ne s’était-il même pas rendu compte qu’il avait enjambé depuis bien longtemps les frontières de la politiqueetque ses actions de tous les jours portaientl’empreinte d’un homme d’Etat accompli, contribuant ainsi à donner encore plus de sens et de force à la République et à l’Etat.

Le mal de notre siècle est que la magie des nouvelles technologies pousse beaucoup d'hommes et de femmes à prendre des raccourcis et à s’autoproclamer maladroitement hommes d'Etat sans donner du temps au temps,sans non plus en connaitre ni les servitudes ni les responsabilités, encore moins réunir les qualités requises pour faire partie du lot des élus et dont la première repose sur la primauté de l’Etat sur les velléités messianiques. 

Moustapha Niasse, en ce qui le concerne peut à bon droit s'enorgueillir de faire partie des rares privilégiés à se retrouver au sommet de la pyramide, à tutoyer les cieux, à cocher toutes les cases. Mais en grand seigneur qu'il est, tout porte à croire qu'il préfère le silence de ceux qui savent au bruit assourdissant de tonneaux vides de ceux-là qui s'époumonent à se prendre pour ce qu'ils ne sont pas. 

En effet, pour signer un bail aussi long avec la République et les Républiques sorties de ses flancs, il faut donner à celle-ci et à celles-là, des gages de compétence, un sens élevé des responsabilités et une ouverture d’esprit au-dessus de la norme. 

Moustapha Niasse n'a jamais pensé qu'il détenait une science infuse ou une baguette magique capable de lui faire sauter les étapes pour apprendre et assimiler avant même de se connaître et de connaîtreses forces et ses faiblesses. Or donc comme le dit l’adage, « le paradoxe de la force, c'est d'être capable de connaître ses faiblesses ». C’est sur ce postulat que Moustapha Niasse tire sa force. Parce qu’il atrès tôt mesuré l’aléatoire du décret des hommes devant celui de Dieu, « maître des temps et des circonstances » ; parce qu’il a tôt fait de mesurer également ce que signifiait son humble personne face au destin d’un peuple ; parce qu’il sait enfin que la perfection n’est pas de ce monde ; il a fait de l’ambition jamais démentie mais toujours drapée d’une forte dose d’humilité, de travail et de temps donné au temps, les clés pour s’ouvrir les portes de l’histoire.

Voici ce qu’il disait lors de son Appel du 16 juin 1999 inscrit dans les mémoires :
« …J'ai servi mon pays, avec disponibilité, du mieux que j'ai pu et jusqu'à la limite des conditions dans lesquelles j'ai exercé les responsabilités et assumé les charges que j'ai occupées. Je sais que d'autres sénégalais, avant ou en même temps que moi, ont servi avec le même dévouement, la cause de notre pays. Demain, d'autres le feront… J'ai toujours considéré que toute forme de succession à la tête de l'Etat, qui exclurait, directement ou manquerait les procédures du suffrage universel, est totalement condamnable. Le jour où les Sénégalais et leurs dirigeants auront, ensemble, des destins croisés, le pays sera sauvé… Il y a un temps pour tout : un temps pour la réflexion, un temps pour le travail »  

…Aujourd'hui, aucun homme seul, ni aucun parti politique ne sauraient se vanter de pouvoir relever, de manière exclusive, tous les défis qui nous interpellent. Ce n'est qu'unis dans la diversité et dans le libre choix des programmes de redressement, que le Sénégal parviendra à faire face à la situation. 

…A mes parents, à mes amis, aux personnes qui me sont chères, je laisse l'entière liberté de choisir, en toute conscience, face à cette décision. Parce que je leur reconnais la libre pratique de leurs droits de citoyen, le droit de m'accompagner dans mon combat ou celui d'évoluer dans un autre cadre ».

Comme on dit, le plus durn’est pas d’arriver au sommet, mais plutôt d’y rester. Cette longévité n’est pas le fruit du hasard. Cette invite en est la parfaite illustration.Elle daterait d’aujourd’hui, que personne n’y trouverait à redire. C’est ce qui fait la force des visionnaires.

« Lou yaagg, dëgglë »selon la sagesse populaire.A ce grand monsieur, trésor vivant de la République, rien n’est de trop pour lui manifester une reconnaissance qui transcende les générations,à l’instar de l’ensemble de son œuvre.

ON EN PARLE

Banner 01

Seneweb Radio

  • RFM Radio
    Ecoutez le meilleur de la radio
  • SUD FM
    Ecoutez le meilleur de la radio
  • Zik-FM
    Ecoutez le meilleur de la radio

Newsletter Subscribe

Get the Latest Posts & Articles in Your Email