Quelle que soit la stratégie politique, les calculs politiciens, on ne joue pas avec les icônes d’un peuple, fussent elles des adversaires politiques.
Re-Source / Sununet (Rencontre des Sénégalais Pour une Organisation Utile des Ressources de la Communauté des Expatries)
Re-Source / Sununet [1] sort de sa réserve habituelle pour apporter tout son soutien à son Président d’Honneur Amadou Mahtar Mbow, dans son action pour le renforcement de la démocratie Sénégalaise, notamment dans l’organisation des Assises Nationales. Notre organisation, pour des raisons statutaires, n’a pas voulu participer en tant qu’entité collective aux assises nationales, mais ne peut pas tolérer que des membres de sa « famille » soient injustement attaqués. Re-Source Sununet regrette que des menaces plus ou moins voilées soient destinées à ses figures citoyennes comme Monsieur Mbow.
Au fond que reproche t – on à Amadou Mahtar Mbow ? Le fait d’accepter de contribuer au dialogue national ? Comment des enfants d’un pays où l’on valorise des figures d’intermédiation (marabout, oncle, sœur, frère, voisin), en cas de conflit, de méfiance, ou de défiance, peuvent ils refuser le dialogue ? Comment des personnes qui n’ont aucune empreinte historique sur notre nation, peuvent –elles se permettre de ternir le passé de grands hommes qui ont déjà fait leurs preuves sur plan national et international ? Dans d’autres pays, ces grands hommes sont célébrés comme des héros.
Ceux qui profèrent ces menaces, sont-ils des Chiens de Garde, des Gardiens du Temple, ou des Gardiens du Palais des Morts? Q’importe ! De toute façon, malgré leurs fonctions, statuts et identités dans l’establishment, ils n’ont pas la culture nécessaire pour saisir toutes les nuances et la puissance métaphorique, romantique et conceptuelle de ces expressions. L’essentiel est qu’ils sachent que notre peuple ne peut tolérer leurs menaces !
Faut-il rappeler que Amadou Mahtar Mbow a été de tous les combats de l’Afrique dans la seconde moitié du 20ème siècle. Et que sa vision paradigmatique sur les nouvelles technologies de l’information (nouvel ordre de l’information et de la communication en 1976) nourrit en ce 21ème siècle des débats sur le développement. L’engagement politique de Amadou Mahtar Mbow ne date pas d’aujourd’hui. Il a connu autant les bruits des bottes que ceux des canons. Engagé dans les forces françaises en 1940, ils sera libéré en 1942 après avoir frôlé la mort et la prison. Cet homme courageux se réengage volontairement dans l’armée française en 1944 pour le triomphe de la liberté. Ancien combattant comme Senghor, il a été en première ligne pour la lutte pour l’indépendance des pays africains. Etudiant, il est membre fondateur de la FEANF (Fédération des Etudiants Africains de France). Enseignant, puis ministre du Gouvernement de la loi Cadre, il s’est opposé à De Gaulle. A l’indépendance du Sénégal, il a lutté contre et avec Senghor (qui dans sa grandeur lui vouait beaucoup de respect). Devenu président de l’Unesco, il a mené une résistance acharnée contre le déploiement du néolibéralisme mené par Margaret Thatcher et Ronald Reagan. Dès lors, comment un tel lion pourrait-il être impressionné par de jeunes hyènes ?
Pour nous, Amadou Mahtar Mbow incarne comme ses amis (Kéba Mbaye, Cheikh Hamidou Kane, Cheikh Anta Diop, Abdoulaye Ly, Assane Seck, Mamadou Dia), le modèle, sinon le symbole de la figure citoyenne. Le défier, c’est s’attaquer à la veine jugulaire du corps social sénégalais. En effet, ancien instituteur, professeur, inspecteur, ministre, l’homme connaît sur le bout des doigts le Sénégal. De Rosso à Ziguinchor, du Foutah au Fouladou, de Saint Louis au Balanta Kunda, du Djollof au Casa, en passant par le Saloum et le Cabada, il a travaillé aux côtés des populations sénégalaises.
Allez donc lui demander de vous expliquer l’histoire, la sociologie et la culture de notre pays, et vous vous rendrez compte qu’il est une encyclopédie. Il vous expliquera la complexité de nos systèmes sociaux et symboliques. Vous apprendrez, par exemple, que celle qu’on appelle la Reine d’Efok, est aussi agricultrice, mère, sœur et prêtresse. Mais, ne vous arrêtez pas là, demandez-lui aussi, quel rôle de conciliateur il a pu joué sur la scène internationale, notamment, dans la libération des otages américains à Téhéran1.
Vous serez également surpris d’apprendre qu’il a été le premier à donner un prix à Nelson Mandela considéré, à l’époque, comme terroriste par certaines puissances occidentales.
Parlez avec lui du Coran, de la musique, vous serez ébahi. Savez-vous qui a permis d’écrire l’histoire générale de l’Afrique ? C’est Amadou Mahtar Mbow. Savez-vous qui a donné une tribune internationale à Cheikh Anta Diop, alors qu’il était très isolé par beaucoup de ses compatriotes ? C’est Amadou Mahtar Mbow. Et qui a donné à des villes comme Gorée, le titre de patrimoine historique mondial ? Amadou Mahtar Mbow.
Allons ! Arrêtons ! La liste serait trop longue. Demandez juste à ses amis, paysans du Cayor, de la Basse Casamance, ou intellectuels, décideurs du monde, qui est cet homme. Vous serez surpris de l’immense considération et de respect dont il est l’objet. Si Amadou Mahtar Mbow a bénéficié de cette admiration quasi-unanime, c’est parce qu’il est capable d’effectuer une approche dialectique entre le particulier et l’universel, le local et le global, l’identique et le différent.
Si les Assises Nationales du Sénégal consistent à réfléchir sur les problèmes de notre société et proposer des orientations claires, alors, il n’y a pas une figure plus appropriée que Monsieur Mbow pour la présider. A Re-Source / Sununet, nous nous posons les questions suivantes :
Comment l’ état peut soutenir l’unité des contradictions (tradition/modernité,) ? Quelles sont les sources d’inefficience de l’économie sénégalaise ? Quels secteurs économiques à valoriser ? Comment des pays et des peuples affaiblis, vulnérables, dont le développement est à construire avec l'assistance de ses enfants, vont-ils aborder ce siècle ? Comment encourager le peuple à réinvestir les dimensions d'un quotidien qui ne se résume pas à des considérations matérielles ? Que faire lorsque l’éthique ne guide plus les actions, les décisions, la volonté de certains dirigeants politiques ? Que faire, lorsque la globalisation ou l’ultra-modernité morcelle le corps social ?
Le traitement de ces paradoxes, exige une démarche qui se fonde non seulement sur la pensée philosophique, juridique, scientifique et économique, mais aussi, qui s’appuie sur la pensée socio-anthropologique, et historique africaine.
Sans doute, les Assises Nationales effectueront un examen clinique des symptômes de la République. Nous espérons que l’on réfléchira sérieusement sur l’importance et l’imbrication de la mémoire, du corps social et de l’éthique pour l’harmonie sociale.
La démocratie est une combinaison complexe de libertés et de justices sociales qui dépend de la volonté des citoyens. La démocratie peut être colorée d’émotions, de discours, de prières, mais sa logique est celle de l’expression des libertés. La logique de la démocratie est celle du dire, du faire dire, non seulement des convictions des citoyens mais aussi de la raison. Qui pourrait mieux que Amadou Mahtar Mbow, décrypter dans les reprises ou répétitions dramaturgiques de la démocratie, les demandes et les exigences de la liberté ? Figure des luttes politiques, il nous apprend à être courageux et nous donne de l’espoir. L’homme a été acteur des événements fondateurs de la démocratie au Sénégal qui a conduit à l’instauration de l’ordre présent. Comme citoyen libre, il sait que la démocratie n’est pas la liberté mais permet de faire jouer la liberté.
Si, comme nous le croyons à Re-Source Sununet, la démocratie n’est jamais étrangère aux enjeux de la vie, aux urgences du quotidien, aux malheurs et aux bonheurs des êtres, alors, ce qui se donne à voir aujourd’hui dans les Assises Nationales, est une tentative de « recollement » du morcellement du corps social, un désir de contribuer à la continuité vitale de notre nation, et une tentative de réaffirmation de notre culture que la crise économique a plus ou moins rompue. Rappelons-le, pour que la démocratie fonctionne, il faut que les institutions soient investies, crues, aimées en ses symboles.
Nous sommes conscients que ces Assises Nationales feront l’objet de tentatives de « récupérations » par certains partis politiques ou individus, mais cela ne doit pas nous décourager d’apporter chacun à titre individuel sa e pierre à l’édifice.
Les « roquets » devraient retourner à leur niche, car certains d’entre nous sont déjà suffisamment agacés, et leurs aboiements ne feront que nous énerver davantage et c nous pousser peut-être à prendre des décisions qui pourront s’avérer humiliantes pour eux.[2].
Le Conseil Exécutif Global de Re-Source Sununet
En italique, terroirs du Sénégal
[1] RE-SOURCE (Rencontre des Sénégalais pour une Organisation Utile des Ressources de la Communauté des Expatriés) est une association de la Diaspora Sénégalaise qui a entre autres comme objectifs de renforcer et de fonder des systèmes de solidarité entre Sénégalais non seulement dans notre lieu de résidence mais aussi au niveau global (mondial).
[2] Certains membres (juristes, fiscalistes) de la Diaspora Sénégalaise proposent de réfléchir sur l’opportunité ou non de déclencher des enquêtes et poursuites contre ceux qui investissent les ressources du Sénégal dans nos pays de résidence (notamment en Europe et Amérique).
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