Jamais deux sans trois. Voire plus… Après le Burundi et l’Afrique du Sud la semaine dernière, la Gambie a annoncé, dans la nuit de mardi à mercredi, son retrait de la Cour pénale internationale (CPI). Reprenant des critiques régulièrement entendues sur le continent, le ministre de l’Information gambien a justifié cette décision en accusant la Cour de « persécuter les Africains » lors d’une déclaration télévisée.
Kenya, Ouganda, Namibie… D’autres pays pourraient désormais suivre cette voie faisant craindre un risque sur la crédibilité de cette juridiction pénale permanente chargée de juger les personnes accusées de génocide, de crime de guerre ou de crime contre l’humanité. 20 Minutes a décidé d’instruire le dossier pour tenter d’y voir clair…
La décision de la Gambie est-elle surprenante ?
Oui, à deux titres. Tout d’abord parce que l’actuelle procureure générale de la Cour pénale internationale n’est autre que la Gambienne Fatou Bensouda, ancienne ministre de la Justice de l’actuel président de ce petit pays d’Afrique de l’Ouest.
La procureure de la CPI Fatou Bensouda, à Tbilisi le 16 octobre 2015 - VANO SHLAMOV AFP
Mais surtout parce que les autorités gambiennes ont retourné leur veste en quelques mois. En mai, dans une interview à Jeune Afrique, le président gambien avait en effet défendu la CPI. « Le job [de Fatou Bensouda] est difficile et, contrairement à ce que j’entends, la CPI ne vise pas spécialement l’Afrique. » La nuit dernière, les autorités ont pourtant justifié leur retrait en expliquant que la Cour « persécutait les Africains » et refusait de poursuivre les dirigeants occidentaux coupables, selon elles, « de crimes de guerre odieux ».
La CPI ne s’en prend-elle qu’aux pays africains ?
Sur les dix enquêtes instruites en ce moment par la Cour pénale internationale, neuf concernent des pays africains. La dixième enquête, ouverte de sa propre initiative en janvier, porte sur la guerre ayant opposé la Géorgie à la Russie en Ossétie du Sud en août 2008.
Les principaux dirigeants poursuivis devant la CPI - AFP
Mais outre les enquêtes officielles, la CPI instruit également dix dossiers en « examen préliminaire ». Afghanistan, Colombie, Ukraine, Palestine : à cet échelon procédural, la CPI a largement élargi ses investigations au-delà de la seule Afrique.
Quels « dirigeants occidentaux » la Gambie vise-t-elle dans son accusation ?
Le ministre de l’Information gambien n’en a cité qu’un seul. Il s’agit de Tony Blair. La Gambie aurait souhaité que la Cour pénale internationale le poursuive pour sa responsabilité lors de l’invasion de l’Irak en 2003. Publié juste avant l’été au Royaume-Uni, le rapport Chilcot a clairement pointé du doigt les « mensonges » de l’ancien locataire du 10 Downing Street à ce propos.
Il n’est pas trop tard pour le poursuivre. Le dossier « Irak/Royaume-Uni » est l’un des dix que la CPI a placé en « examen préliminaire » pour des soupçons de « crimes de guerre prétendument commis (…) lors de l’occupation de l’Irak de 2003 à 2008. »
Professeurs en droit public, Serge Sur et Julian Fernandez invitent la CPI à suivre cette voie. « L’occasion est belle de rappeler que la justice doit être universelle et pour la CPI d’affirmer qu’elle ne supporte aucune pression et n’est coupable d’aucune discrimination », écrivaient-ils dans une tribune publiée par Le Monde en juillet.
5 Commentaires
Anonyme
En Octobre, 2016 (15:50 PM)Anonyme
En Octobre, 2016 (16:09 PM)Second
En Octobre, 2016 (17:25 PM)Luda
En Octobre, 2016 (18:43 PM)Anonyme
En Octobre, 2016 (07:10 AM)Participer à la Discussion