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Monday 01 September, 2025
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Exportations, importations et rééquilibrage : décryptage du commerce sénégalais

Auteur: Aïcha FALL

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Dans un monde marqué par la reconfiguration des flux économiques, les partenaires commerciaux du Sénégal reflètent autant ses choix stratégiques que ses dépendances structurelles. En 2024, les importations sénégalaises ont atteint près de 7 161,4 milliards de FCFA, tandis que les exportations s’élevaient à 3 909, 1 milliards soit une hausse de 21%, selon les dernières données de l’ANSD. Si l’Europe reste un débouché et un fournisseur de premier plan, l’Asie, notamment la Chine et l’Inde, s’impose de plus en plus dans le paysage commercial, tandis que les échanges intra-africains, malgré le discours d’intégration, peinent encore à décoller.
La Chine conserve sa place de premier fournisseur du Sénégal, représentant environ 11 % des importations en 2024. Les produits chinois, allant des équipements électriques aux matériaux de construction, en passant par les produits manufacturés, inondent le marché sénégalais à des prix souvent imbattables. Derrière elle, la France, l’Inde, les Pays-Bas et les Émirats arabes unis complètent le top 5 des fournisseurs. Ce positionnement reflète des logiques économiques différenciées : la France conserve une part de marché historique liée aux biens d’équipement, à la pharmacie et à l’agro-industrie, tandis que l’Inde s’illustre notamment par ses exportations de produits pétroliers raffinés.
Côté exportations, le Sénégal se distingue par une offre encore peu diversifiée. L’or représente 22 % des exportations, soit environ 588,5 milliards de FCFA, essentiellement à destination de la Suisse et de l’Inde. Le zircon, les produits halieutiques, les arachides et les engrais phosphatés complètent le panier des exportations. Les Pays-Bas, la Suisse, l’Inde, la Chine et le Mali figurent parmi les premiers clients du pays. Ce profil d’exportateur de matières premières et de ressources naturelles souligne la faible valeur ajoutée locale intégrée dans les chaînes de valeur internationales.
Malgré les discours en faveur du commerce Sud-Sud, les échanges intra-africains restent modestes. L’UEMOA et la CEDEAO, bien qu’elles offrent un cadre de libre-échange régional, ne captent qu’une part relativement limitée du commerce total du Sénégal : environ 12 % des exportations et 6 % des importations en 2024. Le Mali, la Côte d’Ivoire et la Guinée figurent parmi les rares partenaires africains significatifs, notamment dans le cadre des exportations de ciment, d’électricité ou de produits alimentaires transformés. Le potentiel de croissance de ces échanges demeure toutefois sous-exploité, en raison de barrières non tarifaires, d’infrastructures logistiques insuffisantes et d’une faible complémentarité des structures productives.
La structure commerciale du Sénégal révèle ainsi une double tension : entre une dépendance persistante vis-à-vis de fournisseurs extra-africains, notamment asiatiques, et une difficulté à faire émerger une offre exportable compétitive et diversifiée. Alors que le pays cherche à monter en gamme industrielle et à tirer parti de ses nouveaux gisements pétroliers et gaziers, une stratégie commerciale plus proactive, intégrée aux politiques industrielles, devient indispensable.
Cela implique une montée en compétence dans la négociation commerciale, une meilleure intégration des PME aux chaînes d’approvisionnement mondiales et une refonte logistique pour fluidifier les échanges avec les pays voisins. À défaut, le Sénégal risque de rester prisonnier d’un modèle où ses exportations demeurent concentrées sur quelques ressources brutes, tandis que ses importations continueront à alimenter une dépendance structurelle, peu favorable à la résilience économique.
Auteur: Aïcha FALL

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