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FACE AU CHANTAGE DE LA BANQUE MONDIALE SUR LA TAXE DE SAUVEGARDE: L'Etat recule et livre la Sonacos

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FACE AU CHANTAGE DE LA BANQUE MONDIALE SUR LA TAXE DE SAUVEGARDE: L'Etat recule et livre la Sonacos

 

C'est encore un projet de loi qui est déjà dans le circuit et porte une mesure de sauvegarde sur les huiles de palme raffinées importées. Face aux menaces proférées par le Représentant local de la Banque mondiale, le gouvernement sénégalais recule et lève ainsi la protection de 15% qui pesait sur les huiles végétales raffinées importées (soja, colza, coton et tournesol), et maintient celle de 25% qui frappent désormais les huiles de palme raffinées importées, "sauf celles provenant des Etats membres de l'Uemoa". Quand on sait que les importations sauvages de ce produit proviendraient principalement de la Côte d'ivoire, au lieu de le régler, le gouvernement ne fait ainsi que déplacer un problème qui risque fort de frire l'entreprise sénégalaise.

45 milliards de FCfa à rembourser et un gros portefeuille de projets qui risquait d'être bloqué. Cela ferait mal surtout dans un contexte et une atmosphère qui fleurent des joutes électorales épiques. Aussi, faut croire que la pression opérée par le Représentant local de la Banque était trop forte pour l'Etat sénégalais qui n'a même pas attendu un audit industriel de la Sonacos, pourtant suggéré par la Banque, pour s'exécuter face aux menaces de celle-ci contestant l'application de la loi 2005-30 du 16 décembre 2005 portant application d'une mesure de sauvegarde pour les huiles végétales raffinées importées. Aussi, c'est une autre loi qui est actuellement dans le circuit, visant à abroger toutes les dispositions antérieures de la loi 2005-30 du 16 décembre 2005. Dès lors, dans ce projet de loi, le gouvernement sénégalais fait-il sauter la taxe de 15% qui frappe, depuis le 1er janvier 2006 (date d'entrée en vigueur de la loi 2005-30 du 16 décembre 2005), les autres huiles végétales raffinées importées telles que le soja, le colza, le coton et le tournesol.

En maintenant cependant une mesure de sauvegarde provisoire qui consiste à appliquer une taxe de 25% sur les importations d'huiles de palme raffinées, le gouvernement sénégalais en exclut tout de même "les produits similaires originaires des Etats membres de l'Union économique et monétaire Ouest-africaine(Uemoa)", selon les termes du projet de loi, semblant ainsi se conformer aux textes du droit communautaire.

Par ailleurs, comme l'avait réclamé le Représentant local de la Banque mondiale, Madani Tall, l'article 4 du projet de loi précise la durée d'application de la taxe de sauvegarde provisoire en question qui, "ne peut excéder 200 jours pour compter de la date d'entrée en vigueur" conformément à l'article 6 de l'Accord sur les sauvegardes de l'Omc. Un délai que n'avait pas respecté la première loi 2005-30 du 16 décembre 2005 qui s'était contenté de disposer en son article 3, que "la durée d'application de cette mesure ne peut excéder six (6) ans, incluant la durée d'application de la mesure de sauvegarde provisoire", sans considérer les restrictions des articles 6 de l'Omc et 12 du règlement n°14/98/CM de l'Uemoa. De même, contrairement à la précédente loi, le nouveau projet de loi, en son article 5, cette fois, inclut l'ouverture "obligatoire" d'une enquête couvrant au plus la durée d'application de la mesure provisoire et destinée à "vérifier et confirmer" les menaces graves que les huiles de palme raffinées soumises à la mesure de sauvegarde font peser sur la branche de production nationale de produits similaires ou concurrents. Autrement dit : "On laisse d'abord entrer le loup pour aller voir les dégâts qu'il est susceptible de faire".

De quelle palme s'agit-il?

Qui cherche-t-on à tromper? Quand on sait que dans l'exposé des motifs de la loi 2005-30 du 16 décembre 2005, les autorités sénégalaises affirmaient avec précisions que, pendant les neufs premiers mois de l'année 2005, "les importations d'huiles de palme raffinées se sont accrues de plus de 67% en volume par rapport à l'année 2004 et de 195% comparativement à 2003"…? Mieux, sous ce rapport, il semblerait qu'une partie importante des augmentations en cause provienne de Côte d'ivoire, qui produit, mais qui importerait également en grande quantité de l'huile de palme raffinée. D'où proviendrait alors cette huile raffinée? Il existe ainsi de fortes présomptions de contournement des règles d'origine au sein de l'espace Uemoa concernant l'huile de palme et cela devrait justifier de la part des autorités sénégalaises, le déclenchement rapide d'une procédure de vérification du respect des règles d'origine. D'autant plus que "les produits fabriqués à partir des substances du règne végétal récoltés dans les Etats membres, utilisés seules ou mélangées à d'autres matières, ne sont considérées comme entièrement obtenus dans les Etats membres que si leur proportion en quantité est supérieure ou égale à 60% de l'ensemble des matières premières mises en œuvre", ainsi que le stipule le Protocole additionnel N°III instituant les règles d'origine des produits de l'Uemoa stipule en son article 1er. Que fait-on des certificats d'origine?

Par ailleurs, les dispositions de l'article 2 de l'Accord sur les sauvegardes de l'Omc prévoient qu'"un membre ne pourra appliquer une mesure de sauvegarde à l'égard d'un produit que si ce membre a déterminé que ce produit est importé sur son territoire de manière à causer un dommage grave à la branche de production nationale…" Dispositions confirmées d'ailleurs par l'article 3 du même accord qui prévoie qu'"un membre ne pourra appliquer une mesure de sauvegarde qu'à la suite d'une enquête menée par les autorités compétentes de ce membre". Aussi, en appliquant une taxe de 25% sur les huiles de palme raffinées importées les autorités sénégalaises ont-elles satisfait à cette disposition? Auquel cas, comment se fait-il alors qu'elles excluent de fait les produits similaires originaires des Etats membres de l'Uemoa tout en soutenant que pendant les neufs premiers mois de l'année 2005, "les importations d'huiles de palme raffinées se sont accrues de plus de 67% en volume par rapport à l'année 2004 et de 195% comparativement à 2003", sans préciser la provenance de ces importations. On suppose alors que les preuves sont faites que ces importations proviennent de partout sauf de l'Uemoa, alors que des données concordantes désignent la Côte d'ivoire comme la provenance principale de celles-ci.

Pourtant, répétons-le, même l'Uemoa à travers le règlement n°14/98/CM prévoie des mesures de sauvegarde en conformité avec la dérogation prévue à l'article 86 de son traité, et qui seraient autorisées dans des circonstances exceptionnelles où le respect de la procédure courante créerait une situation qu'il serait difficile de rétablir, par la Commission pour une durée ne dépassant pas 90 jours. Pour peu que les autorités sénégalaises aient réellement la volonté de faire de la Sonacos et de la filière "un groupe agro-industriel de référence en Afrique et dans le monde", il est incompréhensible que l'on ferme d'un côté pour ouvrir de l'autre sans d'abord mener un audit industriel de l'entreprise, ni chercher à déterminer d'où vient réellement la menace. Et si la Banque mondiale qui prétend lutter contre la pauvreté est vraiment dans cette dynamique, elle devrait pousser ses interlocuteurs sénégalais à cela, plutôt que d'exiger manu-militari et de se satisfaire du démantèlement de tous les verrous qui pourraient encore préserver une entreprise que l'on prétend restructurer, après l'avoir privatisée dans des conditions qui frisent l'hérésie. Nous y reviendrons largement.

 



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