L’absence de politique pour la promotion et l’intégration des émigrés dans le tissu économique écœure ces derniers. Parmi eux, certains rencontrés à Brescia, à l’occasion d’un voyage de presse organisé par Air Sénégal International déplorent leur mise à l’écart dans le financement des projets tout en dénonçant le jeu des autorités.
Les ressortissants sénégalais établis en Italie ne comprennent pas que les émigrés ne soient pas pris en compte dans la politique de développement définie par le gouvernement. Une situation qu’ils perçoivent comme «un paradoxe en ce sens qu’on ne peut développer un pays en ignorant le 1/5 de sa population essentiellement composé d’émigrés éparpillés dans la diaspora», constate le président de l’Association des travailleurs sénégalais de Brescia, Nango Seck. A l’en croire, «les émigrés rapportent près de 250 milliards de francs Cfa par an à l’économie sénégalaise alors qu’une stratégie visant à les insérer dans le tissu économique n’est pas élaborée». Ainsi, crie-t-il à l’injustice.
Mais, selon Oumy Sène, membre de l’Association, outre que le fait que les émigrés soient écartés des politiques de développement, les autorités sénégalaises font «dans le dilatoire sur le financement des projets pour les femmes». En effet, regrette-t-elle que les promesses qui leur ont été faites depuis 2005 soient restées sans suite. Cela après que la caravane des Petites et moyennes entreprises (Pme), alors instituée par l’ex-ministre de la Micro-finance, des Pme et de l’Entreprenariat féminin, Maïmouna Sourang Ndir, est passé dans les villes italiennes l’année dernière. Ainsi, Mme Sène ne cache pas sa déception : «Nous avions pris la visite de Mme Ndir comme un déclic et avions perçu une volonté du gouvernement de réparer une injustice. Mais, en fin de compte, nous sommes au regret de constater que la venue du ministre avait des dessous politiques. C’était une façon de nous berner et de nous endormir.» En effet, Oumy Sène fonde son argumentaire sur le constat selon lequel «les projets que les femmes émigrées ont élaborés dorment dans les tiroirs. Cela, malgré les fermes promesses qu’elle avait faites de revenir avec les financements. Il n’y a aucun suivi. D’ailleurs, nous n’avons plus d’interlocuteur du moment que le ministre a été changé».
Autre reproche formulé par l’Association des travailleurs sénégalais de Brescia, c’est «la duplicité» des autorités en charge des questions d’habitat. Oumy Sène rappelle que Salif Bâ, alors ministre de l’Habitat et de la Construction, accompagné du directeur de la Société immobilière du Cap-vert (Sicap), avaient pris des engagements pour faciliter l’accès au toit aux émigrés vivant en Italie. Mais, s’étonne-t-elle que «les déclarations des uns et des autres aient été du vent. Rien que du vent».
Même son de cloche chez Pape Diop qui s’interroge sur les raisons pour lesquelles le gouvernement du Sénégal ne prévoit pas les émigrés dans le financement des projets. Car, se convainc-t-il que «c’est la seule voie qui puisse permettre aux Sénégalais de rentrer au pays et d’investir dans des secteurs porteurs». De même, déplore-t-il «les lenteurs administratives et certaines pratiques qui n’encouragent pas les porteurs de projets». M. Diop regrette de ne pouvoir trouver un terrain sur lequel il compte édifier une entreprise de menuiserie. «Malgré les maintes démarches entreprises depuis plus d’une année, les chosent ne bougent pas et les agents de l’Administration demandent de l’argent pour transmettre le dossier. Ce que je ne vais pas faire», peste-t-il.
Quid du projet dénommé Retour des émigrés vers l’agriculture (Reva) théorisé par le président de la République ? Les Sénégalais d’Italie restent sceptiques quant à sa réalisation. «On parle trop au Sénégal, mais, on ne fait rien pour concrétiser les projets. Les autorités parlent de Reva alors que le financement n’est pas encore en place. On ne s’aventure pas à retourner au pays sur ces bases. Il n’y a rien de concret», fait remarquer Pape Diop.
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