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GOUVERNEMENT-SOCIETE AFRICAINE DE RAFFINAGE(SAR) - Or noir… de nuages

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GOUVERNEMENT-SOCIETE AFRICAINE DE RAFFINAGE(SAR) - Or noir… de nuages

Ça marche à tous les coups, le chantage, et chacun y va de ses moyens de coercition pour faire casquer le gouvernement sénégalais. D'abord la Banque mondiale, maintenant la Société africaine de raffinage(Sar) qui, après avoir pris en otage tout un pays, tord le bras au gouvernement qui a fini par mettre la main à la poche. On aimerait tant y croire mais, hélas, ce ne sera pas pour autant la fin des délestages d'électricité. En fait, il serait trop simpliste le limiter le débat à la fourniture de brut à la Sénélec, ou à la reprise des appro de la Sar. Le problème de fond réside dans la structure des relations entre la Sar et le gouvernement sénégalais au cœur d'un secteur hautement stratégique dont la libéralisation, somme toute, est restée une arlésienne.

C'est l'histoire du pot de terre contre le pot de fer. Le premier, courageux mais pas téméraire, n'a pas tenu longtemps pour se rendre compte qu'il n'avait pas les cartes en main pour faire face puisque, qui détient le produit, détient le pouvoir et en use jusqu'à user l'adversaire. Le combat n'aura pas eu lieu et le pot de terre accepta de faire allégeance en versant une "dîme" d'une trentaine de milliards. Hélas, si cet accord débloque dans l'immédiat la situation qui prévaut dans la distribution des produits pétroliers, il ne sonne pas pour autant, loin s'en faut, la fin des délestages d'électricité. Il suffit simplement de se rappeler, comme l'ont d'ailleurs souvent expliqué les responsables de la Sénélec, que les sempiternels délestages seraient dus à un défaut d'approvisionnement de la Sar, certes, mais aussi la panne depuis des mois de la centrale GTI de Bel air. Il est vrai cependant que la première cause a suscité d'autant plus d'émoi que la fermeture des robinets de la Sar, même en quelques heures, a fait ressortir le caractère incontournable et hautement stratégique du secteur des hydrocarbures.
Aussi, à la suite de la réforme majeure engagée en 1998, le secteur de la distribution pétrolière au Sénégal présente les caractéristiques suivantes : marché libéralisé avec plafonnement des prix à la pompe ; monopole de l’approvisionnement de fait de la raffinerie locale ; oligopole de fait de trois géants du pétrole sur le stockage de gros ; segment de vente au détail concurrentiel.

Malgré la suppression en 2000 de la surtaxe temporaire introduite en 1998 sur les importations de produits pétroliers raffinés afin de protéger la raffinerie alors en période de transition, aucun nouveau concurrent à la Sar n'est apparu sur le segment du raffinage encore moins le stockage de produits. Par ailleurs, les objectifs à court et moyen terme étaient de moderniser la raffinerie en vue de lui permettre de s’adapter au contexte mondial de concurrence, d’encourager l’arrivée et l’implication de nouveaux opérateurs privés sur le marché pour stimuler la concurrence. Mais force est de constater qu'aucun nouvel investissement n'a été consenti par les administrateurs de la Sar pour accroître les capacités de stockage et de raffinage de la Sar qui atteignent à peine un million de tonnes, là où la raffinerie ivoirienne, la Sir(Société ivoirienne de raffinage), fait quelque 4 millions de tonnes. Vu son outil obsolète, la Sar ne raffine que du bony light, un pétrole extrêmement léger qui nécessite des coûts de raffinage pas élevés, selon certains spécialistes. En réalité, la Sar importe plus qu'elle ne raffine et en valeur absolue, elle importe pour près de 200 milliards de FCfa de produits pétroliers notamment du fini. Une aberration quand on sait qu'en rapport avec sa vocation, il est plus économique et la valeur ajoutée avec, d'importer du brut, le raffiner sur place et mettre à la disposition du marché des produits de qualité et moins chers.

L'argument massue souvent servi par les responsables voudrait que les surcoûts liés aux investissements pour moderniser la Société Africaine de Raffinage (SAR) en vue d’améliorer les spécifications techniques des produits, ne peuvent être abaissés en raison de 'l’exiguïté du marché national et sous-régional'. Ce qui est totalement faux étant donné le seul marché du Mali qui représente quelque 500 000 tonnes. D'ailleurs, face à la forte demande intérieure comme extérieure, la Sar est même obligée de s'endetter pour assurer l'importation de produits pétroliers pour couvrir son marché.

À qui profite la libéralisation?

La réalité est que les majors tout puissants semblent tenir l'Etat à la gorge, celui-ci ne disposant même pas de la minorité bloquante au sein du conseil d'administration de la Sar pour prétendre s'opposer à quelque décision que ce soit. À la limite, l'Etat sénégalais aurait pu au moins exiger la répartition des actions de Elf (lors de sa fusion avec Total) à lui-même, ou à des privés sénégalais…

Dire que le monopole de l’importation détenue par la Société africaine de raffinage (SAR) a été supprimé. En fait, c'est seulement sur le papier, même si cinq entreprises étaient titulaires de licences pour l’activité de l’importation en janvier 2003. De fait, le marché reste, dans tous les segments, dominé par les majors qui, voici des lustres, contrôlent la Sar et qui ont pour nom Total (54% du capital) et Shell (30%) principalement, tandis que la participation de l’Etat se limite toujours à 10% du capital de la raffinerie.

Pis, en l'absence sur le marché d'indépendants dans le stockage, la portion congrue d'indépendants dans ce secteur de la distribution est obligée de s'approvisionner auprès de la Sar moyennant un droit de passage de 03 FCfa.

Dans ce contexte, le pays ne dispose que d'un stock stratégique de sécurité de 35 jours (ce stock serait même rétribué par l'Etat), théoriquement, alors que le standard est d'un minimum de 90 jours. Autrement dit, si le produit venait à manquer pour une raison ou pour une autre, le Sénégal ne pourrait tenir qu'un mois, pour un produit aussi stratégique. C'est dans ce contexte plutôt cocasse que le gouvernement, avec force déclarations, veut faire de Dakar un 'centre de stockages de produits pétroliers et une raffinerie ultramoderne pour développer une industrie pétrochimique'. Une gageure si l'on considère que les autorités sénégalaises ne sont pas capables, depuis des années maintenant, d'obtenir d'abord de la Sar qu'elle modernise l'existant.

En définitive, il faut souligner que l'option libérale du gouvernement qui a sous-tendu le rétablissement en 2000 de la vérité des prix, répondait aux exigences du nouveau cadre législatif et réglementaire portant sur les hydrocarbures avec la loi 98-31 du 14 avril 1998, qui fait que le marché national devait être déterminé par les cours mondiaux. Aujourd'hui, le gouvernement revient en arrière pour soit disant éviter la répercussion des prix du baril sur la consommation, alors qu'il devrait plutôt revoir sa politique de taxation qui ne profite qu'à lui et aux majors qui pourtant, réclament plus de marges bénéficiaires.

Cependant, le même cadre législatif et réglementaire faisait aussi référence à une libéralisation profitable pour tous, avec des effets positifs que la loi 98-31 laissait espérer. Mais force est de reconnaître que ces effets ne sont pas au rendez-vous ni dans la structure du marché, ni sur les performances, encore moins sur les prix.



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