Les touristes fuient la Casamance : La Gambie récupère les hôtes du Sénégal

TOURISME - Pour cause de chèreté de la vie et de l’insécurité en Casamance : La Gambie prend les hôtes du Sénégal

Envoyé spécial à Banjul - Les hôtels de Banjul sont très achalandés en cette période de saison touristique. La destination Gambie est en train de ravir la vedette aux plages du Sénégal et le Président Yaya Jammeh s’engage à développer davantage ce secteur économique très porteur.

Trouver un lit disponible dans les hôtels Kaïraba ou Senegambia Beach Hotel de Banjul, en cette période de saison touristique, relève du parcours du combattant. Tant les réceptifs hôteliers affichent complet. Pourtant, le pays de Yaya Jammeh a développé, de façon dynamique, le secteur du tourisme en améliorant les conditions d’accueil avec l’implantation de nombreuses chaînes hôtelières sur son littoral Atlantique. Mais, l’affluence constatée ces derniers jours dans les hôtels gambiens ne manque pas de frapper le visiteur habitué des lieux. Qu’est-ce qui se passerait, en particulier, en Gambie pour susciter cette ruée de touristes européens vers ce pays ? L’interrogation est d’autant plus légitime, qu’au restaurant de Senegambia Beach Hotel, à l’heure du petit-déjeuner, on surprend des discussions animées entre touristes en Espagnol, en Français, en Italien ou en Allemand. Un groupe d’une dizaine de touristes venus de Bordeaux, dans le Sud-Ouest de la France, est enchanté de trouver un interlocuteur qui parle français. Jean-Jacques, qui a connu le Sénégal, pour la première fois, du temps où Claude Bez, ancien patron de l’équipe de football de Bordeaux, possédait un grand hôtel au Sénégal, nous explique les raisons pour lesquelles, lui et son groupe d’amis, ont préféré venir en Gambie plutôt que d’aller au Sénégal. «Nous avions nos habitudes au Sénégal, à Saly Portudal ou au Cap Skirring, mais depuis qu’un tour operator espagnol, installé à Bilbao, nous a fait découvrir la Gambie, nous y venons de façon systématique.» En fait, explique notre interlocuteur, dans ce pays, «nous faisons moins l’objet d’agressions de la part de prétendus guides touristiques ou de marchands. Il s’y ajoute que les conditions d’accueil, à savoir : le climat, les plages, la qualité des hôtels, sont identiques. Du point de vue des découvertes, nous découvrons la même culture, les mêmes traditions et les mêmes peuples. Franchement à part la différence entre le Français parlé au Sénégal et l’Anglais pratiqué en Gambie, il n’y a pas de différence majeure, du point de vue de l’adaptation. L’avantage est certain pour la Gambie, car les prix sont de loin moins chers qu’au Sénégal. Ici, la vie est moins chère». Un autre facteur, qui expliquerait que des touristes se détournent des plages et du soleil de Casamance pour la Gambie, a trait à la psychose d’insécurité qui habite les touristes en Casamance. L’enlèvement de touristes français en Casamance, il y a quelques années, la collision mortelle d’un véhicule de quatre touristes espagnols avec un camion militaire, cette année, dans la zone de Cap Skirring et surtout, la décision d’un pays européen comme l’Italie de conseiller à ses ressortissants d’éviter la destination Casamance, suite à la recrudescence des affrontements entre factions du Mouvement des forces démocratiques de Casamance (Mfdc), sont autant de facteurs dissuasifs pour les touristes.

LIMITES DU TOURISME GAMBIEN

Il reste que le tourisme gambien ne manque pas de souffrir de certaines contraintes infrastructurelles. Les difficultés liées à l’approvisionnement en électricité handicapent le développement de ce secteur. Des hôteliers rencontrés nous ont fait part du renchérissement des facteurs de production du fait du manque d’électricité. «Nos coûts sont augmentés de plus de 20%, les deux dernières années, à cause de l’achat de groupes électrogènes, de carburant et autres charges d’entretien. A la longue, le tourisme gambien sera moins compétitif, comparé à d’autres destinations», souligne Jim, patron d’une chaîne de restaurants à Banjul. Les autorités politiques semblent prendre la mesure du phénomène. Dans son allocution, une sorte de discours sur l’état de la Nation Gambienne prononcée devant l’Assemblée nationale le 31 mars dernier, le Président Yaya Jammeh reconnaît ses lacunes. Le Président Jammeh a, notamment, déclaré accepter «l’échec de son gouvernement dans le secteur de l’électricité». En effet, a-t-il martelé : «J’ai beau mis la pression sur la Nawec (Ndlr : Société nationale de production et de distribution de l’électricité), mais le problème demeure entier. Le problème de la Nawec est moins un problème de capacité de production que de gestion. Mais, je sais ce que j’ai à faire», a déclaré le chef de l’Etat.