Mercredi 24 Avril, 2024 á Dakar
Vendredi 01 Juin, 2018 +33
Economie

M. MADICKÉ NIANG, MINISTRE DE L’ÉNERGIE ET DES MINES : « Il y aura des solutions prochainement au problème du gaz »

Single Post
M. MADICKÉ NIANG, MINISTRE DE L’ÉNERGIE ET DES MINES : « Il y aura des solutions prochainement au problème du gaz »

Dans un entretien exclusif dont nous vous proposons la première partie, le ministre de l’Energie et des Mines, se prononce sur les problèmes relevés dans l’approvisionnement des ménages en gaz butane. Madické Niang, qui confirme l’existence de stocks suffisants, indique qu’en attendant que le comité technique interministériel dépose ses conclusions à l’attention du Premier ministre, la sortie des bonbonnes de gaz du territoire national a été interdite. Dans la seconde partie qui sera publiée demain, le ministre de l’Énergie et des Mines s’expliquera sur le différend qui oppose l’État du Sénégal à la société Kumba Resources dans le cadre de l’exploitation des mines de fer de la Falémé (Miferso).

Monsieur le Ministre, les ménagères sont confrontées depuis un certain moment à d’énormes difficultés pour s’approvisionner en gaz butane. Qu’est-ce qui justifie ce phénomène ?

Je vous confirme qu’il y a réellement un problème au niveau du gaz. Il s’agit d’un problème de distribution. Je l’avais dit, il y a quelque temps. Certains avaient cru devoir apporter un démenti. Parce que la crise persistait, elle perdurait. Pour ces raisons, certains avaient dit que le problème de la distribution, c’est l’arbre qui cache la forêt et, avec la forêt, nous avons la pénurie. Ce quoi est inexact. J’en avais parlé un moment après la fête de la tabaski. En ce moment-là, nous étions confrontés à un problème qui avait une base un peu particulière. Parce qu’il s’agissait de moyens de transport, mais aussi de moyens de distribution. La plupart des charretiers qui sont les moyens les plus utilisés pour transporter, en banlieue, les bouteilles de gaz avaient arrêté de travailler pour aller fêter chez eux. Ainsi, les boutiques n’étaient plus pourvues de bouteilles pour pouvoir les mettre à la disposition des populations. Ça, c’était le premier point concernant l’explication qu’il faut donner à la première pénurie ou, j’aurais pu dire, aux perturbations qui avaient eu lieu après la Tabaski.

Et qu’en est-il aujourd’hui, plusieurs semaines après la Tabaski ?

Il y a maintenant un autre problème, mais dont la base est fondamentalement différente, même si c’est toujours un problème de distribution. Il s’agit de disposer d’emballages suffisants pour pouvoir distribuer le gaz. Le gaz existe. Récemment, je faisais une communication au Conseil des ministres. Je leur disais, nous avions un stock de 18 jours, alors que nos capacités de stockage sont de 20 jours ; donc nous étions sur le point de boucler totalement nos capacités. Nous avons actuellement un stock de 10 jours qui équivaut à 9.139 tonnes de gaz. Ces quantités de gaz sont disponibles et vous pouvez aller voir, vérifier au niveau de la Sar.

Mieux, nous avons un butanier qui est en train de mettre le cap sur Dakar et devait arriver cette semaine (Ndlr : hier 20 février). Ce sera encore 3300 ou 4.000 tonnes de plus, selon le manifeste qui nous sera délivré. J’attends de voir le manifeste pour être fixé sur le tonnage.

Suffisamment donc de gaz en stock, mais insuffisamment à la disposition des ménages...

Mais le problème que nous avons, c’est un problème d’emballage. Pourquoi nous avons ce problème d’emballage ? L’Etat met chaque année dans le circuit du gaz, entre 15 et 25 milliards de FCfa. Il subventionne les bouteilles de 2,7 kg et de 6 kg pour permettre aux ménages dont les revenus sont faibles de pouvoir en disposer, avoir à la portée de leurs bourses une disponibilité de gaz. Cela devrait permettre à ces ménages de ne pas avoir recours au charbon de bois et de prévenir la déforestation. C’est une politique nationale qui a été introduite depuis longtemps. Malheureusement, cette subvention ouvre la porte à des formes de trafic qui sont tout à fait nuisibles. Les bouteilles de gaz de 2,7 et 6 kg coûtent moins cher. Premièrement, au niveau des consommateurs, les ménages les plus nantis utilisent les 6 kg. Mais, en ce moment-là, ils trafiquent leurs cuisinières, avec des adaptateurs, pour faire de sorte que les bouteilles de 6 kg puissent être utilisées de façon à ne pas avoir à acheter les 9 kg et les 12 kg qui ne sont pas subventionnés.

Deuxièmement aussi, dans les pays voisins, nous n’avons pas les mêmes dispositifs. Donc, certains utilisent un circuit de commercialisation qui crée une évasion d’emballages. Pourquoi l’évasion est possible ? Premièrement, il y a le contenu qui est subventionné, mais aussi le contenant. Et comme le contenant ne fait l’objet que d’une consignation de 6.000 francs, les gens préfèrent partir avec la bouteille qui coûte, à vide, 12.000 francs dans les pays voisins. Ce qui fait qu’aujourd’hui, il y a réellement un problème d’emballage. Cela se traduit par des perturbations au niveau des centres d’emplissage auprès desquels les grossistes se fournissent et qui approvisionnent à leur tour les détaillants. Auparavant, m’ont expliqué récemment les grossistes, le camion arrivait le matin ; avant midi, il était chargé et il pouvait revenir à la boutique pour l’approvisionner. Aujourd’hui, les camions arrivent le matin, passent souvent la nuit dans les centres d’emplissage. Parfois même, ils y restent deux nuits successives sans pouvoir retirer la marchandise. Ce qui pose de sérieux problèmes. Puisque, effectivement, des ruptures sont notées au niveau de l’emballage.

Il y a aussi un autre problème. Je disais que le problème était de trois ordres. Le premier problème, c’est un trafic qui est à l’intérieur du Sénégal. Le deuxième problème, c’est l’évasion vers les pays limitrophes. Le troisième problème, c’est aujourd’hui, un système de distribution qui n’est pas du tout adéquat. Vous savez, pour se positionner, il arrive qu’il y ait des pratiques qui sont particulièrement défavorables aux consommateurs. Telle société - je ne voudrais pas en citer - en récupérant des bouteilles vides, il lui arrive d’en récupérer des milliers d’une société concurrente. Et comme ces bouteilles ont un coût, elle ne les rend pas. Elle attend que la société concurrente lui rende ses bouteilles pour qu’elle lui rende les siennes. Mais, il arrive que cette société concurrente n’ait pas assez de bouteilles qui pourraient lui permettre de récupérer toutes ses bouteilles. Vous allez chez chaque distributeur, vous voyez par exemple, quand vous allez chez Mobil, vous allez voir que Mobil détient beaucoup de bouteilles de telle autre société. Quand vous allez chez Touba gaz, vous verrez des milliers de bouteilles de Mobil ou d’une autre société. Et Touba gaz ne peut pas les utiliser. Parce que ces bouteilles portent un nom et un label qui n’est pas celui de Touba gaz. Pour ces raisons, Touba gaz ne peut pas utiliser ces bouteilles. Ce qui fait aussi qu’il y a moins des bouteilles en circulation, moins d’emballages en circulation. Le gaz et là, on n’a pas les moyens de le mettre en bouteilles et de le distribuer. Voilà le problème que nous avons rencontré ces jours-ci.

Pourquoi la subvention se limite-t-elle simplement aux bouteilles de 2,7 et 6 kg et ne serait-elle pas étendue aux autres bouteilles pour juguler le phénomène de fraude ménagère ?

Non. S’il faut dire, que le faire, premièrement, c’est payer beaucoup d’argent. Ce que le budget ne peut pas faire. Deuxièmement, la réalité, c’est que les faibles revenus qui sont soutenus n’utilisent ni les 9 kg, ni les 12 kg. C’est comme si on subventionne le consommateur nanti. Alors que c’est à lui d’avoir, au moins, à être habité par un esprit de solidarité. On aurait dû, au moins, surtaxer les consommations de 9 kg et de 12 kg pour les amener vers un acte de solidarité qui devrait amener le circuit à subventionner la bouteille. Mais, l’Etat a préféré mettre la main à la poche. Et deuxièmement, l’Etat paie des manques à gagner dont profitent tous les consommateurs. Quand le produit coûte tant sur le marché, l’Etat bloque les prix à un certain niveau pour en faire profiter tout le monde, mais est beaucoup plus généreux vis-à-vis des faibles revenus. Et ça, il faudrait s’en féliciter. Il faut soutenir ceux qui n’ont pas les moyens.

Après le diagnostic quels remèdes comptez-vous appliquer aux maux décelés ?

Déjà, au niveau évasion, nous avons pris comme décision immédiate de saisir le ministre de l’Intérieur, le ministre des Forces armées, le ministre du Budget pour que la Douane, les forces de Police, les forces de Gendarmerie s’opposent à toute sortie du territoire national des bouteilles de gaz. Déjà, c’est le premier point. Vous me direz que nous avons des frontières élastiques et qu’elles sont loin d’être étanches et que des problèmes peuvent exister. Mais, au moins, pour ceux qui utilisent le transport régulier, ceux qui utilisent le passage des frontières, qu’on puisse leur interdire l’utilisation des bouteilles hors du territoire national. C’est un problème qui peut nous permettre de pouvoir bloquer le maximum de bouteilles. Sur le plan interne, il y a des mesures qui sont prises. Mais ces mesures ne peuvent pas immédiatement être annoncées. Parce qu’une réunion technique interministérielle va se réunir (Ndlr :hier). Vous savez, le secteur de l’énergie souvent concerne plusieurs ministères. C’est vraiment un secteur avec des compétences transversales. Nous avons les Finances (parce que ce sont elles qui mettent la main à la poche). Nous, nous avons la commercialisation. Moi, mon rôle, c’est de faire de sorte que le marché sénégalais soit approvisionné de manière suffisante en produits pétroliers. Le reste est une question de commercialisation. Mais, je ne vais pas me laver les mains, en disant non, il y a du gaz de manière suffisante. Le reste, ce n’est pas mon problème. Non, je n’aurais pas atteint mes objectifs si ce gaz n’est pas consommé. Et s’il n’est pas consommé, il n’y aura pas un nouvel approvisionnement du marché. Le marché ne peut être approvisionné que si les produits sont vendus. Donc, je continue à m’occuper de cela.

Le Premier ministre qui nous a réunis après le Conseil de ministres du jeudi dernier dans son bureau, nous a instruits de créer un comité interministériel, un comité technique, qui va se réunir dès le lundi (Ndlr : hier lundi). Tous les problèmes seront abordés au niveau de l’administration et nous allons retenir des solutions. Ce sera premièrement le problème de l’utilisation tout à fait abusive des bouteilles de 6 kg ; alors qu’on devrait utiliser du 9 kg ou du 12 kg. Ce sera aussi le problème de ces milliers de bouteilles de sociétés concurrentes qui dorment chez un distributeur et qui ne peuvent pas être utilisées, alors que nous en avons besoin. Ce sera l’occasion de régler le problème de ces bouteilles. Mais ce sera aussi l’occasion de régler le problème des grossistes. Les grossistes ont de sérieux problèmes. Aujourd’hui, ils pensent que l’opération n’est plus rentable, parce que leur marge bénéficiaire n’est pas importante alors qu’ils investissent beaucoup en jouant un rôle crucial entre les centres d’emplissage et les détaillants.

Ils sont donc, à un double niveau, impliqués et, en même temps, ils subissent une charge à un double niveau. Un poids à double niveau ; un poids financier. Et cela ne correspond pas à la marge qu’ils perçoivent. Eux aussi disent si on ne trouve pas de solution, ils seraient prêts à cesser un travail qui n’est plus lucratif, qui ne leur apporte pas la rémunération qu’ils en attendaient. Pour ces raisons donc, ils veulent qu’on trouve une solution. Voilà tous les problèmes qui se posent. Ces problèmes seront étudiés par nos techniciens, et nous nous verrons à un niveau ministériel pour proposer au Premier ministre l’adoption de mesures pour les régler. Mais, en attendant, nous avons déjà pris une décision qui peut susciter, générer pour le moment des avancées importantes. Cette décision, c’est d’empêcher que ces bouteilles sortent de notre territoire national. Vous me direz encore que nos frontières sont poreuses, elles ne sont pas étanches. Mais le circuit régulier des gens ; dans les circuits réguliers, il y avait énormément de bouteilles qui sortaient. Mais regardez, tous ces camions qui partent vers un certain pays, vous verrez avec eux beaucoup de bouteilles de gaz. Et ce sont ces bouteilles, ces emballages que nous subventionnons. C’est comme si nous subventionnons les consommateurs des pays voisins. Il faut trouver une solution à cela. Parce que le budget de l’Etat du Sénégal est utilisé de manière très importante, de manière très substantielle ; et cela devrait profiter aux consommateurs sénégalais. Nous veillerons à ce qu’il en soit ainsi.

La mise en place d’un nouveau mécanisme d’allocation de la subvention n’entre-t-elle pas en cause dans les perturbations constatées sur le marché ?

« Non, je ne crois pas. Parce que si les distributeurs n’avaient pas ce problème d’emballages, j’aurais pu dire parce qu’on a adopté une réforme, il est tout à fait normal que les premiers pas de cette réforme soient un peu difficiles. Mais, il ne s’agit pas de ça. Et, c’est une réforme qui est nécessaire. La Sar vit des moments très difficiles, a des problèmes de trésorerie énormes qui risquent de l’amener, si on n’y prend garde, à fermer boutique. Et ce serait un désastre. Parce que tous nos produits pétroliers aujourd’hui sont importés par l’intermédiaire de la Sar. S’il n’y a plus d’importation, c’est une paralysie totale de l’économie sénégalaise. Donc, il faudrait aujourd’hui faire de sorte qu’on allège le poids que supporte la Sar. Et puis, ce n’est même pas logique que quelqu’un supporte un poids, alors qu’il n’en n’est pas réellement le bénéficiaire. Je vais vous expliquer : la Sar importe, mais ce n’est pas elle qui vend et qui distribue. Donc la subvention, ce n’est pas elle qui la reçoit. Mais, au contraire, elle est destinée aux distributeurs. Et puis, il y a un problème de contrôle. Au début, vous savez comment ça marchait ? La Sar livre directement, à travers un réseau de pipelines. Ce ne sont pas des bouteilles de gaz que livre la Sar, mais c’est simplement une quantité de gaz, à travers un réseau qui arrive chez les centres d’emplissage. Le distributeur reçoit, remplit ses bouteilles et déclare à la Sar : « j’ai vendu 10.000 bouteilles de 6 kg, j’ai vendu 14.000 bouteilles de 2,7 kg ». Sur la base d’une telle déclaration, la Sar fait la sienne et à ce moment-là, fait face à une demande qui est adressée à l’autorité.

Mais, le système, il est imparfait. Premièrement, le distributeur ne paie que le prix subventionné et la Sar elle, doit courir pour obtenir la subvention ; alors qu’elle n’est pas bénéficiaire de cette subvention. Aujourd’hui, je dis non, ça doit cesser. C’est une mesure très difficile. Il nous a fallu beaucoup de courage pour pouvoir la prendre. Mais, elle correspond beaucoup plus à la réalité. Nous avons dit aux distributeurs, c’est vous qui bénéficiez de la subvention, c’est vous qui vendez, c’est vous qui distribuez, c‘est à vous de faire des déclarations. Et le problème, c’est que, un jour, la Douane aurait pu se réveiller et faire un contrôle et dire qu’il y a des choses qui ne sont pas correctes. Et, à ce moment-là, alors que la Sar n’est pas celle qui réellement s’occupe de la distribution, elle peut faire face à une amende assez forte. C’est comme si aujourd’hui elle est responsable - comme on dit en droit pénal - des faits d’autrui ; alors que ce ne sont pas ses propres faits. C’est pourquoi nous avons voulu caler les choses, faire de sorte que la Sar ne s’occupe que d’importer et de mettre à la disposition des distributeurs. Les distributeurs qui distribuent vont devoir recevoir la subvention. Mais, les distributeurs nous ont posé un problème sérieux et nous avons beaucoup sensibilisé le ministère des Finances et le Premier ministre. C’est que aussi, eux n’ont pas un matelas financier qui leur permettrait d’attendre longtemps sans avoir à recevoir la subvention. C’est pourquoi nous avons instauré une caisse d’avance qui permet de pouvoir payer immédiatement, une fois que la déclaration est faite, pièces à l’appui, les distributeurs. Les distributeurs, au début, étaient tout à fait hostiles. Il nous a fallu insister - je ne dirai pas engager le bras de fer - mais insister pour les amener à accepter le principe. Mais, ils nous ont dit, on fait une période de test de trois mois. Si le système est particulièrement bien huilé, nous continuons dans ce système. Mais moi, je tiens à ce qu’il soit bien huilé. Je veux que chacun réponde de ce qui lui revient et de ce qu’il a à faire : la Sar s’occupe d’approvisionner le marché sur la base d’une directive du gouvernement, les distributeurs devant s’occuper d’approvisionner les grossistes, les grossistes à leur tour devront approvisionner les détaillants, les détaillants mettront le produit à la portée des consommateurs.

 



0 Commentaires

Participer à la Discussion

  • Nous vous prions d'etre courtois.
  • N'envoyez pas de message ayant un ton agressif ou insultant.
  • N'envoyez pas de message inutile.
  • Pas de messages répétitifs, ou de hors sujéts.
  • Attaques personnelles. Vous pouvez critiquer une idée, mais pas d'attaques personnelles SVP. Ceci inclut tout message à contenu diffamatoire, vulgaire, violent, ne respectant pas la vie privée, sexuel ou en violation avec la loi. Ces messages seront supprimés.
  • Pas de publicité. Ce forum n'est pas un espace publicitaire gratuit.
  • Pas de majuscules. Tout message inscrit entièrement en majuscule sera supprimé.
Auteur: Commentaire : Poster mon commentaire

Repondre á un commentaire...

Auteur Commentaire : Poster ma reponse

ON EN PARLE

Banner 01

Seneweb Radio

  • RFM Radio
    Ecoutez le meilleur de la radio
  • SUD FM
    Ecoutez le meilleur de la radio
  • Zik-FM
    Ecoutez le meilleur de la radio

Newsletter Subscribe

Get the Latest Posts & Articles in Your Email