Mercredi 24 Avril, 2024 á Dakar
Vendredi 01 Juin, 2018 +33
Economie

Moustapha TALL (Importateur) : « Il est possible de vendre le kilo de sucre à moins de 200 F »

Single Post
Moustapha TALL (Importateur) : « Il est possible de vendre le kilo de sucre à moins de 200 F »

Le kilogramme de sucre peut se négocier à moins de 200 francs. C’est la conviction de l’opérateur économique Moustapha Tall qui, dans l’entretien qu’il nous a accordé, fixe les conditions d’une baisse de ce produit. En outre, reconnaît-il, le prix du riz devrait pouvoir baisser. Entre autres sujets abordés dans cet entretien, le président du Mouvement des importateurs et commerçants des denrées de première nécessité (Mic/Dpn) reconnaît leur empressement à vouloir mettre sur pied cette structure qu’ils auraient dû ériger en une section forte de l’Unacois dont ils se réclament toujours.

Wal Fadjri : Pourquoi avez-vous mis en place le Mouvement des importateurs et commerçants des denrées de première nécessité (Mic/Dpn)?

Moustapha Fall : Le Mouvement des importateurs et commerçants des denrées de première nécessité (Mic/Dpn) n’est rien d’autre qu’un instrument de plus pour mieux servir et pour mieux répondre aux attentes des consommateurs. Nous avons senti un écart, voire un vide entre nous, les consommateurs et l’Etat. Ce qui a toujours occasionné une incompréhension et même des heurts entre les opérateurs économiques et les populations qui nous accusent des fois à tort d’être la source de tous leurs maux. Ce qui n’est pas exact. L’Etat aussi nous accuse parfois à tort. Tout ça pour vous dire qu’il y a un manque criard de communication entre ses trois franges. Et comme le secteur des denrées est très sensible, on ne peut pas laisser cette situation empirer. C’est ce qui nous a poussé à s’organiser pour mieux s’occuper de ce secteur.

Wal Fadjri : N’était-il pas plus pertinent de vous constituer en section au sein de l’Union nationale des commerçants et industriels du Sénégal (Unacois) ?

Moustapha Fall : On est membre à part entière de l’Unacois depuis ses débuts. Et on le restera. Mais je reconnais notre empressement à monter cette structure alors que d’autres possibilités s’offraient à nous. Effectivement, on s’est rendu compte qu’on aurait pu mettre une section forte au sein de l’Unacois et qui ne s’occupera que des problèmes liés aux denrées de première nécessité. Ce qui nous évitera, à coup sûr, des incompréhensions çà et là. Et comme nous n’avons pas encore démarré nos activités, rien ne s’oppose à ce qu’on revoie notre copie pour faire du Mic-Dep une section forte de l’Unacois. Nous sommes même en train de nous pencher sur la question. Et pourquoi ne pas garder le nom de l’Unacois pour éviter certaines confusions ? Nus ne sommes pas venus pour marcher sur les plates-bandes de cette organisation à laquelle nous appartenons. Mais c’est parce que c’était tellement urgent à nos yeux qu’on ne pouvait pas attendre.

Wal Fadjri : Quel est, à vos yeux, le meilleur schéma pour rendre plus accessibles les denrées de première nécessité ?

Moustapha Fall : Pour nous, le meilleur schéma consiste à responsabiliser les opérateurs économiques à leur faire confiance et de travailler en étroite collaboration avec eux. Il y a de ces choses que seuls nous qui travaillons sur le terrain depuis longtemps, savent. Contrairement aux politiques qui ne peuvent pas tout savoir. Et au Sénégal, on a l’impression que les politiciens maîtrisent tout. Ce qui est loin d’être le cas. S’ils nous écoutent, on peut bien leur suggérer un schéma qui leur permettrait de baisser les prix des denrées de première nécessité. Et avec de la très bonne qualité.

Concrètement, il s’agit de mettre en branle un processus pour même subventionner les denrées. Je vous donne l’exemple du sucre. En 1974, quand l’Etat du Sénégal avait autorisé Mimran, qui avait déjà le monopole de la farine avec les Grands moulins de Dakar, d’installer la Compagnie sucrière sénégalaise (Css), à Richard Toll, le kilogramme de sucre coûtait 65 francs au consommateur. Un prix homologué que pratiquait la société Capa qui le vendait à 63,4 francs aux opérateurs. Mais dès son installation, on a accordé à Mimran le monopole. Ce qui lui a permis d’augmenter le prix jusqu’à hauteur de 225 francs le kilogramme. Mais le problème se situe aussi à un autre niveau. Alors que d’autres pays comme Cuba et le Brésil se sont déjà positionnés sur le marché, on aurait pu se concentrer sur d’autres spéculations qui marchent au Sénégal et de laisser aux opérateurs-importateurs se charger des autres spéculations. Et partir de ce moment, ils pourraient les vendre à des prix très abordables, surtout qu’à l’époque, le sucre était subventionné. Mais on constate qu’aujourd’hui, le sucre sénégalais est beaucoup plus cher que le sucre européen qui est écoulé dans les pays voisins. Cause pour laquelle le sucre venu de ces pays limitrophes comme la Gambie, la Mauritanie, sont beaucoup plus abordables. Du coup, il envahit le Sénégal au nez et à la barbe de l’Etat.

Même s’il y a les facteurs de production qui sont déterminants dans la fixation des prix, et comme le pétrole, principal responsable des fluctuations des prix, n’épargne aucun secteur d’activité, le prix du sucre devrait lui aussi baisser. En substance, retenez que si on libéralisait totalement le secteur en supprimant toute la taxation, il est possible de vendre le kilogramme de sucre à moins de 200 francs. C’est valable aussi pour le riz qui, s’il est bien organisé, peut se négocier à un prix compétitif, et on a des mécanismes qui nous permettent de le faire. On aurait pu se concentrer sur la production du riz qui est notre aliment de base. Et si on avait mis dans le riz tout cet argent investi dans la production du sucre, pour espérer avoir un sucre compétitif, on n’en serait pas aujourd’hui à ce niveau d’importation de la denrée. Le Sénégal allait même intégrer le cercle des pays exportateurs de riz.

Wal Fadjri : Comment peut-on arriver à baisser le prix du riz ?

Moustapha Fall : Il faut remettre de l’ordre dans le secteur où règne une certaine anarchie. On ne peut rien organiser dans une telle situation. Il faut impérativement organiser le secteur en limitant le nombre d’intervenants, au lieu de laisser le marché libre où quiconque peut rentrer et sortir à sa guise. Il faut, dans ce cas, agréer les intervenants qui, à leur tour, s’engageront devant l’Etat à commercialiser d’abord le riz local, sous la supervision de l’Agence de régulation des marchés (Arm). Et cette structure, comme elle le fait avec l’oignon, procédera au gel des importations jusqu’à l’écoulement total de la production locale. Ce qui poussera les producteurs à s’organiser en des structures crédibles qui peuvent être nos interlocuteurs. Mais il appartient à l’Etat de jeter les bases d’une telle organisation. Une fois cette étape franchie, il est certain qu’on peut revoir le prix du riz à la baisse. On peut également revenir au système de quota comme c’était le cas avant la libéralisation. A l’époque, on avait un système de quota géré par la Caisse de péréquation et de stabilisation des prix. Ce qui mettait l’opérateur à l’abri des méventes dès lors qu’on lui donnait toujours le temps d’écouler sa marchandise. Même s’il était obligé d’écouler son quota au risque de se le voir retirer. Mais, il faut reconnaître aussi que la qualité du riz qu’on vendait n’était pas toujours des meilleures. C’était juste bon pour l’aliment du bétail.

Wal Fadjri : Mais ce mécanisme est-il suffisant pour faire baisser le prix du riz ?

Moustapha Fall : L’Etat, s’il le voulait, pouvait subventionner le riz en jouant sur les fluctuations du marché international. Et dans ce cas, quand une baisse est notée au niveau mondial, les opérateurs peuvent acheter à ce niveau de prix. Et à partir de ce moment, nous sommes prêts à payer le différentiel comme on le fait sur le sucre. Une somme qu’il faudra loger dans un compte bien géré. Et cet argent pourrait éventuellement subventionner le riz en cas de hausse au niveau mondial. Ce qui participera à la stabilisation du prix du riz. Ce qui fera aussi éviter à l’Etat de faire face à des surprises désagréables au point de puiser de l’argent qui devait servir à autre chose pour subventionner les prix des produits de grande consommation. Comme cela s’est fait avec la récente crise financière.

Wal Fadjri : Comment accueillez-vous les récentes baisses des prix des denrées de première nécessité ?

Moustapha Fall : A ce sujet, l’Etat ne doit pas se lever un beau jour, sans se concerter avec les importateurs, pour décider unilatéralement de la baisse des prix. Il devait nous appeler pour nous proposer au moins une compensation. Surtout avec la suspension des subventions et le fait d’avoir remis les droits de douane. Par conséquent, le produit paie maintenant tous les droits et taxes et il revient à l’importateur de fixer son prix., étant donné que nous sommes dans un secteur libéralisé. Si l’Etat voulait baisser les prix d’une manière durable et sécurisée, il devait nous contacter d’abord pour qu’on discute. Et s’engager à nous accorder une compensation. En définitive, l’Etat ne peut pas obliger l’opérateur à vendre à perte.

Wal Fadjri : Vous plaidez aussi pour une révision du Code des douanes ?

Moustapha Fall : Effectivement, et nous le réclamons depuis des années. La révision, le toilettage et la réadaptation de ce vieux code s’imposent. L’actuel Code des douanes place une véritable épée de Damoclès sur la tête de tous les importateurs et commerçants sénégalais. Non seulement, il est vétuste, car datant de Mathusalem, mais on veut aussi éviter son caractère de chantage et de répression sur tout importateur. Car figurez-vous qu’avec un simple procès-verbal (Pv) d’un agent de douane, tout importateur ou commerçant peut être envoyé en prison sans même avoir la possibilité de bénéficier d’un quelconque recours. Car, ni le procureur, ni les magistrats ne peuvent faire quelque chose contre cette mesure.

Si on veut réellement promouvoir les importations dans ce pays, il faut réviser ce code archaïque car, dans son application, la Douane vise des articles qui n’ont rien à voir avec la réalité. Et j’en ai fait les frais. D’abord en 1986, quand j’ai eu un différend avec la Douane à propos d’un marché de maïs que j’avais conclu avec le Commissariat à la sécurité alimentaire et une société qui faisait dans la production d’aliments de bétail et de volaille. Un contentieux qui m’a coûté 1 million de francs Cfa. En 2004, à propos du sucre, ils m’ont pris 1 milliard de francs dans une affaire fabriquée de toutes pièces. Et récemment, ils m’ont réclamé 200 millions de francs Cfa. Et la dernière fois, on me parle de fausses exonérations, d’écriture de faux et usage de faux alors que je suis dans tous mes droits. 



0 Commentaires

Participer à la Discussion

  • Nous vous prions d'etre courtois.
  • N'envoyez pas de message ayant un ton agressif ou insultant.
  • N'envoyez pas de message inutile.
  • Pas de messages répétitifs, ou de hors sujéts.
  • Attaques personnelles. Vous pouvez critiquer une idée, mais pas d'attaques personnelles SVP. Ceci inclut tout message à contenu diffamatoire, vulgaire, violent, ne respectant pas la vie privée, sexuel ou en violation avec la loi. Ces messages seront supprimés.
  • Pas de publicité. Ce forum n'est pas un espace publicitaire gratuit.
  • Pas de majuscules. Tout message inscrit entièrement en majuscule sera supprimé.
Auteur: Commentaire : Poster mon commentaire

Repondre á un commentaire...

Auteur Commentaire : Poster ma reponse

ON EN PARLE

Banner 01

Seneweb Radio

  • RFM Radio
    Ecoutez le meilleur de la radio
  • SUD FM
    Ecoutez le meilleur de la radio
  • Zik-FM
    Ecoutez le meilleur de la radio

Newsletter Subscribe

Get the Latest Posts & Articles in Your Email