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Monday 01 September, 2025
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PME au Sénégal : un gisement d’emplois encore largement sous-exploité

Auteur: Aicha Fall

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Longtemps reléguées aux marges des politiques économiques, les petites et moyennes entreprises (PME) suscitent aujourd’hui un regain d’attention au Sénégal. Elles représentent pourtant l’ossature même de l’économie nationale, avec une densité impressionnante mais une portée limitée. À condition de lever plusieurs verrous structurels, elles pourraient devenir l’un des vecteurs les plus puissants d’un emploi inclusif et durable.
Dans son dernier recensement des unités économiques, l’Agence nationale de la statistique et de la démographie (ANSD) estimait à plus de 400 000 le nombre d’entreprises au Sénégal, dont une écrasante majorité, plus de 97 %, évolue dans le secteur informel. Moins de 1,3 % disposent de plus de cinq employés, alors que ces dernières concentrent près de 60 % des emplois du secteur formel. Cette configuration illustre la fragmentation extrême du tissu entrepreneurial sénégalais et la fragilité qui en découle.
La contribution des PME à l’économie nationale reste significative, mais leur poids demeure déséquilibré. Elles sont responsables d’environ 30 % du PIB, tout en peinant à accéder aux outils nécessaires à leur croissance. Moins de 10 % d’entre elles bénéficient d’un accès régulier aux financements bancaires, selon les données de la Banque mondiale. Les obstacles sont multiples : coût élevé des garanties exigées, faiblesse des dispositifs comptables, ou encore une relation souvent informelle avec le système bancaire. Des instruments publics comme le Fonds de garantie des investissements prioritaires (FONGIP) ou la Banque nationale pour le développement économique (BNDE) peinent à répondre à l’ampleur des besoins.
Le gouvernement sénégalais, conscient des limites du modèle actuel, a engagé plusieurs réformes. Une stratégie nationale en faveur des PME est en cours de déploiement, avec pour ambition de mobiliser 3 000 milliards de francs CFA à l’horizon 2029. Le Bureau de mise à niveau, initialement centré sur l’industrie, a été élargi à d’autres secteurs, en intégrant des accompagnements techniques, fiscaux et managériaux. Mais malgré ces avancées, l’impact réel sur le terrain reste encore en deçà des attentes.
Les contraintes dépassent la seule question du financement. Faible structuration interne, accès limité à la commande publique — à peine 28 % des PME en bénéficient selon l’Agence de développement et d’encadrement des PME (ADEPME) — et centralisation excessive des ressources d’appui dans la région de Dakar constituent autant de freins à leur essor. Les entreprises des régions périphériques, souvent moins visibles, sont confrontées à un isolement économique qui limite leur capacité d’expansion.
Dans un pays marqué par une démographie jeune et une forte pression sur le marché du travail, les PME représentent un levier incontournable pour absorber la main-d’œuvre et diversifier les sources de revenus. Leur rôle dans la création de richesse locale, le renforcement des chaînes de valeur et l’essor des territoires est fondamental. Toutefois, pour qu’elles passent d’un rôle de survie à un véritable statut de moteur économique, elles doivent être pleinement intégrées aux politiques de développement.
Cela suppose une vision plus cohérente, articulée autour d’une meilleure accessibilité aux services publics, d’une politique de formation plus adaptée aux réalités entrepreneuriales, et d’un cadre réglementaire simplifié. Sans cela, le potentiel des PME restera confiné à une dynamique informelle, incapable de soutenir durablement la transformation économique tant attendue.
Auteur: Aicha Fall

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