Cinquante morts, quatre cents blessés. Tel était le bilan provisoire, au soir du 22 mars 1992, de l'explosion d'une citerne d'ammoniac à la Sonacos de Bel-Air. Les Industries chimiques du Sénégal viennent d'échapper de justesse à une tragédie aux conséquences plus dramatiques que celles de 1992. En effet, alors qu'à la Sonacos, 18 tonnes d'ammoniac étaient l'origine d'un bilan aussi lourd, aux Ics, ce sont 5 500 tonnes d'ammoniac qui ont failli exploser à tout instant faute d'un système de réfrigération, après la décision prise, hier, par la Senelec de ne plus fournir d'électricité à cette société en difficulté.
Heureusement que la Senelec, qui est revenue à de meilleurs sentiments, a décidé, hier, aux environs de 17 h, de rétablir le courant. Ceci, après des heures d'interruption du fait d'une facture non payée. Samuel Sarr, qui court derrière ses 3 milliards d'impayés dus par les Ics, est revenu sur sa décision. Le directeur général de la société d'électricité, qui était intransigeant pour recouvrer son dû, s'est finalement résigné à rétablir le jus. La plate-forme de Mbao, où sont stockées les 5 500 tonnes d'ammoniac et où le danger d'une explosion était plus qu'éminent, a été rétablie en premier. Les autres sites le seront dans la soirée d'hier, selon des sources concordantes.
C'est après l'intervention des administrateurs des Ics que la Senelec a décidé de prendre son mal en patience. En effet, selon des sources proches des Ics, le Conseil d'administration, qui se réunissait, hier, à Paris, a été saisi des menaces qui pesaient sur les plates-formes industrielles, après le couperet de Samuel Sarr. Et, l'affaire a été gérée au plus haut niveau pour écarter tout danger d'explosion de l'ammoniac stocké dans les sites des Industries chimiques du Sénégal.
L'Intersyndicale des travailleurs des Ics, affiliée à la Cnts, a tôt fait de tirer la sonnette d'alarme. Elle qui s'inquiétait que pendant que les partenaires des Ics cherchent des solutions pour l'avenir de la société, hier, en Conseil d'administration, à Paris, la Senelec lâchait l'épée sur l'entreprise et les populations dépendantes d'elle en coupant le courant (hier, Ndlr) à 8 h 30, lit-on dans la déclaration de l'Intersyndicale qui nous est parvenue hier, peu après la décision de la Senelec.
Selon la même source, cette décision est lourde de conséquences. Sur les risques ‘graves constatables’ sur le terrain, les camarades de Mody Guiro citent la non sécurisation des 35 000 tonnes d'acide sulfurique et 10 000 tonnes d'acide phosphorique stockés à Darou, un stock de 5 500 t d'ammoniac dans les sphères à Mbao, ‘ne disposent plus de système de réfrigération. A une certaine température, il y a risque d'explosion’, alertait, hier, l'Intersyndicale. Qui rappelle que l'explosion de la citerne de la Sonacos en mars 1992 concernait 18 tonnes d'ammoniac. ‘Les installations n'étant pas arrêtées dans les normes d'un préavis adéquat, risquent de subir des dommages considérables. En cas d'incendie de soufre, il est impossible d'arrêter le feu pour des stocks de 150 000 tonnes au port et 10 000 t à Darou.’
Autres risques ‘constatables’ énumérés par l'Intersyndicale, Mboro et les 35 villages de la communauté rurale ne sont plus approvisionnés en eau potable ; ces localités dépendent des forages des Ics. Il s'y ajoute le manque de sécurité des installations ne disposant plus de signaux lumineux, ce qui les rend vulnérables (vols, sabotage, agression), et l'arrêt du programme engrais 2006 pour la campagne agricole en cours.
L'Intersyndicale, analysant la situation provoquée par la Senelec, pense que celle-ci n'a pas fait de bons calculs en agissant de la sorte, ‘parce que contraire à la volonté des autorités de l'Etat, au premier chef le président de la République, de sauver les Ics.’ Elle considère que la Senelec a manqué de loyauté vis-à-vis des Ics qui lui ont versé 518 millions de francs en janvier dernier et 597 millions autres en avril dernier.
L'Intersyndicale, qui rappelle les actions ‘nobles’ de leur société durant les périodes de difficultés suite à la grève du Sutelec, a pris acte de la mise en demeure de la Senelec, le 28 juillet dernier, réclamant environ 3 milliards de francs aux Ics dans les soixante-douze heures.
1 Commentaires
Allons Y Molo
En Octobre, 2010 (18:37 PM)Participer à la Discussion