RECAPITALISATION DES INDUSTRIES CHIMIQUES DU SENEGAL - Le gouvernement rejette la potion indienne

On s’attendait tout au moins à la signature d’un accord pouvant permettre la relance effective des Industries chimiques du Sénégal(Ics), mais au terme d’une longue journée de négociations hier, mercredi 11 octobre 2006, entre les partenaires indiens des Ics et le gouvernement sénégalais, les deux parties se sont encore séparées sur un échec. Le point d’achoppement : les phosphates de Matam.

Le beurre et l’argent du beurre. C’est ce que voulaient les partenaires indiens des Industries chimiques du Sénégal (Ics) en exigeant, en plus du contrôle des Ics, la concession de la mine de phosphates de Matam. Mais le gouvernement a dit « niet » et les négociations qui ont duré toute la journée d’hier jusqu’aux environs de 23 heures 30 mn sont désormais « suspendues ». Voila en tout cas les Ics reparties pour une période (longue ?) d’agonie, même si les optimistes purs et durs veulent bien ne pas croire à une rupture définitive.

Toujours est-il que, hier seulement, dans notre édition du mercredi 11 octobre 2006, nous faisions dans la prudence en nous demandant, malgré l’euphorie, l’optimisme et l’enthousiasme des uns et des autres, si le gouvernement sénégalais signerait ou ne signerait pas le protocole d’accord tel que proposé par les partenaires indiens des Industries chimiques du Sénégal(Ics) pour la restructuration de l’entreprise. La teneur du projet d’accord soumis par les indiens au gouvernement sénégalais nous était alors inconnue.

En même temps, nous nous demandions comment le gouvernement de Macky Sall pourrait-il laisser échapper une seconde fois le lièvre étant donné la souffrance du dossier. Et bien il apparaît clairement à présent que les partenaires indiens se sentant en position de force devant l’agonie très avancée des Ics et le besoin pressant du gouvernement sénégalais de sauver la mourante, ont voulu faire de la surenchère en lorgnant les phosphates de matam dont la mine affiche 40 millions de tonnes de phosphates à ciel ouvert.

Les deux parties auraient été pourtant au bord d’un accord jusqu’à hier soir. L’espoir était même permis tant le dossier avait survécu jusque-là à pas mal d’anicroches relatives notamment à la levée du blocage des comptes de l’entreprise en Inde et aux Usa. Les états financiers viennent également d’être consolidés après réexamen et validés par l’assemblée générale des actionnaires. Avec des travailleurs re-motivés et confiants et des partenaires indiens ragaillardis, il ne restait à ces derniers qu’à venir tâter la marchandise ainsi emballée et à y mettre le prix.

L’arrivée à Dakar, rappelons-le, lundi dernier au soir du PCA d’Ifcco, partenaire historique des Ics et d’un autre investisseur indien, Oswal, pressenti comme partenaire stratégique dans la relance en lieu et place des marocains des Ocp(Office chérifien des phosphates), avait contribué à nourrir tout cet espoir et tout un enthousiasme autour de ce dossier. Visiblement, il fallait être trop naïf pour penser que les partenaires indiens, rodés aux affaires, viendraient simplement mettre 40 milliards de FCfa à l’œil. Les propos, hier, du PCA d’Iffo devaient d’ailleurs donner une indication sur leurs ambitions, lorsque celui déclarait que leur intention était « d’accroître comme jamais la production de l’entreprise. » La seule mine de Tobène n’aurait peut-être pas suffit à cela et la cible n’était autre que les phosphates de Matam.

Pour la petite histoire, il y a deux mois, à peu près, le gouvernement sénégalais avait demandé aux Ics une étude complète sur les phosphates de Matam. Ce qui fût fait et le Président de la République n’aurait rien eu de mieux à faire que d’aller proposer la mine aux iraniens lors de son dernier voyage en Iran.

Certaines sources au niveau des Ics estiment cependant que « l’avenir c’est Matam » et qu’on aurait dû privilégier cette mine au détriment de Tobène.

Qu’à cela ne tienne, c’est cet os de Matam qui a mis un point d’orgue (momentané ?) à la présente négociation avec les indiens qui ont eu l’heur de faire le linking entre Ics et les phosphates de Matam, le protocole en tant que tel proposé par ces derniers n’ayant pas réellement posé de problème dans les discussions, si l’on en croît nos sources qui précisent par ailleurs que le gouvernement n’a pas dit un niet catégorique mais a plutôt préféré regarder de près la question.

Espérons que dans quinze jours (c’est le délai que les deux parties se seraient donné pour se retrouver), on ne passera plus de charybde en syla.