Mardi 23 Avril, 2024 á Dakar
Vendredi 01 Juin, 2018 +33
Economie

SITUATION INQUIÉTANTE DES INFRASTRUCTURES - La lente agonie du wharf de Kaolack

Single Post
SITUATION INQUIÉTANTE DES INFRASTRUCTURES - La lente agonie du wharf de Kaolack

(Aps)-De la berge au sol scintillant de sel s'avance dans les eaux le vieux wharf de Kaolack. Seule structure du genre encore fonctionnelle parmi celles construites dans les années 40 par les comptoirs commerciaux tels CFAO, Maurel et Prom, Devès- Chaumet, Vézia, etc., le wharf semble aujourd'hui prisonnier du Saloum, un bras de mer lui-même coincé entre les vieilles bâtisses des anciennes maisons de commerce et les montagnes de sel de la vieille société des Salins que l'on aperçoit sur l'autre rive.

Bien que vétustes, les anciens comptoirs commerciaux qui jouxtent la capitainerie du port et le domaine portuaire, sont aujourd'hui à usage d'habitation ou de dépôts. Il y a quelques mois, un grave incendie s'y est produit sans toutefois faire de victime.
L'environnement très insalubre est devenu un dépotoir d'ordures qui incommode les habitants, les menuisiers et autres marchands établis dans les parages. Les risques sont énormes pour la santé publique, sans compter que l'endroit sert de refuge et de lieu d'aisance aux malades mentaux et aux sans domicile fixe. Bâti sur pilotis, le wharf de Kaolack est fait de troncs de rôniers enfoncés dans les eaux et contre lesquels viennent se briser de légères vagues. L'ouvrage tient encore. Mais pour combien temps encore ? Selon Moussa Thiaré, un vieil homme témoin de la splendeur du wharf, une partie de la plateforme a cédé récemment lors d'un transbordement d'énormes fûts de carburant de la Sénélec destinés aux îles du Saloum.

La société, mise au courant, n'a toujours pas réagi tout comme la municipalité qui a été avertie de la vétusté du wharf. Sa dernière réparation remonte du temps de Abdoulaye Diack, l'ancien maire de Kaolack durant les années 90, rappelle M. Thiaré. Aujourd'hui, l'ouvrage est presque abandonné et des nostalgiques comme Moussa Thiaré se souviennent du grouillant monde qui le fréquentait, du petit matin jusqu'au soir. Il y avait, selon le vieil homme, des pêcheurs à la ligne, des baigneurs, des promeneurs et des voyageurs prêts à l'embarquement pour regagner en pirogue les îles du Gandoule. En effet, rappelle-t-il, le transport fluvial a joué un grand rôle dans le transport à l'époque où les véhicules étaient encore rares et le pont Noirot en bois. Le marché, dit-il, était approvisionné par les pirogues de fruits (mangues et oranges) et de produits de mer provenant des îles. Dans les années 60, le public se rendait au wharf pour voir les bateaux amarrés des matelots blancs, noirs et d'autres couleurs avec qui il nouait des contacts ou conversait amicalement, histoire quelquefois d'avoir quelques poissons, se souvient Mamadou Diouf, un autre riverain de l'ouvrage. Ce temps est bien loin et aujourd'hui que le trafic par voie fluviale s'est nettement réduit, le wharf est tombé dans une grande solitude. Les visiteurs comme les marins ont déserté les lieux, mais le décor, à quelques exceptions prés, est resté le même en dépit du nouveau marché central au poisson construit à côté. En effet, les montagnes de sel des Salins sont toujours là en face du wharf et on peut encore voir quelques navires se risquer à venir y puiser, à travers les méandres du fleuve.

Les infrastructures vieillissantes du port accueillent également par moment quelques bateaux à faible tirant d'eau pour l'exportation de tourteaux, de graines ou d'huile d'arachides. Changement notable, cependant, le vieux pont Noirot a cédé le trafic à un tout nouveau pont baptisé «Serigne Bassirou Mbacké» et où roulent à longueur de journée des véhicules desservant le Laguène, le Rip, le Niombatto, la Gambie et, au-delà, la région naturelle de la Casamance. Comme s'ils voulaient défier le temps, on voit encore prés du wharf quelques huttes où se regroupent de vieux pêcheurs ou des habitants des îles venus sur la terre ferme pour se ravitailler ou vendre leurs produits utilisés comme matériaux de construction : carapaces de mollusques (huîtres et moules) et bois de manguier. Dans l'attente de la clientèle, vendeurs et charretiers (pour le transport) devisent allègrement pendant que d'autres personnes tissent ou rapiècent des filets de pêche. Les coquillages sont entassés à même le sol et vendus à 4.000 francs CFA le m3, un prix moins cher que celui du béton ou du gravillon. Le bois de manguier, pour garder sa fraîcheur, reste trempé en permanence dans l'eau attendant d'éventuels acquéreurs. Son prix varie suivant la taille et la longueur. De couleur rouge, ce bois qui provient des forêts de mangroves, est très solide. Naguère utilisé pour la construction d'abris, de charpentes ou de maisons en baraques comme en regorgent encore les quartiers Ndangane et Abattoirs, aujourd'hui il sert à la construction d'abris et surtout d'étais dans le coulage des terrasses même s'il est, de plus en plus, remplacé par le bois d'eucalyptus ou les tiges de fer. Soubresauts d'un négoce qui a perdu de sa superbe, ces activités et leurs tenants semblent mener un combat contre l'oubli d'un ouvrage cher à leur cœur, à l'image de Moussa Thiaré. La voix pleine de regret, il regrette de ne plus voir sur le site les femmes qui, avant l’arrivée des blancs, y cuisaient du sisal pour en faire du ''yoss''. Bien avant les mèches de coiffure, ils servaient à faire des tresses de grand-mère, mais craignant pour la sécurité de leurs commerces, les blancs ont interdit cette activité. Aujourd'hui, la modernité, l'usure du temps et l'indifférence des autorités tuent à petit feu le wharf de Kaolack...



0 Commentaires

Participer à la Discussion

  • Nous vous prions d'etre courtois.
  • N'envoyez pas de message ayant un ton agressif ou insultant.
  • N'envoyez pas de message inutile.
  • Pas de messages répétitifs, ou de hors sujéts.
  • Attaques personnelles. Vous pouvez critiquer une idée, mais pas d'attaques personnelles SVP. Ceci inclut tout message à contenu diffamatoire, vulgaire, violent, ne respectant pas la vie privée, sexuel ou en violation avec la loi. Ces messages seront supprimés.
  • Pas de publicité. Ce forum n'est pas un espace publicitaire gratuit.
  • Pas de majuscules. Tout message inscrit entièrement en majuscule sera supprimé.
Auteur: Commentaire : Poster mon commentaire

Repondre á un commentaire...

Auteur Commentaire : Poster ma reponse

ON EN PARLE

Banner 01

Seneweb Radio

  • RFM Radio
    Ecoutez le meilleur de la radio
  • SUD FM
    Ecoutez le meilleur de la radio
  • Zik-FM
    Ecoutez le meilleur de la radio

Newsletter Subscribe

Get the Latest Posts & Articles in Your Email