Les commerçants ivoiriens et sénégalais qui inondent le marché d'huile de qualité douteuse ont dû magouiller pour ce faire. Et que cela ait coïncidé avec la sortie musclée du directeur des Opérations de la Banque mondiale contre la Sonacos pousse l'Intersyndicale de cette société à soupçonner à une collusion d'intérêts.
La coïncidence de la déclaration de presse de Madani Tall, le directeur des Opérations de la Banque mondiale (Bm) au Sénégal, et le constat des importantes quantités d'huile de palme raffinée qui ont envahi le marché sénégalais au détriment des industriels sénégalais, sème le doute chez l'Intersyndicale de la Société nationale de commercialisation des oléagineux du Sénégal (Sonacos). La soudaineté de cette action a, en effet, tellement surpris les travailleurs de cette entreprise qu'ils ne pouvaient pas manquer d'avoir des soupçons de connivence entre cette déclaration de presse et la sortie massive d'huile de palme raffinée qui, selon le président de l'Intersyndicale, était mise en entrepôt fictif dans les magasins des services des douanes sénégalaises. "Nous avons de forts soupçons sur une certaine complicité d'intérêts entre Madani Tall, deux industriels ivoiriens et deux commerçants sénégalais qui ont un accord d'exclusivité dans ce genre de trafic", affirme Samuel Ndour dans un entretien qu'il nous a accordé hier.
Et ce ne sont pas des soupçons gratuits. "D'ailleurs, nos investigations nous ont montré que des pratiques malsaines sont développées", poursuit-il. Le président de l'Intersyndicale de la Sonacos de brandir ses preuves. "Le fût d'huile de palme raffinée est vendu en hors taxe à Abidjan à 102 458 F Cfa et à 55 000 F Cfa en exportation. Nous avons aussi constaté que des commerçants déclarent en douane avoir importé de l'huile brute végétale alors qu'en réalité, ils ont importé de l'huile végétale raffinée. Enfin, certains commerçants déclarent l'huile raffinée végétale mise en entrepôt fictif et arrivent à la sortir sans payer les droits normaux", démontre-t-il. Autant de pratiques "tolérées" au vu et su de tout le monde qui poussent les travailleurs à croire qu'il y a des "lobbies tapis dans l'ombre et qui n'ont que pour objectif de démanteler la Sonacos afin de pouvoir asseoir leur mainmise sur le marché sénégalais des oléagineux". Aussi dénoncent-ils toutes ces pratiques qui, selon les travailleurs, "ne profitent qu'à des personnes malhonnêtes et non aux consommateurs sénégalais et encore moins à la filière arachidière".
La gravité de la situation est telle que l'Intersyndicale n'est pas restée les bras croisés. Pour avoir, selon son président, adresser une lettre ouverte à Paul Wolfovitch, le président de la Bm, pour attirer son attention sur cette question. "Les travailleurs de la Sonacos réunis autour de leur Intersyndicale vous prient de bien vouloir exercer toute l'autorité qui sied à votre rang pour que cesse cette magouille entretenue sous couvert de la défense des consommateurs sénégalais qu'on est en train de tuer, en les obligeant à consommer de l'huile végétale raffinée de qualité douteuse", lit-on dans la correspondance signée par le président de l'Intersyndicale. Samuel Ndour dit compter sur Paul Wolfovitch pour que cette épée de Damoclès qui plane sur la tête des travailleurs et dont la conséquence est de leur ôter leurs emplois et les ressources qui leur permettent de nourrir leurs familles respectives, soit à jamais levée.
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