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APRÈS L'OBTENTION DU DIPLÔME Les portes de la galère

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APRÈS L'OBTENTION DU DIPLÔME Les portes de la galère

Le diplôme est censé être la clé du bonheur qui passe par le travail. Depuis quelques années, les étudiants des EPES voient leur diplôme ne leur ouvrir que les portes de la galère. Désillusion, amertume, chômage… une situation qui s’explique par un secteur tertiaire déjà trop saturé.

 

Dans un contexte où il est difficile de trouver du stage, il va sans dire que l’emploi est plus que jamais compromis. Malgré les conventions signées ça et là et proclamées partout, il existe en réalité une vraie cassure entre l’école et l’entreprise. ''Ce sont des vœux pieux qui ne permettent pas d’aller loin. Le cordon ombilical est rompu. Le dialogue n’est pas de mise'', soutient un cadre du marché de l’emploi.

Deux interlocuteurs du secteur bancaire affirment par exemple que les spécificités de la banque ne sont pas prises en compte dans la formation. L’un d’eux n’hésite pas à affirmer tout net : ''si j’ai besoin d’un caissier, je ne  le cherche pas à l’ISM ou à l’IAM. Je regarde d’abord dans le secteur''. A en croire nos interlocuteurs, les banques ne cherchent plus de jeunes diplômés. ''Elles procèdent plus au débauchage''.

Dès lors, il n’est plus surprenant que des diplômés chôment. De plus en plus d'hommes et de femmes prêts pour le monde professionnel restent sans emploi. Et c'est  une fois à la porte du marché de l’emploi que les étudiants découvrent la triste réalité : Ils étaient dans un monde d’illusions.

Une étudiante de l’IAM est restée sans le moindre emploi depuis trois ans. Et pourtant, son père s'est sacrifié pour payer   sa formation. Aujourd’hui, elle ne peut pas s’empêcher de rire de dépit quand elle se souvient de certains propos. ''Au début, tu es plein de rêve. Je me rappelle, on nous disait : si on vous propose un salaire de 300 000 FCFA, il faut refuser, parce que on vous forme en tant que cadre.

Je vivais dans l’utopie. Aujourd’hui, je n’arrive même pas à avoir un boulot à 50 000 FCFA', soupire-t-elle. Une affirmation qui correspond parfaitement avec le profil de sortie dressé par Kaly Camara, directeur des études de l’établissement. ''Nous formons des chefs d’entreprise, des cadres, des managers'', se glorifie-t-il. S’étant déjà heurtée au mur de l’emploi après plusieurs stages, l’étudiante conclut : ''si je n’ai pas d’entreprise, mon enfant n’ira pas dans ces écoles de formation''.

Paul Gningue et ses camarades ont connu le même sort qu'elle. Ils sont de la promotion 2010 de l’école des douanes, un établissement privé. Leur famille ainsi qu’eux étaient convaincus qu’avec la réputation de l’école, ils trouveraient facilement du travail. ''Nos parents nous demandaient si c’est l’école même qui allait nous trouver de l’emploi'', se rappelle-t-il encore. Mais la désillusion fut grande. Las d’attendre un boulot qui ne se signale pas, ils ont fini par créer un cabinet de consultance.

A l’écouter, on sent, malgré la retenue, qu’il est amer contre son école. ''Il y a certaines choses que je ne veut pas dire. Mais les étudiants doivent avoir certaines informations avant de choisir. Il y a plein de choses qu’on ne leur dit pas''.

Flou sur le taux d'insertion

Quant aux responsables des établissements, ils n’ont aucune maîtrise sur leur efficacité externe. Si jamais vous leur demandez le taux d’insertion de leurs diplômés, ils vous donneront des chiffres très peu crédibles, gonflés à l’évidence.  Peu d’entre eux avait pensé à l’insertion.

Le Pr Papa Guèye soutient : ''La majorité des établissements publics comme privés ne sont pas outillés pour donner le taux d’insertion de leurs diplômés. Ils n’ont pas d’indicateurs sur leur efficacité externe. Il y a des privés qui le mettent sur des papiers publicitaires, mais je n’ai pas vu d’études''. Les premières initiatives sont inspirées par l’Autorité nationale d'assurance qualité de l'enseignement supérieur (ANAQ-SUP), parce que cela fait partie désormais des critères d’évaluation. 

Par ailleurs, au-lieu de faire leur mea culpa et de redresser la barre, les responsables préfèrent accuser les étudiants, qu'ils qualifient soit pas assez entreprenants, soit de prétentieux. A l’IAM, le directeur des études M. Camara incrimine : ''Les étudiants qui échouent n’ont pas d’ambition. Après le Bac, ils ne savent pas ce qu’ils veulent. Nous ne pouvons pas les transformer''. Son collègue de l’IMC affirme que la quasi-totalité de la dernière promotion a trouvé refuge sur le marché. ''ceux qui n’ont pas de travail, c’est parce qu’ils font la fine bouche. Ils ne prennent pas les boulots qui s’offrent à eux'', déclare-t-il

Saturation du tertiaire

Si le taux de chômage est devenu aussi élevé, c’est que quelque part, les écoles forment pour un secteur déjà saturé.  ''Il est vrai que le tissu économique sénégalais ne peut pas absorber tous ces diplômés'', avoue le directeur Accréditation et relations institutionnelles de Bordeaux Management School (BEM), El Hadji Malick Faye. Il y a néanmoins quelqu’un comme le directeur de l’IMC qui ne croit pas à la saturation, ni même à un nombre pléthorique d’écoles de commerce. ''Le monde d’aujourd’hui est un monde ouvert. L’essentiel est d’avoir d’abord la formation. Moi j’ai fait la science politique. Rien ne me disait que je serais là aujourd’hui'', argumente Mamadou Gaye.

Dans tous les cas, le constat est unanime. Presque toutes les écoles proposent les mêmes filières, celles du tertiaire. Ce n’est pas pour rien que les gens de l’ISM disent que l’IAM, c’est en fait ISM modifié d’une lettre. Si cette affirmation est valable pour le nom, elle l’est aussi pour les options. Banque, assurance, marketing, communication, ressources humaines, audit… ''Sur les 70 EPES recensés, avance M. Niasse, 59 établissements, soit 84,30%, proposent des formations en commerce, particulièrement en commerce international, en management, en marketing ou en comptabilité. L’informatique que proposent 38 EPES sur les 70, soit 54,29% des  établissements,  vient  en  deuxième  position''.

Cette similitude se fait ressentir jusque dans le choix des sigles. A quelle logique obéissent certains choix ? En guise d’exemple, il y a des cas frappants comme ESTM (École Supérieure de Technologie  et  de  Management)  et  ESMT  (École  Supérieure  Multinationale  de Télécommunications), ESAG  (École  Supérieure d’Administration et de Gestion) et CESAG (Centre Africain d’Études Supérieures en Gestion), Institut de Commerce et de Management (ICM) et Institut de Management et de Commerce (IMC), ISEG et ESSEG, HEC et HEG. Des noms qui ne permettent pas aux élèves et parents de se retrouver facilement.

Toutefois, les EPES ne sont pas les seuls responsables des offres de formation. Il y a aussi un certains nombre de facteurs qui échappent à leur contrôle. Le premier est que l’économie sénégalaise est elle-même essentiellement tertiaire. Le deuxième est le profil des bacheliers. Au Sénégal, 70 à 80% des bacheliers sont des littéraires. Ils ne sont donc pas préparés pour les filières scientifiques. 

D’où le redressement de la barre prôné par les autorités actuels, surtout le duo de scientifiques composé du Président Macky Sall et de son ministre de l’Enseignement supérieur, Mary Teuw Niane. ''Nous avons accrédité dix licences au mois de mars, les 80%, c’est des licences STEM, parce que le ministre, en saisissant l’ANAQ-SUP, a précisé qu’il souhaitait recevoir les bacheliers des licences à orientation STEM'', renseigne le Pr Guèye. 



5 Commentaires

  1. Auteur

    Mml

    En Juin, 2014 (18:05 PM)
    Ca c'est une realite au senegal, depuis 2003 j'arrive pas a trouver du travail.

    Prier pour moi, ce chomage me tracasse
  2. Auteur

    Ndiayed

    En Juin, 2014 (18:48 PM)
    C'est un crime de gâcher l'avenir des jeunes par des promesses mensongères guidées par l'unique appât du gain.

    Ces écoles sont guidées par une logique financière sans vergogne.

    Il n'y a pas plus irresponsable qu'un adulte qui hypothèque l'avenir des faibles esprits que sont ces jeunes bacheliers à qui ils font croire que leurs formations bidons leur offriront un avenir.



    Aux jeunes bacheliers et aux parents d’élèves je leur demande de bien réfléchir avant de s’inscrire (ou inscrire leur gosse). Une seule question: demander à l’école la preuve de la reconnaissance de ses diplômes par le CAMES.

    +90% vous diront que leur dossier est en cours d'étude: comprendre leurs formations ne valent pas un clou.



    Très peu de formations privées sont reconnues. Ce n'est pas une preuve de sérieux mais c'est un bon début.

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    Auteur

    Peuls,

    En Juin, 2014 (19:29 PM)
    Depuis 2000, il n'y a aucun diplôme livré par les écoles publiques, de tous les niveaux, qui a une valeur! L'ignorance affligeante, l'inculture exponentielle qui caractérisent ceux-celles qui exhibent leurs diplômes mal acquis, en sont des preuves évidentes. L'école sénégalaise est sinistrement malade! Cette maladie s'est accentuée-amplifiée sous le régime fasciste-corrompu du fasciste-corrompu-sénile-sinistre wade & sbires & certains-es & certainisés-es & archi-faux religieux du funeste axe de tous les maux. Cette décadence de l'école sénégalaise a été programmée par ces fléaux, pour n'avoir en face d'eux que des moutons, afin de vaquer sans obstacles à leurs macabres desseins. Un Jeune bien éduqué, instruit, formé, informé, ne réserverait jamais une seconde aux archi-faux religieux du funeste axe de tous les maux & affluents, bouffeurs insatiables de harams-ribas, adeptes de l'exploitation sordide de la Foi religieuse à des fins purement mercantilistes. Des diplômes-es qui ne connaissent rien de leur pays, ne parlent-n'écrivent pas correctement la langue officielle, ne savent rien des réalités réelles du monde civilisé, sinistrement incompétents-incapables.... Pauvre & triste Sénégal! PEULS.
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    Auteur

    Montréalais

    En Juin, 2014 (02:44 AM)
    Le problème c'est que les banques veulent de la main d'oeuvre à bas marchésoit des stagiaires avec des CDD renouvellés ad vitam eternam. J'ai eu l'occasion de discuter avec quelques directeurs de banques avec toute l'expérience acquise au Canada par le biais de proches ou qu'ils étaient des anciens collègues.Quand je suis sorti de la réunion, j'ai compris une chose le retour au pays c'est uniquement en tant qu'entrepreneur Inchallah. Je me dirige vers cette voie.Mon cursus universitaire me le permet.Celui qui veut travailler au pays ce ne sont pas les diplômes qui te font avancer mais les contacts que tu as et c'est la même chose à Montréal où je suis.Celui qui croit en Dieu et met son destin entre ses mains ne se rabassera jamais auprès d'un homme pour bénéficier d'un emploi ou d'une quelconque faveur.Les écoles de formations se sont des arnaqueurs et malheureusement les gens par peur du chômage vont les suivre.Il faut revoir notre curssu scolaire pour permettre aux gens de faire des mini formations adaptés au marché du travail et aussi qui encourage l'entrepreunariat
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    Auteur

    Ndiayed

    En Juin, 2014 (12:25 PM)
    Un sujet aussi important: Que 6 réactions depuis hier.

    Dans ce pays tant qu'on parle de sexe, de lutte, de danse ou de marabouts y'aura du monde. Dés qu'on commencer à parler de choses sérieuses y'a plus personne!



    Inutile de rêver: nous n'irons nulle part!

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