Étudiante en 3e année, la demoiselle Nogaye Dieng (c’est un nom d’emprunt) risque pendant de longs mois de ne pas suivre ses cours à l’université Cheikh Anta Diop de Dakar où elle est régulièrement inscrite au département d’anglais.
Après s’être acquittée de ses tâches ménagères dans le domicile familial à la ZAC de Mbao, la demoiselle qui a pris congé de sa mère pour se rendre à ses « cours» muni d’un sachet de couleur bleue est descendue du car juste devant l’entrée du cimetière où reposent les victimes du naufrage du bateau le MS-Le Joola, dans la forêt classée de Mbao. Après s’être assurée que personne ne la suivait, l’étudiante s’est introduite dans la nécropole et y a abandonné le sachet. Mais, comme aucun crime n’est parfait, un passant ayant remarqué le comportement peu orthodoxe de la jeune dame s’est approché du sachet pour se faire une idée. Surpris par le contenu du sac, l’homme dans une course folle a intercepté la fille et l’a conduite à la brigade de gendarmerie de la zone franche industrielle. L’adjudant Cheikh Mbacké Fall en compagnie de ses hommes, de l’étudiante et du flâneur, s’est rendu sur les lieux. Un bébé de sexe féminin, encore vivant, sera découvert dans le sachet. Le nouveau-né a été acheminé à la maternité du district sanitaire de Mbao. Coupable d’abandon et de tentative d’homicide, l’étudiante conduite dans les locaux de la gendarmerie et livrée aux enquêteurs a reconnu les faits. Après quarante-huit heures de garde-à-vue, elle a été déférée au parquet.
Une grossesse a failli lui faire perdre son Bac
Inconnue des archives de la police judiciaire, l’étudiante, fille d’un homme de tenue, a déjà connu des grossesses non désirées. Enceinte des oeuvres d’un copain, Nogaye Dieng a jeté le déshonneur sur sa famille et a été obligée de connaître une pause dans ses études au moment où elle devait passer son Bac. Cette brouille dépassée, Nogaye passera ses examens avec succès sans que le moindre reproche ne lui soit venu de sa famille. Entre temps, partagée entre trois amours, elle verra sa vie basculer vers le courant mai de l’an 2006. Ayant appris qu’elle est enceinte, elle a caché son état à sa famille et à son entourage. C’est ainsi que jouant de subterfuge, elle réussira le coup de la dissimulation jusqu’au lundi 19 février. « Ce jour, raconte-t-elle, vers 19 heures, je suis montée à la terrasse et j’y ai accouché d’une fille». Sans l’aide de personne, elle prendra le soin de nettoyer le bébé et débarrasser le plancher des traces de sang. « Ensuite, après avoir pris le soin de me nettoyer, j’ai laissé le bébé dans un coin et suis repartie en bas pour me coucher». Abandonné dans un coin de la terrasse, le bébé sera récupéré. Ce matin du mardi 20 février, après avoir fini ses travaux domestiques, Nogaye munie du sachet dans lequel elle a mis son bébé a pris congé de sa mère pour la Faculté.
L’abandon comme solution.
Interpellée par les enquêteurs, Nogaye soutient que «partagée entre trois amours, elle ne savait pas qui était le père de son enfant». L’un de ses copains, étudiant comme elle, n’a pas les moyens de subvenir aux besoins d’un bébé. « D’ailleurs, soutient-elle, si je le lui avais dit, il aurait refusé de le reconnaître». Le Second, chauffeur de clando avec qui elle partage le même quartier a quitté le Sénégal depuis quelques mois pour l’Italie. Père par défaut et le seul qui bénéficie de moyens substantiels, Diallo, le vendeur de bananes sur la rue Sandinièry, à Dakar vers qui elle est allée, «ne veut rien entendre». Alors, n’ayant plus aucune solution, elle a pris la moins mauvaise : l’abandon. Pourtant, au cours de son passage devant la sage-femme, celle-ci a déclaré avoir reçu Nogaye en consultation dans un passé récent. «Ce jour, soutient la sage-femme, après avoir avorté clandestinement, elle est venue prendre des soins au dispensaire». Elle n’avait jamais soutenu qu’elle venait de commettre une interruption volontaire de grossesse.
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