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Youssou N'Dour : « Je vais m'impliquer »

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Youssou N'Dour : « Je vais m'impliquer »

L'ENTRETIEN DU DIMANCHE - Défenseur de l'Afrique, le chanteur Youssou N'Dour, patron de presse et banquier des mal-lotis, veut peser dans la vie politique du Sénégal, son pays

Youssou N'Dour soutiendra clairement un candidat à la présidentielle au Sénégal. (photo maxppp)

« Sud Ouest Dimanche ». Pourquoi avez-vous décidé de réaliser un album reggae ?

Youssou N'Dour. Le reggae et moi, c'est une vieille histoire. Elle remonte à mon adolescence : je passais mes samedis et dimanches avec un de mes oncles à écouter Peter Tosh, Burning Spear et, bien sûr, Bob Marley. Il y a vingt ans, quand je suis devenu chanteur professionnel, un de mes grands amis m'avait demandé d'essayer ma voix sur des rythmes reggae. L'idée me plaisait, mais je ne me sentais pas prêt. Ce n'est que l'an dernier que j'ai accepté la proposition du Festival mondial des arts nègres, qui se tiendra en décembre à Dakar pour le cinquantenaire des indépendances africaines : on y célébrera les grandes figures intellectuelles, politiques et artistiques du monde noir, parmi lesquelles Bob Marley. Et j'ai été désigné pour lui rendre hommage. Ainsi est née l'idée de cet album.

Vous avez 50 ans, le même âge que la plupart des États africains. Quel bilan tirez-vous de ce demi-siècle d'indépendance du continent ?

La seule idée de se dire que nos pays sont aujourd'hui indépendants est en soi un grand acquis. Mais il reste beaucoup de choses à faire pour que ces indépendances aient leur vrai sens. Si, au niveau culturel, par exemple, nous sommes largement libres, ce n'est pas vraiment le cas au plan économique, où les ressources du continent bénéficient plus à des entreprises étrangères qu'aux Africains eux-mêmes, c'est-à-dire aux petites gens, paysans, ouvriers, jeunes, femmes, etc.

L'étranger n'est pas l'unique responsable de cette situation. Nous, Africains, avons aussi nos responsabilités, nos gouvernants en premier. Ils dilapident les richesses, gèrent de façon très opaque l'argent public, laissent la corruption se répandre, négligent les secteurs essentiels pour tout développement comme l'éducation, la santé, l'agriculture. Or, des pays mal gouvernés ne peuvent jamais être indépendants.

Le Sénégal est-il bien gouverné ?

Le pays a progressé sur beaucoup de plans. La démocratie est devenue une valeur sénégalaise, bien ancrée dans les mentalités. Ces dernières années, le pays a connu d'importantes améliorations en termes d'infrastructures et lancé un grand plan en faveur de l'agriculture. Mais jusqu'ici, cela n'a pas changé la vie de la grande majorité des Sénégalais, c'est d'autant plus regrettable que le pays ne semble manquer ni de richesses, ni d'argent, ni de compétences. Comme partout en Afrique, il faut que la bonne gouvernance soit une priorité au Sénégal.

C'est la première fois qu'on vous entend tenir de tels propos sur votre pays, jusqu'ici vous vous êtes plutôt distingué en jouant les porte-voix de l'Afrique sur la scène internationale...

Je n'ai jamais été indifférent à ce qui se passe au Sénégal. J'y suis si attaché que je suis prêt à mourir pour mon pays. Malgré mes possibilités, je n'ai jamais habité ailleurs qu'à Dakar, et tout ce que j'ai gagné comme argent, je l'y ai investi. Dans mes chansons, j'ai toujours abordé les préoccupations des Sénégalais, surtout des plus faibles. Toutefois, il est vrai que je n'ai jamais affiché mes préférences politiques. Pendant les élections, je n'ai jamais soutenu un candidat, un parti ou une coalition quelconque. Aujourd'hui, j'ai changé d'avis. Je vais désormais m'impliquer publiquement sur la scène politique.

Vous voulez vous présenter à la prochaine présidentielle en 2012 ?

Pas du tout. Le Sénégal n'a pas besoin de moi à ce niveau. Il y a des hommes politiques très compétents pour diriger le pays. Cependant, je soutiendrai clairement l'un d'entre eux, celui qui me paraîtra le mieux indiqué pour présider le pays.

Est-ce un message au président Abdoulaye Wade et son fils Karim, avec lesquels vous avez eu des soucis ces dernières années ?

Je n'ai pas de problème avec la famille du président Wade. Il y a eu un différend entre Karim Wade, le fils du président, et le quotidien « L'Observateur », qui, avec la radio RFM, appartient au groupe de presse que je dirige. Il a été réglé devant les tribunaux. Karim Wade, qu'un journaliste de « L'Observateur » avait accusé de transfert illégal de devises, avait porté plainte pour diffamation et il a gagné. L'affaire est close, et Youssou N'Dour n'y est pas mêlé. Je ne dirige pas les rédactions de mon groupe. Je découvre leur production comme tout le monde, en lisant le journal ou en écoutant la radio. Personnellement, je n'ai donc aucun problème avec la famille Wade.

Même au sujet de votre projet de chaîne de télévision que le pouvoir freine ?

C'est vrai que lorsque j'ai décidé de doter mon groupe de presse, Futurs Médias, d'une chaîne de télévision, j'avais reçu l'accord et les encouragements du président de la République. L'Agence de régulation des télécommunications a attribué un canal à mon groupe. Malgré cela, depuis six mois, je n'arrive pas à lancer ma télévision, au motif que le ministère de la Communication n'est pas prêt pour la cérémonie de lecture du cahier des charges, obligatoire avant toute diffusion. Le projet m'a coûté 1,2 milliard de francs CFA (1). 100 emplois seront créés. 2 millions de Sénégalais ont signé une pétition pour que cette chaîne puisse démarrer. J'attends donc toujours.

Le pouvoir soupçonne cette chaîne de ne pas être la vôtre, mais celle de l'homme d'affaires français Vincent Bolloré, qui serait en « guerre » avec la famille Wade depuis qu'il a perdu la gestion du port de Dakar...

Je n'ai besoin de personne pour financer une chaîne de télévision, et Vincent Bolloré a lui-même écrit qu'il n'a jamais été associé à ce projet de télévision.

Je suis le principal bailleur de fonds de cette chaîne.

Vous avez lancé dernièrement une mutuelle de microcrédit. Il semblerait qu'elle peine à attirer les populations ?

Au contraire, elle marche très bien. À travers les deux centres déjà ouverts, 2 000 personnes y sont aujourd'hui affiliées.

Son succès est tel que je songe à lancer une vraie banque généraliste. J'y travaille en ce moment, avec le fonds d'investissement sud-africain Africap.

Vous êtes, dit-on, l'homme le plus riche du Sénégal. Est-ce vrai ?

J'ai sans doute suffisamment d'argent pour financer mes activités, mettre ma famille à l'abri et lui assurer son avenir. Mais je ne suis pas du tout le plus riche du Sénégal.

Le magazine américain « Time » vous a classé, en 2007, parmi les 100 personnalités les plus influentes du monde. Qu'est-ce que cela vous fait ?

Je mentirais si je disais que ça me laisse indifférent. C'est très touchant de savoir que l'on figure dans une telle liste. Je considère cette distinction comme un encouragement à continuer à travailler avec rigueur et soutenir les causes justes.

(1) 1 829 000 euros environ.

Source : Sudouest.com

Nous nous excusons auprés de nos lecteurs et des sites ouestaf.com et sudouest.com pour avoir initialement credité la source de cette interview  à ouestaf.com au lieu de SUDOUEST.COM. Merci de votre compréhension et bonne lecture!



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