La fillette divorcée à l'âge de dix ans se fait voler par son père

En 2008, Nojoud Ali était devenue la plus jeune divorcée du Yémen. Son livre "Moi, Nojoud, 10 ans, divorcée" a été traduit en 16 langues et s'est vendu dans 35 pays. Son père aurait utilisé l'argent des royalties pour se marier et prévoit de marier la soeur cadette de Nojoud, rapporte le journal The Guardian.Cela fait cinq ans que Nojoud Ali est devenue la plus jeune divorcée du monde après avoir fui l'homme qui l'avait achetée lorsqu'elle avait neuf ans. L'histoire de Nojoud et de sa victoire juridique avait été racontée dans un livre devenu un best-seller. Cela avait redonné de l'espoir à des milliers de yéménites mariées de force à un âge où elles sont trop jeunes pour donner leur consentement. Les royalties découlant des ventes de "Moi, Nojoud, 10 ans, divorcée" étaient censées servir à payer la scolarité de la jeune fille et lui permettre de réaliser son rêve: devenir avocate. Au lieu de cela, l'argent a été gaspillé par son père, qui a vendu la soeur cadette de Nojoud à un homme deux fois plus âgé qu'elle. "Mon père a dépensé tout l'argent pour se marier, à deux reprises", raconte-t-elle. Aujourd'hui âgée de 15 ans, elle a encore du mal à parler de son mariage et de son ex-mari. "Il a maintenant quatre femmes, 14 enfants et n'a tiré aucune leçon de ce qui s'est passé. Il me verse entre 20 et 30 dollars par mois en guise d'argent de poche". Le supplice de Nojoud Ali avait débuté lorsqu'elle avait été mariée par son père à l'âge de neuf ans, pour une dot d'à peine plus de 750 dollars. Son futur mari, Faez Ali Thamer, avait promi d'attendre "l'année de ses premières règles" pour avoir des relations sexuelles avec elle, comme l'exige la loi yéménite. Mais la jeune fille a été abusée physiquement et sexuellement dès le soir du mariage. Deux mois plus tard, lors d'une visite à sa famille, elle avait décidé de s'échapper et de demander un divorce auprès de la justice. C'était une première au Yémen et l'affaire avait attiré les foules. Le père et le mari de la fillette avaient été brèvement emprisonnés pour avoir menti sur l'âge de Nojoud. Le livre de son histoire a été écrit par Delphine Minoui et publié en France, puis traduit dans 16 langues et vendu dans 35 pays. L'éditeur, Michel Lafon, était d'accord pour verser 1.000 dollars par mois au père, Ali Mohammed al-Ahdel, jusqu'aux 18 ans de la fille. Une grande maison a également été achetée pour la famille et un fonds est versé directement à l'école pour sa scolarité. Seulement voilà, Nojoud a déclaré qu'elle n'avait pas touché un centime de l'argent versé à son père. Elle a indiqué que son père louait le premier étage de la maison à une autre famille. "Il m'a demandé de partir et d'aller vivre avec mon grand frère dans sa miniscule maison". Sa soeur, Haifa Ali, a récemment été fiancée à un homme qu'elle ne connaît pas. "Je ne veux pas me marier. J'ai très peur parce que la dot a déjà été payée et je veux continuer ma scolarité". Haifa est interrompue par Nojoud, sa colère dépassant sa timidité: "Je ne laisserai pas ça passer. Je parlerai à un maximum de journalistes et d'avocats. Tout cela est illégal." Le père a refusé de parler au Guardian mais l'éditeur dit tenter de rectifier la situation. "Légalement, nous ne pouvons pas payer Nojoud directement au Yémen et il est parfois très difficile de savoir ce qu'il se passe depuis la France", a déclaré Margaux Mersie, représentante des éditions Michel Lafon. "Le problème est que beaucoup de juges soutiennent le père". La fille est déterminée à aller étudier en Angleterre pour devenir avocate. "Comparée aux rêves, la réalité est parfois cruelle. Mais la vie nous réserve parfois de belles surprises", conclut la jeune fille, avec une maturité surprenante.