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ACCUSATION - TENTATIVE DE PUTSCH CONTRE YAYA JAMMEH : L’Ambassadeur du Sénégal dans le «coup»

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ACCUSATION - TENTATIVE DE PUTSCH CONTRE YAYA JAMMEH : L’Ambassadeur du Sénégal dans le «coup»

Tentative de renversement de Yaya Jammeh : L’ambassadeur du Sénégal «mouillé» par les putschistes

Envoyé spécial à Banjul - A Dakar, la population est tenue éloignée d’une grave crise qui couve entre le Sénégal et la Gambie. Le régime du Président Yaya Jammeh accuse ouvertement les autorités sénégalaises, d’aide et d’assistance aux auteurs de la tentative de putsch du 21 mars 2006. En réaction, le Sénégal, qui a longtemps fait la sourde oreille, a fini par rappeler, pour consultation, l’ambassadeur Ndiouga Ndiaye. Faudrait-il craindre le pire ? Des dizaines de personnalités supposées mêlées à la tentative de coup d’Etat sont déjà arrêtées ; y compris le président de l’Assemblée nationale gambienne, Shériff Mustapha Dibba.

Le gouvernement du Sénégal publiquement accusé, d’intelligence avec les auteurs de la tentative de coup d’Etat contre le régime du Président Yaya Jammeh, le 21 mars dernier ! Voilà l’énorme coup de tonnerre qui déchire le ciel des relations diplomatiques entre Banjul et Dakar, depuis quelques jours. Les 28 et 30 mars dernier, la télévision et la radio nationale gambiennes ont passé, en boucle, les aveux circonstanciés d’un certain Tamsir Jasseh, ancien directeur des services de l’Immigration, qui impliquent gravement les autorités sénégalaises dans la tentative de putsch qui a échoué une semaine auparavant, en Gambie.

Tamsir Jasseh indiquait notamment : «Dans le cadre des préparatifs du putsch dirigé par le Colonel Ndure Cham, chef d’Etat-major de l’Armée, il avait eu à s’entretenir du «projet» avec l’ambassadeur du Sénégal à Banjul, Son Excellence Ndiouga Ndiaye. M. Jasseh qui affirmait avoir été dépêché, à cet effet, auprès du diplomate sénégalais par le Colonel Ndure Cham, a précisé que la proposition avait été faite aux autorités sénégalaises de préparer un contingent de soldats à pré-positionner à la frontière entre les deux pays.»

Ainsi, a-t-il poursuivi, l’ambassadeur du Sénégal aurait pris acte de l’«affaire». C’est plusieurs jours plus tard, poursuit Tamsir Jasseh, qu’une personne se présentant au nom de Pape Seck, un militaire sénégalais, prendra contact avec lui pour discuter de l’affaire.

«La révélation» a fait grand bruit dans les milieux politiques et diplomatiques en Gambie. Si le Sénégal n’a pas estimé devoir s’associer au «coup», «pourquoi se serait-il gardé d’en informer les autorités gambiennes ?», s’interroge-t-on à Banjul. Aussi, les autorités gambiennes ont-elles réclamé, vainement jusqu’ici, l’arrestation et l’extradition de Ndure Cham qui se trouverait en Casamance. Il reste que le Président Wade, comme le révèle le communiqué du Conseil des ministres de la semaine dernière, a déclaré fermement que «le Sénégal ne saurait servir de sanctuaire pour des auteurs de coup d’Etat». Toutefois, l’inaction de Dakar face aux accusations portées exaspère le régime du Président Jammeh. A tel point que le journal gambien, Daily Observer dont les dirigeants sont de proches collaborateurs du chef de l’Etat gambien, n’a pu contenir sa colère. Dans un éditorial au vitriol, publié dans son édition n° 360 du mercredi 5 avril 2006, le journal met les pieds dans le plat en accusant directement l’ambassadeur du Sénégal et son gouvernement d’avoir aidé et assisté les putschistes. Le refus des autorités diplomatiques sénégalaises de commenter les faits, quand elles ont été sollicitées par des journalistes gambiens, semble renforcer la suspicion qui pèse sur le Sénégal.

«La situation est grave et très préoccupante», nous confie un diplomate occidental en poste dans la capitale gambienne. De toute façon, l’éditorial du journal Daily Observer semble être l’accusation de trop. L’ambassadeur Ndiouga Ndiaye a été rappelé depuis trois jours, en «consultation», à Dakar. Certains fonctionnaires de l’Ambassade du Sénégal, sise au quartier «Pipe-Line» à Banjul, disaient encore leurs soucis jeudi dernier. Qu’adviendrait-il de cette nouvelle crise diplomatique entre les deux pays ? En tout cas, la situation en est lourde de menaces et, à Banjul, tout le monde retient son souffle.

ARRESTATIONS TOUS AZIMUTS

Dans la ville, on vit la peur au ventre. «Nobody is safe» (Ndlr : Personne n’est en sécurité), nous déclare un journaliste, ancien collaborateur de Deyda Haïdara, le directeur de The Point, assassiné par des personnes qui auraient agi pour le compte du régime du Président Jammeh. En fait, dans la capitale gambienne, chaque jour, les colonnes des journaux charrient les listes des personnalités civiles et militaires arrêtées. «Plus de quarante personnes sont déjà détenues dans cette affaire de tentative de putsch», souligne un homme politique, responsable d’un parti d’opposition. Les agents de la National intelligence agency (Nia) n’épargnent même pas de très fortes personnalités du régime en place.

Ainsi, le président de l’Assemblée nationale, Shériff Mustapha Dibba, a été arrêté à une heure du matin, jeudi dernier, à son domicile. Deux autres députés avaient, eux aussi, été mis aux arrêts. Au petit matin, du même jour, une célèbre avocate, connue pour défendre les leaders de l’opposition, Mme Mariam Denton, a été cueillie à son domicile par une escouade de militaires, lourdement armés. Dans le lot des personnes arrêtées, on dénombre l’adjoint au directeur de la Nia, ainsi que des hommes d’affaires, des marabouts, de jeunes militaires et l’épouse du Colonel Ndure Cham. Dans la soirée du lundi 3 avril 2006, quelque quatorze personnes arrêtées dans le cadre de la tentative de putsch avortée, avaient été relâchées. Dans le groupe, on a remarqué notamment l’avocat Antouman Gaye.

SORT INCERTAIN DES DETENUS

La population reste sans grandes nouvelles des personnes arrêtées : «Il arrive que la Nia publie les aveux des présumés putschistes à la radio, à la télévision nationale et dans certains journaux, mais on ne sait pas grand-chose des conditions de leur détention.» Toutefois, dans la soirée du mardi 4 avril 2006, le bureau de l’inspecteur général de la police a annoncé l’évasion de cinq suspects. Ces personnes recherchées sont Daba Maréna, Lt. Ebou Lowe, Lt. Alieu Ceesay, le sous-officier Alpha Bah et le sergent-chef Manlafi Corr. La Nia devait transférer les détenus à une prison située à Janjanbureh, dans le centre du pays. L’évasion aurait été rendue possible par l’accident du fourgon cellulaire. Toutefois, de nombreuses personnes doutent de cette version officielle. «Comment ces personnes auraient pu aussi facilement se fondre dans la brousse, de surcroît dans le secteur très hautement gardé de Kanilaye, le village natal du chef de l’Etat, où ce dernier passe d’ailleurs le plus clair de son temps ?» Un militant d’une organisation humanitaire se demande si les personnes présentées, comme activement recherchées après leur évasion, n’ont pas déjà été passées aux armes. Par le passé, les auteurs de tentative de coup d’Etat contre Yaya Jammeh étaient passés aux armes, sans autre forme de procès.

LES JOURNALISTES PAIENT LEUR TRIBUT

Dans cette atmosphère de tension politique, les journalistes ne sont point épargnés. «Franchement, je ne dors plus. Je crains d’être réveillé à une heure tardive de la nuit pour être embarqué par les militaires ou que ma maison ou mon bureau soit incendié ou même que je sois violenté. N’est-ce pas que notre confrère Deyda Haïdara a été tué et personne n’a été inquiété pour ce meurtre ?», fulmine un éditorialiste.

Deux journalistes de The Independant, Musa Saidykhan et Madi Ceesay, sont encore entre les mains des forces de sécurité, depuis une dizaine de jours. Le journal The Independent est depuis lors fermé et les locaux surveillés par la police. Personne n’a de nouvelles des journalistes arrêtés et détenus dans les locaux de la Nia. Les familles des journalistes détenus n’avaient encore aucune nouvelle de leurs proches, après plus de huit jours de détention. «Nous n’avons pas pu les voir ; les militaires acceptent simplement de prendre les repas que nous leur portons, mais aucun contact avec les détenus n’est possible», se lamente l’épouse de Musa Saydikhan. Mme Ceesay est aussi dans la même situation. Les protestations des organisations internationales de droits de l‘Homme et des journalistes ne semblent servir à rien. Dans un communiqué publié, mercredi dernier, des organisations de la société civile et les associations de journalistes ont dénoncé les violations aux droits les plus élémentaires des journalistes. La loi gambienne exige que toute personne arrêtée par la police soit présentée devant un juge après trois jours de garde à vue.

Même le ministre de l’Information et de la Communication, Neneh Mc Douall Gaye, a posé un lapin à une délégation dépêchée à Banjul par le Forum des éditeurs africains. Les journalistes de The Independent sont accusés d’avoir publié un article qui s’interroge sur la fortune du Président Jammeh et le train de vie princier de ses proches.

Peur sur la ville de Banjul, à deux mois du Sommet de l’Union africaine (Ua), prévu dans cette ville en juin prochain.



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