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France : La régularisation de travailleurs sans-papiers bientôt facilitée

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France : La régularisation de travailleurs sans-papiers bientôt facilitée

On les a vus, en mai, occuper le res taurant Buffalo Grill de Viry-Châtillon (Essonne) ou, en mars, lutter contre leur expulsion alors qu'ils travaillaient depuis des années à la Cooperl, l'abattoir de Montfort-sur-Meu (Ille-et-Vilaine) : les travailleurs sans papiers aujourd'hui employés dans l'illégalité par des entreprises françaises vont pouvoir déposer une demande de régularisation. 

Cette nouvelle disposition, ajoutée par un amendement parlementaire au projet de loi sur la maîtrise de l'immigration, est passée inaperçue, occultée par la polémique sur l'usage de tests ADN en matière de regroupement familial.

Voté à l'unanimité à l'Assemblée nationale – avec l'aval du gouvernement – et dans les mêmes termes au Sénat, le texte répond, selon ses auteurs, les députés Frédéric Lefebvre (UMP), Yves Jégo (UMP) et Nicolas Perruchot (UDF-Nouveau Centre), à la volonté du président de la République d'accroître la part de l'immigration économique dans les flux migratoires. Le Parlement doit adopter définitivement la loi le 23 octobre.

"A titre exceptionnel, il est nécessaire de pouvoir régulariser des travailleurs", souligne l'exposé des motifs du texte. Il s'agit de "donner la faculté à l'autorité administrative de régulariser un étranger sous la réserve qu'il trouve un travail dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement".

L'idée est née, au printemps 2006, d'un débat entre Frédéric Lefebvre, alors conseiller parlementaire du ministre de l'intérieur Nicolas Sarkozy, et le député (Verts) Noël Mamère, au moment où le Parlement, examinant la précédente loi sur l'immigration, s'apprêtait à supprimer la régularisation de plein droit des étrangers au bout de dix années de présence en France.

"AU CAS PAR CAS"

Pour le gouvernement, cette régularisation était une prime à la clandestinité. "M. Mamère faisait valoir que nombre d'étrangers, en dépit de toutes les difficultés rencontrées, avaient montré une grande obstination à rester en France et trouvé les moyens de se construire une vie", se souvient M. Lefebvre. Sensible à cette argumentation, le conseiller de M. Sarkozy s'était alors mis à travailler sur un amendement. Il précise n'avoir pas réussi, à l'époque, à trouver une rédaction qui satisfasse le ministère de l'intérieur, "plutôt hostile à l'idée".

La nouvelle possibilité ainsi offerte de régulariser les travailleurs relève du "bon sens", estime M. Lefebvre. "A partir du moment où nous définissons des secteurs économiques en tension, avec l'idée de faire appel à des étrangers pour les soulager, regardons déjà sur notre territoire s'il n'y en a pas des compétents pour répondre aux besoins, et donnons pour cela la possibilité au préfet de régulariser ces personnes, au cas par cas", explique-t-il.

Pour le gouvernement, ouvrir la possibilité d'un titre de séjour aux étrangers justifiant d'une promesse d'embauche ne revient "en aucune façon à s'engager sur la voie d'une régularisation massive".

"La loi de 2006 a abrogé la régularisation de plein droit au bout de dix ans mais elle a créé un dispositif d'admission exceptionnelle au séjour pour des motifs humanitaires, précise un conseiller du ministre de l'immigration, Brice Hortefeux. Grâce au nouvel amendement, ce sera aussi possible pour des motifs économiques, pour des étrangers témoignant de leur capacité d'intégration par le travail." Mais, insiste ce conseiller, "cela restera exceptionnel et se fera au cas par cas, la lutte contre le travail illégal restant la priorité numéro un."


La France rejoint ainsi certains de ses voisins européens. Entre 2003 et 2006, en Italie, les gouvernements de Romano Prodi et Silvio Berlusconi ont régularisé plus de 1,1 million de personnes sur la foi d'un contrat de travail. En 2005, l'Espagne de José Luis Rodriguez Zapatero a fait de même pour 600 000 travailleurs, qu'il appartenait aux patrons de présenter à la régularisation. Fin 2006, l'Allemagne a aussi proposé un titre de séjour à quelques dizaines de milliers de personnes justifiant d'un emploi.

L'impact de la mesure "peut être important", estime le député Yves Jégo. Le 9 juillet, Nicolas Sarkozy avait fixé au ministre de l'immigration, Brice Hortefeux, d'élever l'immigration de travail à 50 % des flux d'entrées durables dans le pays. "Puisque l'idée est de favoriser l'immigration économique, c'est un moyen qu'elle puisse se faire non pas depuis l'étranger, mais depuis notre territoire", soutient le député de Seine-et-Marne.

VIVIER DE PERSONNEL

Le nombre de sans-papiers en France est estimé entre 200 000 et 400 000. Ils répondent aux besoins des secteurs aux conditions de travail difficiles, qui rencontrent des difficultés endémiques de recrutement : l'agriculture, le bâtiment, l'hôtellerie et la restauration… Devant les directeurs régionaux et départementaux du travail et de l'emploi, lundi 24 septembre, M. Hortefeux avait souligné que 470 000 offres d'emploi restaient non pourvues en France, "parce que – pourquoi le nier – il s'agit de métiers que nos citoyens ne veulent pas exercer".

"Dans certains départements marqués par de fortes pénuries de main-d'œuvre, le préfet pourra procéder à de nombreuses régularisations. Dans d'autres, ce ne sera pas utile", souligne le député Frédéric Lefebvre, "convaincu que la mesure peut très bien fonctionner". Elle offrira aux préfets, ajoute le député UMP des Hauts-de-Seine, une nouvelle voie pour sortir de situations parfois inextricables "faute de base juridique". Tel était le cas des salariés sans papiers, démissionnaires ou licenciés, de Buffalo Grill, dont 20 seulement sur 68 ont obtenu une régularisation (Le Monde des 15 juin et 7 juillet).

L'entreprise qui jouera le jeu encourra-t-elle les sanctions prévues dans le code pénal pour les employeurs d'étrangers sans titre (3 ans de prison) ? "C'est un dispositif totalement nouveau dans notre droit", reconnaît M. Lefebvre. "Il ne s'agit pas de donner un guichet de régularisation aux employeurs voyous", affirme M. Jégo.

Selon André Daguin, président de la Fédération des métiers et de l'industrie de l'hôtellerie, cette nouvelle mesure offrira un vivier de personnel aux entreprises, "notamment pour le recrutement de saisonniers" et"assainira la situation dans le secteur".

Les associations de soutien aux étrangers se montrent, elles aussi, favorables à une telle disposition, mais se disent prudentes. "La régularisation relèvera du pouvoir discrétionnaire des préfets, ce qui laisse craindre des différences de traitements illégitimes, qui seront difficiles à expliquer aux personnes, relève Nathalie Ferré, présidente du Gisti. Et il ne faudrait pas que cela se traduise, comme lors de la régularisation exceptionnelle de l'été 2006, par un engouement au départ mais au final très peu de régularisations, et le risque pour les déboutés d'être interpellés."



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