La pression est encore montée d'un cran dimanche en Guinée pour obtenir le départ président Lansana Conté, qui a de son côté appelé la population et l'armée à "rester unis" au douzième jour d'une grève générale illimitée dont le bilan s'élève à 10 morts.
"Ceux qui veulent le pouvoir doivent attendre leur tour. C'est Dieu qui donne le pouvoir et quand il le donne à quelqu'un, tout le monde doit se tenir derrière lui", a lancé le président Conté, au pouvoir depuis 1984, dans une brève allocution retransmise dimanche par la Radio-télévision guinéenne (RTG).
"Les Guinéens doivent rester unis, surtout les soldats. Je vous demande de rester unis et de ne pas suivre les syndicalistes, qui ont outrepassé leur domaine en allant sur le terrain politique", a-t-il ajouté dans un discours prononcé en soussou, une des langues les plus parlées à Conakry.
Agé de 72 ans, affaibli depuis plusieurs années par la maladie, le président Conté a prononcé cette déclaration lors d'une rencontre samedi soir avec des militaires et épouses de militaires du camp Samory, dans le centre de Conakry, où est située une de ses résidences.
Dans le même temps, les manifestants ont réclamé de plus en plus ouvertement le départ du chef de l'Etat, le jugeant incapable de gouverner et le tenant responsable des maux - corruption, misère, insécurité - qui afflige ce pays d'Afrique de l'ouest, pourtant premier exportateur mondial de bauxite.
Dimanche, environ 2.000 personnes, principalement des femmes, ont manifesté dans le calme à Labé (centre) pour demander le départ du chef de l'Etat. "A bas le général!", "Adieu Conté!", "Changement forcé, vive la République!", pouvait-t-on notamment lire sur les banderoles.
Après l'intervention de la police, venue disperser la manifestation, un groupe de jeunes a incendié la maison de Brada Dramé, préfet de Dubreka, une ville proche du village natal du président Conté.
Vendredi, le préfet avait organisé une manifestation de soutien au chef de l'Etat.
La détérioration de la situation a suscité de vives préoccupations en Afrique.
Une mission de médiation régionale des présidents sénégalais Abdoulaye Wade et nigérian Olusegun Obasanjo, à la demande de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'ouest (Cedeao), est attendue pour les prochains jours à Conakry.
"Cette médiation est inopportune et inutile. Ils risquent de noyer le poisson. Le président a démontré qu'il est inapte à exercer le pouvoir. Il faut qu'il parte. On va trouver une solution à la guinéenne, dans le respect de la légalité et des institutions", a déclaré à l'AFP Jean-Marie Doré, responsable de l'Union pour le Progrès de la Guinée (UPG), un des principaux partis d'opposition.
De son côté, le président de la Commission de l'Union africaine (UA), Alpha Oumar Konaré, a envoyé une lettre au président guinéen pour l'exhorter à dialoguer avec "l'ensemble des forces vives de la Nation".
Le bilan de la grève s'est alourdi dimanche avec le décès d'une femme de 25 ans blessée par balle vendredi à Kissidougou (centre) lors d'une manifestation. Ce décès porte à dix le nombre de morts depuis le 10 janvier, date du déclenchement du mouvement.
Quatre personnes avaient été tuées par balles samedi, lors de la journée la plus meurtrière depuis le début de la grève dans ce pays miné par une grave crise économique et sociale, la corruption et les détournements de fonds publics.
Les activités du pays sont paralysées et les inquiétudes montent autour du secteur minier, principale source de revenus de la Guinée, qui détient les principales réserves mondiales de bauxite.
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