Jeudi 18 Avril, 2024 á Dakar
Vendredi 01 Juin, 2018 +33
Top Banner
International

JOURNEE INTERNATIONALE DE LA FEMME : Moitié du monde, micro pouvoirs

Single Post
JOURNEE INTERNATIONALE DE LA FEMME : Moitié du monde, micro pouvoirs

Lundi 5 mars, Henriette Niang Kandé, chroniqueuse à « l’improviste » à Sud Quotidien m’envahit tôt le matin. Comme à son habitude, rayon de soleil et piques assassines. Pour m’imposer, toujours par le même procédé, un brin de séduction, un zeste de jugeote, une pincée de lumineuse pensée, beaucoup d’entêtement, l’idée d’une lettre qu’une dizaine de mâles issus de tous les segments de la société, parmi lesquels, moi-même, écriraient aux femmes pour ce jour, 8 mars. Je dis banco.

Originale idée qui nous sortirait du traitement devenu lassant d’un anniversaire dont les origines commencent à se perdre dans les méandres de l’histoire. L’épopée glorieuse des ouvrières de l’habillement de New York qui, le 8 mars 1857 virent leur manifestation pour la suppression des mauvaises conditions de travail, la journée de 10 heures, la reconnaissance de l’égalité du travail des femmes, faire tache d’huile, mérite louange certes, mais depuis, les femmes ont conquis beaucoup d’espaces de libertés et réclamé plus de responsabilité. Elles en ont obtenu. Peut-être insuffisamment encore, de leur point de vue, mais leur lobbying enfonce chaque jour, les barrages machistes de la société et leurs espaces de respiration s’agrandissent. Helen Johnson Sirleaf du Liberia n’est-elle pas devenue, pour parler de mon continent, l’Afrique, la première femme présidente de la République ?

Emballé donc par l’idée alléchante d’Henriette, je me laissais facilement convaincre tout en me disant, pensant à ma propre lettre, que quelques phrases bien tournées, feraient l’affaire et j’en serais quitte avec le lectorat féminin de Sud Quotidien. Devant ma machine, je me rends vite compte que la chose -honni soit qui mal y pense- n’est pas si aisée que ça. Elle est même ardue. Des siècles et des siècles d’un formatage continu du mâle dominant et dominateur structurent la pensée et conditionnent les approches.

Je suis l’homme. Celui qui pense et agit. Par conséquent, se préoccupe seulement de faire régner l’ordre du mâle. A la femme, je sais certes, servir quelques vers séducteurs, offrir gîte et couvert, octroyer une partie de ma force physique et disserter ou badiner souvent tout en me concédant le beau rôle de celui qui a forcément raison au sein du couple. Amené intelligemment par la suggestion d’Henriette, à revoir mes rapports avec l’autre, j’hallucine devant cette conception qui était jusqu’ici mienne et de tant d’autres de ma « race », qui procède d’un éblouissant-aveuglement.

Tout cela me remplit en un flot de remise en cause, de la bêtise masculine. Je découvre toute la stupidité de la conception machiste de la vie. La vanité de l’homme, toute son ignorance de l’autre, du monde et de son environnement social. Je suis angoissé et viens de comprendre l’horrible piège de Madame Henriette.

Et défile devant mes yeux toute l’histoire des luttes féminines, non seulement pour nous amener à ouvrir les yeux, nous les hommes qui croyons tout régenter, tout dominer, tout contrôler, comme elle a su le faire avec moi en cette matinée du 5 mars, mais également pour un monde meilleur, plus équilibré, plus juste, plus équitable. Où les différences ne sont plus synonymes d’abaissement et d’avilissement.

De Clara Zetkin en 1910 qui proposa de faire définitivement du 8 mars, la journée internationale des femmes à la "Deuxième conférence internationale des femmes socialistes" pour promouvoir le droit de vote. Aux nombreuses manifestations qui ont lieu en Allemagne et en Autriche, jusqu’à l’élection à la tête d’un Liberia à la quête d’une liberté, d’Helen Johnson Sirleaf, en ce début siècle en passant par le courageux combat de Caroline Diop, la député(e) ? de Mbour pour l’instauration du Code de la famille au Sénégal, que de tumultueuses et exaltantes luttes, ont mené et mènent les femmes sans se lâcher pour une émancipation participative.

Sources de vie, elles ont été les remparts les plus solides contre la guerre. Dès 1915, Alexandra Kollontai organise à Christiana, près d’Oslo, en Suède, une manifestation des femmes contre la guerre et Clara Zetkin une conférence internationale des femmes, prélude à la conférence de Zimmerwald qui réunit les opposants à la première guerre mondiale.

Elles se battront également pour les droits de l’Homme mieux que les hommes. Lors des journées des 8 et 10 mars 1979, en Iran, des dizaines de milliers d’entre elles manifestent contre le port du voile et l’ordre moral du nouveau régime de l’ayatollah Khomeiny. Les femmes en sont les premières cibles alors qu’elles ont payé un lourd tribut au succès de la révolution (4.000 emprisonnées par le régime du Shah). Non loin de là, dans la Palestine sous occupation, après la première Intifada, des organisations de femmes diffusent, le 8 mars 1988, un programme politique intitulé « les femmes palestiniennes et les territoires occupés ». Elles sont en premières lignes et entendent ramener la paix et la concorde dans cette partie du monde.

Au Sénégal, malgré le statut et le rôle traditionnel (procréer, rester à la maison et élever les enfants) qu’impose souvent les religions, elles n’ont cessé de s’organiser et de se battre quotidiennement. C’est dans ce contexte que naît le Code de la famille en 1972. Un code que d’aucuns ont très vite qualifié de « Code de la Femme ». Particulièrement reconnu pour la protection et la reconnaissance des droits des femmes. Le mariage précoce ou forcé y est formellement interdit.

Ce même code comporte également plusieurs autres avancées. Le statut de la fonction publique dispose qu’il n’y a aucune discrimination fondée sur le sexe dans l’application dudit statut. Le décret de 1977 et la loi de 1982 protégent spécifiquement la femme. Le Code pénal et la loi du 24 janvier 1999 répriment plus sévèrement les violences faites aux femmes définit et prévoit la répression de nouvelles infractions longtemps décriées par les femmes, il s’agit de l’inceste, du viol, du harcèlement sexuel, de l’excision, de la pédophilie et des violences conjugales.

Dans le préambule de la nouvelle Constitution, celle du 22 janvier 2001, il est garanti à la femme, le droit à la propriété de la terre. Je me souviens à ce propos du « choc » que Henriette a eu. Elle avait qualifié cette disposition de populiste et hypocrite parce qu’aucune loi antérieure n’avait interdit ce droit à la femme. Par ailleurs, il faut le reconnaître, le combat pour la vie des femmes reste toujours d’actualité.

Combien d’entre-elles sont mortes en la donnant après avoir été transportée dans une charrette brinquebalante dans une case de santé où il n’y a ni matrone encore moins une infirmière. Il n’y a pas que la guillotine qui tue. En outre plusieurs aspects sont encore à revoir dans ce Code de la famille qualifié de celui de la Femme, notamment ce droit exclusif du mari de choisir le statut conjugal du couple. Dans le cadre du ménage, la puissance paternelle est exercée par le père en raison de sa qualité de chef de famille.

L’enfant n’acquiert la nationalité sénégalaise que par son père, la femme sénégalaise ne peut en aucun cas transmettre sa nationalité à son enfant ni à son mari étranger.

Depuis les crises répétées des années 1970 et les plans d’ajustements qu’ils ont induits dans nos pays, les femmes ont fait montre d’une capacité de résistance admirable, mieux, elles ont permis à nos pays de ne point sombrer. Plus que les hommes en effet, elles ont subi durement les plans du FMI et de la Banque Mondiale qui cassent les services publics et développent la misère. Se scindant les reins, elles ont élevé des barricades contre la pauvreté et la déliquescence de la société. Elles sont encore mal payées en retour. Micro-finance, micro-crédit, comme si elles n’avaient pas suffisamment montré qu’elles savaient sauver un pays, tout comme le développer. Pour construire une société débarrassée du racisme et des préjugés sexistes que les femmes et les hommes pourront se battre ensemble pour une représentation égale des femmes dans tous les domaines de la vie sociale et politique.

Henriette, voilà les quelques mots que je voudrais adresser aux femmes tout en me rendant compte de leur vacuité face à l’immense défi qui se pose au genre humain.



0 Commentaires

Participer à la Discussion

  • Nous vous prions d'etre courtois.
  • N'envoyez pas de message ayant un ton agressif ou insultant.
  • N'envoyez pas de message inutile.
  • Pas de messages répétitifs, ou de hors sujéts.
  • Attaques personnelles. Vous pouvez critiquer une idée, mais pas d'attaques personnelles SVP. Ceci inclut tout message à contenu diffamatoire, vulgaire, violent, ne respectant pas la vie privée, sexuel ou en violation avec la loi. Ces messages seront supprimés.
  • Pas de publicité. Ce forum n'est pas un espace publicitaire gratuit.
  • Pas de majuscules. Tout message inscrit entièrement en majuscule sera supprimé.
Auteur: Commentaire : Poster mon commentaire

Repondre á un commentaire...

Auteur Commentaire : Poster ma reponse

ON EN PARLE

Banner 01

Seneweb Radio

  • RFM Radio
    Ecoutez le meilleur de la radio
  • SUD FM
    Ecoutez le meilleur de la radio
  • Zik-FM
    Ecoutez le meilleur de la radio

Newsletter Subscribe

Get the Latest Posts & Articles in Your Email