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Loi bioéthique : que reste-t-il du projet de loi qui arrive au Sénat ?

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Plusieurs milliers d'opposants au projet de loi bioéthique prévoyant l'extension de la PMA aux couples de femmes ont défilé, le 19 janvier 2020 à Paris, soit deux jours avant l'examen du texte au Sénat.
Après avoir été adopté par l'Assemblée nationale en octobre dernier, le projet de loi sur la bioéthique sera examiné dès mardi au Sénat. Le texte, déjà largement amendé en commission spéciale, pourrait voir de nouveaux changements comme le non-remboursement de la PMA pour les couples de lesbiennes et les femmes seules.

Le projet de loi bioéthique a de nouveau fait descendre ses opposants dans la rue, dimanche 19 janvier. Principal point de crispation ? Sa mesure phare : l’ouverture de la procréation médicalement assistée (PMA) aux couples de lesbiennes et femmes célibataires.

Déjà adopté en première lecture par l’Assemblée nationale, fin octobre, le projet de loi bioéthique, qui a donné lieu à un long débat au sein de l’Hémicycle, sera examiné à partir du mardi 21 janvier, au Sénat.

Mais après le dépôt de 278 amendements, dont 136 ont été adoptés par la commission spéciale au Sénat, le 8 janvier, à quoi ressemble aujourd’hui le projet de loi bioéthique ? PMA non remboursée dans certains cas

N’en déplaise à ses détracteurs, les mesures emblématiques du texte d’origine sont bel et bien maintenues.
Ainsi, si les amendements demandant la suppression de la "PMA sans père" ont tous été rejetés par la commission bioéthique, d’autres, déposés par des membres de la chambre haute, viennent modifier en profondeur le premier article, consacré à la PMA.

Son extension à l’ensemble des femmes, quels que soient leur orientation sexuelle et leur statut marital aura bien lieu, mais elle pourrait ne pas être systématiquement remboursée par la Sécurité sociale.

La sénatrice LR Muriel Jourda propose en effet de ne prendre en charge la PMA pour les couples hétérosexuels que si celle-ci répond à des critères médicaux précis tels qu’une infertilité déclarée ou la prévention de la transmission d’une maladie grave. Les couples de femmes ainsi que les célibataires seraient ainsi contraintes de s'acquitter de la totalité de la facture.

Distinguant la PMA comme solution à une infertilité avérée, de la PMA répondant à un désir d’enfant hors du schéma hétérosexuel, cet amendement va à l’encontre de l’avis de la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, qui s’était prononcée en faveur d’un remboursement total de la PMA, quelle que soit la situation.

Sur Twitter, la sénatrice de l’Oise, Laurence Rossignol, a indiqué que le groupe socialiste auquel elle appartient a voté contre "cet amendement punitif et injuste, de la droite", précisant que le groupe prévoyait de déposer, en séance publique, un nouvel amendement rétablissant l’égalité de prise en charge. Des embryons conservés plus longtemps

Les dispositions consacrées à la culture et la conservation des cellules reproductrices (gamètes) et des embryons ont, elle aussi, fait l’objet de modifications.

Initialement fixée à 14 jours, la durée maximale de culture d’un embryon sera désormais de 21 jours, alors qu'elle n’est que de sept jours actuellement. Pour ce qui est de sa conservation, elle passe de cinq à dix ans.

Proposé par plusieurs sénateurs du groupe socialiste et républicain, un amendement a également été adopté afin d’ouvrir la conservation des embryons, jusque là réservée à des centres publics, à des structures privées à but lucratif. Selon les sénateurs à l’origine de l’amendement, la demande est telle que le service public n’est plus en capacité de pouvoir répondre à chaque demande, ce qui provoque d’importants délais.

Or, l’élargissement de la PMA à de nouveaux bénéficiaires contribuera à engorger davantage les centres, déjà saturés.

Pour le groupe à l’origine de l’amendement, autoriser le secteur privé à proposer la PMA permettrait aussi "de diminuer, de mettre fin à la désinscription des femmes de plus de 40 ans des listes d’attente et d’éviter que, sur des critères monétaires et d’âge, des patientes ne se tournent vers des centres privés à l’étranger."

Levée partielle de l’anonymat des donneurs

L’article 3 a, lui aussi, fait l'objet de nombreuses interrogations en réformant le don de sperme, d’ovocytes et d’embryons par la levée partielle de l’anonymat des donneurs.

Sur l’établissement de la filiation des enfants de couples de femmes nés par PMA, rien de nouveau par rapport au texte initial, malgré la farouche opposition de la droite. Tel qu’approuvé mi-septembre, les couples concernés devront passer par une reconnaissance anticipée de l’enfant devant un notaire. La femme n’ayant pas porté le bébé sera alors reconnue comme l'un des deux parents, à égalité avec sa compagne, la mère biologique.

Les règles en vigueur en matière d’anonymat des donneurs de gamètes, et celles concernant  l’accès à leurs origines des personnes nées d’un don, a provoqué davantage de remous. Jusqu’ici, tout donneur devait donner son accord pour l'éventuelle communication de "données non identifiantes" (aspect physique, origine ou âge), mais aussi de son identité à l’enfant né à la suite de ce don.

Un amendement à cette disposition propose de donner le choix au donneur quant à la divulgation de son identité. En revanche, l’accès aux données non identifiantes serait, lui, accepté de manière irrévocable préalablement au don et ouvert à la demande des personnes nées de ces dons, à leur majorité.

"Ce mécanisme préserve de manière plus équilibrée les intérêts de la personne née d’un don de gamètes (accès aux origines), ceux du donneur (droit à sa vie privée et celle de ses proches), et l’intérêt général (ne pas décourager les donneurs de gamètes)", défend l’amendement adopté.

Les intérêts de la personne née d’un don seront également assurés par la possibilité, défendue par les sénateurs, de demander un accès à l’identité a posteriori. Le Conseil national d’accès aux origines personnelles (Cnaop) pourrait ainsi prendre contact avec un donneur afin de lui demander son accord pour la communication de son identité.

"Bébé-médicament" réintégré, diagnostic préimplantatoire élargi

Il s’agit désormais de l’un des principaux points de friction : celui du bébé-médicament. Alors que l’Assemblée nationale avait voté, en octobre dernier, pour en finir avec cette technique, la commission spéciale bioéthique du Sénat a proposé de la réintroduire. Également baptisée technique du "bébé double espoir", celle-ci a été autorisée à titre expérimental par la loi bioéthique du 6 août 2004 et permet la conception d’un enfant indemne de la maladie génétique dont souffre son frère ou sa sœur, à l’aide d’une sélection d’embryon. Immuno-compatible avec lui ou elle, ce "bébé-médicament" pourra alors permettre sa guérison grâce à un prélèvement de sang de cordon.

Le diagnostic préimplantatoire (analyse in vitro des embryons avant implantation) effectué dans cette sélection d’embryons pourrait également être élargi et autorisé "pour la recherche d’anomalies chromosomiques non compatibles avec le développement embryonnaire".

Aujourd’hui, celui-ci est seulement autorisé quand l’un des deux parents, ou un ascendant immédiat, est porteur d’une maladie génétique "d’une particulière gravité reconnue comme incurable". Selon l’amendement proposé par la sénatrice (LR) Corinne Imbert, il pourrait désormais être possible de vérifier l'état des embryons avant de les transférer dans l'utérus de la mère, s'il y a déjà eu des échecs d'implantation à répétition ou fausses-couches à répétition, "afin d’éviter plusieurs échecs douloureux".

Cependant, le cadre juridique est maintenu, et la commission le rappelle : toute recherche sur un embryon doit faire l’objet d’une autorisation préalable de la part de l’Agence de la biomédecine.

Pas d'évolution en vue concernant la gestation pour autrui (GPA). L'opposition, majoritaire au Sénat, continue de contrer le mouvement. Chef de file du groupe LR, Bruno Retailleau a d'ailleurs fait voter, en commission, un amendement visant à "donner une portée pleine et entière à l'interdiction de la gestation pour autrui en France".


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