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Justice

Avis d' Expert - De la compétence ou non de la Crei : Une approche par la hiérarchie des normes

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Avis d' Expert - De la compétence ou non de la Crei : Une approche par la hiérarchie des normes
Le débat posé ces derniers jours est celui relatif à la compétence ou non de la Cour de répression de l’enrichissement illicite à juger ou non le sieur Karim Meïssa WADE. Pour aborder cette problématique il faut, à notre humble avis, revisiter les enseignements en droit Constitutionnel dispensés dans les facultés de sciences juridiques.

Alors, de quoi peut-il bien s’agir ?

La réponse à la question nous mène à nous tourner vers un principe qui peut paraitre simple mais oh combien important, à savoir la notion de hiérarchie des normes.
L’infraction, portant enrichissement illicite prévue par la loi n°81-53 du 10 juillet 1981 et insérée dans le code pénal en son article 163 bis dispose que : « l’enrichissement de tout titulaire d’un mandat public électif ou d’une fonction gouvernementale…. Est puni d’un emprisonnement de cinq (5) à dix (10) ans et d’une amende au moins égale au montant de l’enrichissement et pouvant être portée au double de ce montant ».
Ainsi, pour pouvoir aboutir à un tel résultat il faut que le Parquet spécial de la Cour de répression se saisisse ou soit saisi sur simple dénonciation par toute personne ayant intérêt, conformément à l’article 5 du code de procédure pénale, avant sa transmission à la Commission d’Instruction de la Cour de l’enrichissement illicite puis à la Cour pour jugement.
En cela, toute personne titulaire d’un mandat électif ou d’une fonction gouvernementale, comme en l’espèce le sieur Karim Meïssa WADE, devrait pouvoir bel et bien répondre de ces actes devant ladite Cour.
 

 

Cependant, la loi étant, de par la hiérarchie des normes, inférieure à la Constitution, peut elle alors apporter une dérogation à ce principe ? Répondre à cette question doit d’abord passer à notre avis à interroger la Constitution elle-même.En effet, l’article 101 de la Constitution de 2001 en son alinéa deuxième stipule : « le premier ministre et les autres membres du Gouvernement sont pénalement responsables des actes accomplis dans l’exercice de leurs fonctions et qualifiés crimes ou délits au moment où il ont été commis. Ils sont jugés par la Haute Cour de Justice ».

De ce fait, deux possibilités s’offrent aux différentes parties interpellées :

D’une part la Cour saisi peut elle-même se prononcer sur sa compétence, et d’autre part la défenderesse peut soulever le contrôle a posteriori. S’il est constant que l’ordonnance de renvoi saisissant la Cour de répression de l’enrichissement illicite pour jugement de Karim Meissa WADE et autres pour les faits d’enrichissement illicite, complicité d’enrichissement illicite et corruption, retient contre les prévenus des dilapidations sur une période comprise entre 2001 et 20012.Alors, appartient-il à la Cour de faire le départ entre les années où l’auteur principal a été président de l’ANOCI ou membre du Gouvernement ? 

 

Et, quand sera-t-il également des actes commis dans l’exercice de sa fonction ? 

Seule la Cour peut apporter des réponses à ces interrogations.

La seconde possibilité de cette épineuse question est l’apanage de la défense. En effet, il est loisible aux parties, en l’espèce à la défenderesse, de soutenir non pas que la Cour de répression de l’enrichissement illicite est incompétente, mais que l’article 163 bis du code pénal en son premier membre de phrase « … fonction gouvernementale… » qui reprend d’ailleurs textuellement les dispositions de la loi n° 81-53 du 10 juillet 1981 portant Cour de répression de l’enrichissement est anti constitutionnel. A cet effet, lorsque les juges sont saisis de cette question, qui est un contrôle à posteriori, ils devront surseoir à statuer et saisir le Conseil Constitutionnel. Ce n’est qu’après la décision du Conseil Constitutionnel que la Cour de répression de l’enrichissement illicite pourra se prononcer et dans le sens de la décision dudit Conseil. 

S’il arrive que le Conseil Constitutionnel dans son dispositif retienne que les personnes visées par le premier membre de la phrase (fonction gouvernementale) ne sont justiciables que de la Haute Cour de Justice, Monsieur WADE et autres bénéficieront ainsi du privilège de juridiction. 

Néanmoins, la loi portant Cour de répression de l’enrichissement illicite demeurera jusqu’à l’abrogation de la disposition incriminée. 

 

[ source : contribution signée Assane Diakhaté ]



4 Commentaires

  1. Auteur

    Xy

    En Août, 2014 (19:43 PM)
    Cette analyse méconnait un principe et une règle en droit qui voudrait que le spécial l'emporte sur le général, autrement dit, si une loi spécifique confie une compétence à un organe, et même en ca
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  2. Auteur

    Kanter

    En Août, 2014 (11:32 AM)
    Cette analyse est à côté de la plaque. Ce qu'il faut voir, c'est l'expression "actes accomplis dans l'exercice des fonctions". Si les actes incriminés entrent dans l'exercice normal des fonction, dans ce cas, le ministre doit être jugé par la Haute cour de justice. Mais en l'espèce, il s'agit d'enrichissement illicite. L'acte de s'enrichir illicitement n'a rien à voir avec les fonctions gouvernementales. Exemple simple : quand on est invité chez une personne, on attend d'être servi, on ne se sert pas soi-même. Le ministre doit travailler et à la fin du mois, il est rémunéré. Son travail consiste à agir pour le compte de la collectivité nationale. S'il fait un quelconque geste qui lui rapporte même, un franc, il est en dehors de ses activités normales. C'est dire que cet acte ne fait pas partie de sa fiche de poste, pour parler simplement. Il s'agit donc d'actes détachables. Un ministre qui vole est voleur. Ici, un vol aggravé par le contexte dans lequel il est accompli. Pour illustration, tous les spécialistes savent que voler à l'étalage en plein jour n'est pas puni de la même façon que voler pendant la nuit avec effraction chez un particulier vivant seul. Ce dernier est beaucoup plus grave. Le législateur est dans son rôle d'adopter un texte, en l'occurrence, la loi sur l'enrichissement illicite, qui sanctionne une infraction de cette nature. Il n'y a donc dans cette affaire de ce ministre aucun problème de hiérarchie des normes.
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    Auteur

    Sarrbabou

    En Août, 2014 (11:35 AM)
    salam la procédure juridique est tellement complexe, je ne me retrouve plus. il faut appliquer la charia islamique, les choses deviendront faciles à résoudre.
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    Auteur

    Sociolog

    En Août, 2014 (09:48 AM)
    Débats de haute facture!J'aime votre professionnalisme et suis confiant quant à l'avenir du pays.
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